Les raisons d'une sourde colère
Des manifestations devant les grandes surfaces au printemps, des rencontres avec les autorités, une négociation ardue avec le ministère et quelques avancées plus loin n'ont pas satisfait le monde agricole qui voit les mauvaises nouvelles défiler.
Outre une météo particulièrement difficile, les agriculteurs de la région voient se succéder les mauvaises nouvelles depuis quelques semaines. Il y a d’abord la future taxe foncière, votée lors de la dernière loi de finances en juin dernier : dès 2014, le calcul de la taxe foncière pour les terrains agricoles classés constructibles (dans le millier de communes soumises à la taxe sur les logements vacants) sera basé sur la valeur cadastrale majorée systématiquement de 25% et de 5 euros par mètre carré (10 euros en 2016). «Une majoration minimale de 50 000 euros de la base imposable pour un hectare», dénonce la Coordination rurale. Touchés dans leur patrimoine, les agriculteurs le sont aussi dans leurs activités quotidiennes. Le prix du lait concentre à lui seul le ressentiment du monde rural : si le ministre de l’Agriculture et le médiateur avaient réussi à faire entendre raison aux acteurs de la filière grâce à une augmentation de 25 euros la tonne, les producteurs enragent de ne pas voir la répercussion de l’augmentation du prix du beurre et de la poudre de lait écrémé. Les éleveurs vendent en théorie 330 euros les mille litres de lait, mais le prix réel avoisine 315 euros. Et le tarif pourrait encore baisser à la rentrée ! «L’embellie sur le marché du lait est captée par d’autres intermédiaires et cela est intolérable», s’indigne la Coordination rurale.
Le diester pointé. Face à cela, les agriculteurs dénoncent certains lobbies énergétiques en France et pointent le diester : «En concentrant autour de ses unités de trituration et d’estérification la production de diester, Sofiprotéol (et ses sociétés filiales) s’est attaché à prolonger le monopole qu’elle détient sur le marché des huiles en France. Pour arriver à ses fins, les agriculteurs, les consommateurs, les finances publiques et maintenant les employés des usines ont été lourdement mis à contribution.» Un rapport de la Cour des comptes de janvier 2012 sur les biocarburants est édifiant : une demande de 1,6 million de tonnes pour une production autorisée de 2 millions. «La filière biodiesel a bénéficié d’1,29 milliard d’euros de soutien de l’Etat, un montant supérieur aux investissements…» Une gabegie qui rend amers les éleveurs et qui pousse à faire monter la pression pour la rentrée. Les autorités sont prévenues.