Mutyne fait la guerre au greenwashing

Associés dans la vie comme au bureau, le couple que forment Ghizlane et Romain Jougleux a lancé Mutyne, une marque de produits d'entretien écoconçus. Leur motivation première est d'éduquer les consommateurs afin de ne pas tomber dans certains pièges marketing.

Mutyne fait la guerre au greenwashing

Vouloir se convertir à un mode de vie plus écoresponsable est une chose. Bien s’y prendre en est une autre. Le couple de chimistes Ghizlane et Romain Jougleux ont lancé en juin dernier la marque de produits ménagers Mutyne. Leur but : vendre des produits détergents écoconçus, respectueux de la planète, mais aussi de leurs consommateurs. En d’autres termes, les deux fondateurs luttent en premier lieu contre le «greenwashing».

«Nous avons commencé à y penser en juillet 2019, se souvient Ghizlane Jougleux. J’ai travaillé pendant 16 ans dans la formulation de produits détergents. En 2017, je me suis lancée en freelance et j’y ai découvert une accélération du greenwashing. J’étais en colère de voir qu’on utilisait à des fins marketing les bonnes intentions des consommateurs.» Pour rappel, le terme greenwashing désigne les techniques de désinformation de la part d’une marque souhaitant se faire passer pour plus verte qu’elle ne l’est.

Le couple relève au quotidien un nombre incalculable de problèmes chez les a priori bonnes habitudes des Français : «Le fait est que, même en faisant ses courses dans les boutiques en vrac, la notion de zéro déchet est à prendre avec des pincettes. Personne ne pense aux conditionnements des produits en arrière-boutique», souligne Romain Jougleux.

Allier le confort de vie et l’efficacité

Malgré ces constats et leur engagement sur le sujet, les deux fondateurs ne se considèrent pas comme des militants mais comme des experts. «Nous voulons respecter la faune et la flore : nous avons travaillé sur le cycle de vie des produits pour étudier l’écotoxicité, les répercutions aquatiques et les effets sur le réchauffement climatique de nos produits… Mais surtout nous cherchons à vendre des produits efficaces», explique Ghizlane Jougleux. En effet, 93% des consommateurs n’achètent pas de produits écocertifiés parce qu’ils n’en sont pas satisfaits. «Vouloir préserver la nature à tout prix ne veut pas forcément dire qu’il faut abandonner tout confort. J’en ai marre qu’on nous dise que pour être écologique, il faut sortir la brosse, le savon de Marseille et l’huile de coude», résume la cofondatrice.

Produit vaisselle, lessive liquide, spray multi-surfaces… Mutyne vend huit références sur son site internet, qui mise aussi sur la pédagogie grâce à une rubrique blog. «Utiliser nos produits écoconçus ne suffit pas, il faut aussi savoir nettoyer à bonne température pour ne pas consommer plus d’énergie que nécessaire», explique par exemple Romain Jougleux.

Faire vivre la filière française

Sept des huit références de la marque sont fabriquées en faisant appel à des fournisseurs de Boulogne-sur-Mer. «Pour les tablettes pour lave-vaisselle, la technique est particulière. Les seuls à avoir ce savoir-faire, tout en restant sur du Made in France, sont à Saint-Etienne», avoue le cofondateur. «Produire en circuit court est très important pour nous. Notre filière mobilise moins de 10 000 acteurs dans le pays. En général, les produits détergents viennent de pays voisins comme l’Allemagne, ou l’Espagne. Or, la Covid a bel et bien montré qu’on ne pouvait pas continuer de s’appuyer sur des industriel étrangers, même si ça coûte moins cher», complète son épouse.

Par ailleurs, Romain Jougleux anticipe la réaction des plus sceptiques : oui, leurs liquides sont contenus dans des bidons en plastique. Un comble pour une entreprise qui se veut écoresponsable. Or, «le verre n’est pas forcément une solution plus vertueuse car son process de fabrication (four à température élevée) et son transport (poids important) sont très énergivores, et génèrent donc une empreinte carbone importante, explique-t-il. Et pour des produits d’entretien et de cosmétique, il est préférable d’utiliser des contenants à usage unique pour une question d’hygiène. Le plastique que nous utilisons est bien sûr recyclable». Son conseil est d’avant tout traquer le plastique inutile, dans le cas du suremballage de produits alimentaires par exemple. «Si tout le monde s’y mettait, ce serait déjà un grand pas.»