Mieux prévenir les méthodes du blanchiment

La Compagnie régionale des commissaires aux comptes (CRCC) vient d’organiser une conférence intitulée : “Blanchiment : mesurez votre risque d’exposition”.

Éric Vernier, lors de sa conférence sur les méthodes des blanchisseurs.
Éric Vernier, lors de sa conférence sur les méthodes des blanchisseurs.
Éric Vernier, lors de sa conférence sur les méthodes des blanchisseurs.

Éric Vernier, lors de sa conférence sur les méthodes des blanchisseurs.

Pour Éric Vernier, invité en tant que spécialiste, « le blanchiment d’argent sale touche désormais l’ensemble des activités. » De quoi concerner bon nombre d’acteurs économiques régionaux, qui sont venus nombreux garnir la salle de conférences de la caisse régionale du Crédit agricole à Amiens. En préambule, Éric Ver nier présente un large état des lieux de l’argent sale, qui circule partout et qu’il dénomme PCB (Produit criminel brut) : « C’est un PIB (Produit intérieur brut) parallèle, qui représente 2 000 milliards de dollars, soit l’équivalent de la 8e puissance mondiale. C’est l’argent sale des mafias transnationales. Cet argent noir provient du trafic de drogue, mais aussi d’êtres humains, auquel on peut englober les adoptions illicites d’enfants et les ventes d’organes. » Il poursuit : « Il faut ajouter à ces trafics, le vol, la contrebande et la contrefaçon, qui représentent 10% des échanges mondiaux. Enfin, il faut citer les crimes contre l’environnement et notamment les bateaux poubelles, qui sont volontairement coulés en mer. » Puis le spécialiste expose : « La plus grande partie de cet argent est réinjectée dans l’économie normale, pour être blanchie, grâce à des stratagèmes très sophistiqués. Il y a par exemple le faux procès en litige commercial entre deux sociétés complices, dans lequel on demande une somme importante en dommages et intérêts, ou encore la fausse vente aux enchères d’œuvres d’art. »

Concurrence déloyale

Éric Vernier, poursuit la démonstration : « On peut utiliser les mêmes principes pour le blanchiment de proximité de l’argent sale des trafics, en utilisant des produits comme des voitures ou du matériel multimédia. Internet facilite beaucoup ces échanges. » Selon lui, la soif de blanchiment s’étend désormais aux rachats d’entreprises ou de biens immobiliers.

« Les PME rachetées en partie ou entièrement n’hésitent pas à faire de la concurrence déloyale pour conserver un marché et continuer à blanchir. Certains commerces gonflent leur chiffre d’affaires artificiellement ou vendent moins cher que leurs concurrents », précise-t-il. Et de prévenir : « D’importants biens immobiliers sont acquis sans négociation et parfois au-dessus de leur valeur. Cela doit alerter. » Un propos confirmé par Alexandre Herbeau, formateur pour la CNCC (Compagnie nationale des commissaires aux comptes), venu exposer les obligations de la profession : « Dans la région, nous avons pu mettre un terme récemment à un rachat d’un commerce d’appareils photos à Dunkerque par une mafia hollandaise. Et à Compiègne, il s’agissait d’une acquisition immobilière par une mafia russe. » Il rappelle : « Les Commissaires aux comptes sont tenus de mettre en place une organisation interne pour dénicher les tentatives de blanchiment. Par ailleurs, ils doivent le signaler dès lors qu’il y a le moindre soupçon. »