Les nouveaux défis de l'artisanat

Alain Griset, président de la chambre des métiers et de l'artisanat lors des rencontres franco-allemandes.
Alain Griset, président de la chambre des métiers et de l'artisanat lors des rencontres franco-allemandes.


À l’occasion de la 22e édition des Rencontres des chambres de métiers et de l’artisanat franco-allemandes qui s’est tenue du 23 au 25 mai derniers, 350 chefs d’entreprise, élus et acteurs institutionnels ont évoqué les nouveaux défis de l’artisanat et avancé sur de nombreux points.

 

L’artisanat en France et en Allemagne représente plus de 2 millions d’entreprises, soit 8 millions d’actifs, et totalise près de 800 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Le secteur est aujourd’hui confronté au défi du numérique et, face à ce phénomène, les petites et moyennes entreprises entendent franchir le cap du digital. C’est ainsi que les chambres de métiers et de l’artisanat françaises et allemandes se sont accordées sur plusieurs points. 

Renforcer la formation professionnelle. L’APCMA, les chambres de métiers allemandes (DHKT) et l’Office franco-allemand pour la jeunesse (OFAJ) ont signé une convention de partenariat destinée à renforcer la coopération franco-allemande dans le domaine de la mobilité européenne des apprentis. La formation en alternance rencontre un large succès en Allemagne et en Autriche, mais est trop peu mise en place dans le reste de l’Europe“, regrettait la députée européenne Petra Kammerevert. C’est une chance inouïe à la fois pour le jeune mais aussi pour l’entreprise. Il faut miser sur la coopération, créer des réseaux, un échange dans la formation“, a-t-elle martelé. L’artisanat forme 580 000 jeunes par an en apprentissage en France et en Allemagne et environ 700 apprentis bénéficient d’échanges franco-allemands chaque année. 

De son côté, Jean-Pierre Bechler, président de la commission des formations de l’APCMA, affirme que l’artisanat a de nombreux atouts qu’il faut exploiter en le faisant monter en compétition : “Vous pouvez être le meilleur artisan, si vous n’avez pas de clients vous n’êtes rien…” Manfred Bitter, directeur de la chambre des métiers et de l’artisanat de Trèves, déplore le peu d’intérêt de la jeune génération pour les métiers de l’artisanat et, pour faire changer les mœurs, il y a encore beaucoup de chemin à parcourir. Cependant, 2015 fut “une belle année pour l’artisanat : peu de chômage, plus de consommation, plus d’investissements. Cela permet aux entreprises artisanales de répondre aux commandes. C’est environ 137 500 personnes qui ont conclu un contrat dans l’artisanat, soit plus de 0,1% de plus par rapport à l’année précédente“. Les chiffres ne peuvent être que motivants, et l’objectif est maintenant de convaincre les jeunes pour répondre aux 4 000 postes qui sont à pourvoir dans ce secteur. L’alliance a pour objectif, selon Manfred Bitter, de “former des professionnels en Allemagne et surtout mettre l’accent sur le fait que ça soit équivalent à une formation universitaire. Pour cela, il faut préparer et informer les jeunes dès le lycée“. L’année dernière, c’est “seulement” 7 200 offres de formation qui ont été proposées en Allemagne, à cause de la création tardive de l’alliance. 

Mais pour cette année, plusieurs milliers de postes devraient être mis en place. Du côté français, Laurent Serre, président de la chambre des métiers et de l’artisanat de la Drôme, révèle que la réforme de formation professionnelle a eu beaucoup d’impact. La mutation et la montée des régions fait qu’elles ont désormais la responsabilité des formations professionnelles et, afin de les promouvoir, il faut “renforcer le patrimoine naturel de la chambre des métiers et de l’artisanat. Cela a pour but aussi de lutter contre le décrochage scolaire“. En 2015, 2 millions et demi de personnes ont fait des demandes de dossier pour le compte personnel de formation – destiné aux personnes d’au moins 16 ans, handicapées et/ou mobiles, à la recherche d’emploi – et 212 000 dossiers ont été ouverts. Aujourd’hui, la CMA souhaite “offrir plus de services et attirer les jeunes vers ces métiers grâce à la variété des offres, et ainsi devenir un réel porteur d’opportunité“. 

Accompagnement dans la transformation numérique. Les entreprises artisanales doivent pouvoir décider de la manière d’intégrer des solutions numériques adaptées tant dans leur travail que dans leurs usages. À ce titre, les pouvoirs publics ainsi que les organisations représentatives de l’artisanat doivent offrir un accompagnement qui passe par «la mise en place de nouveaux procédés, de nouvelles applications web, ainsi que la robotisation, juge Frank Besombes, secrétaire général de CMAI Calvados-Orne. Il est aujourd’hui indispensable d’intégrer la chaîne numérique au sein des entreprises, que ce soit en aval ou en amont du cycle de production”.

Face à la pression de la concurrence, “les petites et moyennes entreprises sont dépassées par la révolution technologique, elles ont besoin d’un soutien pour affronter ce défi. Un véritable service de conseil est à offrir“, ajoute Udo Hansen, secrétaire général de la CMA à Flensburg. Ces échanges se poursuivront à travers les jumelages établis entre les chambres de métiers françaises et allemandes. Les prochaines Rencontres se dérouleront en 2019 en Allemagne.

 

D.R.

Alain Griset, président de la Chambre des métiers et de l'artisanat, lors des Rencontres franco-allemandes.

 

ENCADRE

 

L’artisanat en chiffres  

En Allemagne (chiffres 2014) :

− Plus d’un million d’entreprises artisanales

  • 553 milliards d’euros de chiffre d’affaires

  • 5,3 millions de salariés

En France (chiffres 2015) :

− 1 100 000 entreprises artisanales

  • 300 milliards d’euros de chiffre d’affaires

  • 3,1 millions d’actifs