Loi narcotrafic: le Sénat propose la création d'un parquet national anti-criminalité organisée
Le Sénat a lancé mercredi des débats très attendus sur la lutte contre le trafic de stupéfiants, en adoptant en commission une proposition de loi transpartisane qui propose notamment la...
Le Sénat a lancé mercredi des débats très attendus sur la lutte contre le trafic de stupéfiants, en adoptant en commission une proposition de loi transpartisane qui propose notamment la création d'un parquet national anti-criminalité organisée (Pnaco).
"Sortir la France du piège du narcotrafic": ainsi intitulé, le texte des sénateurs Étienne Blanc (Les Républicains) et Jérôme Durain (Parti socialiste) a été examiné en commission des Lois, avant son arrivée dans l'hémicycle à partir de mardi.
Issue d'une commission d'enquête sénatoriale sur l'impact du narcotrafic en France, l'initiative a intéressé les gouvernements successifs ces derniers mois. Tout particulièrement le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, qui a fait de la lutte contre le trafic de drogue l'une de ses priorités, sous l'angle de la fermeté et de la répression.
Si les débats seront largement approfondis en séance publique en présence du gouvernement, les sénateurs de la commission des Lois ont déjà remanié le texte.
Principale modification: après avoir envisagé de créer un "parquet national anti-stupéfiants", le Sénat a opté pour une structure élargie, dénommée parquet national anti-criminalité organisée - le "Pnaco".
Cette nouvelle structure, sur le modèle du PNF (parquet financier) ou du Pnat (parquet anti-terroriste), aurait notamment un "monopole sur les crimes les plus graves" et serait chargé de "coordonner les parquets sur tout le spectre de la criminalité organisée".
"Ce qui nous manque, c'est une direction, un pilotage. Il nous faut une spécialisation et une incarnation pour que la lutte contre le narcotrafic ait un visage, une structuration", appuie auprès de l'AFP M. Durain, qui est également l'un des co-rapporteurs du texte avec la présidente LR de la commission des Lois, Muriel Jourda.
Freiner le mouvement
Ce Pnaco, qui se substituerait à l'actuelle juridiction nationale chargée de la lutte contre la criminalité organisée (Junalco), s'appuierait sur un Office anti-stupéfiants (Ofast) aux prérogatives renforcées, placé sous la double tutelle de Beauvau et de Bercy.
Le texte propose par ailleurs de nombreux outils à la justice et à la police, comme la création d'une procédure "d'injonction pour richesse inexpliquée" pour obliger les suspects à s'expliquer sur leur train de vie.
La création d'une nouvelle infraction "d'appartenance à une organisation criminelle", inspirée de la législation italienne antimafia, est également proposée par la commission sénatoriale, tout comme un mécanisme de gel administratif des avoirs des narcotrafiquants.
Le régime des repentis, qui collaborent avec la justice, y est également approfondi.
"Autour de nous, des pays sont passés au stade du narco-Etat. Nous avons une chance de freiner le mouvement, mais il est urgent de se doter d'instruments pour faire face", explique Muriel Jourda à l'AFP.
Même si de nombreuses mesures font consensus, certaines sont plus irritantes, comme l'idée de créer un procès-verbal distinct - ou "dossier-coffre" - pour ne pas divulguer à la défense certaines techniques d'enquête sensibles; ou la possibilité accordée aux préfets de prononcer des "interdictions de paraître" sur les points de deal.
Une partie de la gauche regrette aussi que le texte n'aborde pas le volet de la prévention face au trafic: "On s'intéresse qu'au volet policier, judiciaire, répressif mais il faudrait mener en parallèle une grande campagne de prévention, et agir sur la politique de la ville", estime le sénateur écologiste Guy Benarroche.
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