Les intercommunalités attendent des « clarifications »
Finances, relations avec l’État... Intercommunalités de France attend de nombreuses réponses de la part du gouvernement. Les premières déclarations de Michel Barnier apportent quelques éléments. Avant le projet de loi de Finances 2025.
L'heure est à l'attente de «clarifications». Le 30 septembre, lors d'une conférence de presse en ligne, Intercommunalités de France, fédération nationale des métropoles, agglomérations, communautés urbaines et communautés de communes, exprimait ses incertitudes et ses attentes vis-à-vis du nouveau gouvernement de Michel Barnier. «Nous attentons plusieurs clarifications», a expliqué Sébastien Martin, président de l'association. Ces clarifications portent en premier lieu sur les enjeux financiers, et ce, à double titre. Tout d'abord, le nouveau gouvernement va-t-il lui aussi «jouer les collectivités contre le reste de la France ?», interroge Sébastien Martin.
Cet été, en effet, une forte polémique a opposé Bercy et les élus locaux. Bruno Le Maire, alors ministre de l'Économie, avait pointé «une augmentation extrêmement rapide des dépenses des collectivités», comme facteur majeur de la dégradation – imprévue, selon Bercy - des comptes 2024 de la nation. Une analyse qu'Intercommunalités de France juge particulièrement non fondée. L'association rappelle ainsi que les collectivités locales ne représentent que 18% du total de la dépense publique, le reste étant le fait de l'Etat et de la protection sociale.
Par ailleurs, entre 2010 et 2022, la
dette des collectivités locales est restée stable entre 7 et 9% du
PIB, tout comme la part des dépenses des collectivités locales, aux
alentours de 11%, «alors
que nous avons été amenés
à exercer de plus en plus de responsabilités», rappelle Sébastien
Martin.
S'il
persistait avec le nouveau gouvernement, ce potentiel
différentiel
d'analyse sur la responsabilité des collectivités locales dans le
déficit public pourrait peser lourd dans le futur projet de loi de
Finances.
En effet, personne ne peut être «exclu
du débat»
sur la nécessité de réduire les dépenses publiques, accorde le
président d'Intercommunalités
de France.
Toutefois, «expliquer
que demain, les collectivités devront dépenser moins, et notamment
en investissements, c'est un mensonge»,
estime-t-il.
Pour
l’heure,
en attente de la présentation du projet de loi de Finances
à l'Assemblée
nationale, «nous
n'avons jamais été autant dans le flou (…), nous avons
besoin de visibilité sur nos recettes»,
pointe
Sébastien
Miossec, président
délégué de l'association. Plusieurs hypothèses circulent qui
inquiètent. La DGF, Dotation
globale de fonctionnement, va-t-elle diminuer ? Qu'en sera-t-il
du «fonds
vert»,
dédié aux projets d'accélération de la transition écologique
des collectivités et doté de 2,5 milliards d'euros en 2024, mais
qui, selon des documents préparatoires au budget, consultés par
l'AFP, pourraient être réduits à 1,5 milliard d'euros ? Que
deviendront les programmes «territoires
d'industrie» ?
De son côté, Intercommunalités de France plaide pour une suspension de la baisse de la CVAE, Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. Celle-ci, qui a vu son taux baisser depuis 2020 de 1,5 à 0,28%, devait normalement s'éteindre par palier d'ici à 2027.
Une certitude,
des efforts à venir
Le
1er
octobre, lors de son discours de politique générale devant
l'Assemblée nationale, le
Premier
ministre,
a proposé un «contrat
de responsabilité»
avec les collectivités locales. À propos de la nécessité de
diminuer les dépenses publiques, il a évoqué celle
de réaliser des choix. «Ces
choix, nous les ferons avec les collectivités locales»,
a-t-il promis. Une position qui confirme celle de Catherine Vautrin,
ministre
du Partenariat avec les territoires et de la Décentralisation,
intervenue
au Congrès
des Régions
de
France
à Strasbourg, le 27 septembre. La ministre avait évoqué l'effort
financier à venir. «Les
efforts seront importants, nous devons tous y prendre notre juste
part. Mais pour qu'elle soit juste, cette part doit être discutée
sereinement et en responsabilité»,
a-t-elle déclaré,
selon
le
quotidien économique Les
Échos
du 27 septembre. Catherine Vautrin a également affirmé : «Je sais combien les responsables des départements, des régions, des
intercommunalités, des communes sont avant tout animés d'un souci
exemplaire de la bonne gestion des deniers publics».
Et elle s'était déclarée prête à ouvrir «un nouveau chapitre de la relation avec les collectivités
locales».
Reste à l'écrire.
Lors
de sa prise de parole, Sébastien
Martin s'est dit «très
heureux»
de la création de ce «super
ministère»
qui comprend notamment
les
transports,
la ruralité, et les collectivités. Pour autant, sur les sujets de
la décentralisation, «je
ne me fais pas d'illusions»,
a-t-il ajouté. En effet, pour lui, le contexte politique fragile ne
se prête pas à des transformations majeures.
Intercommunalités de France espère la poursuite des
discussions entamées avec le précédent gouvernement
sur la décentralisation de la politique de l'habitat.
Des «clarifications» devraient commencer à être apportées ce mois-ci. Le 10 octobre, avec - normalement - la présentation du projet de loi de Finances pour 2025, en Conseil des ministres. Et du 16 au 18 octobre, Catherine Vautrin ainsi que plusieurs autres ministres participeront à la 34e Convention des Intercommunalités de France qui se tiendra au Havre.
Les
collectivités locales, premières acheteuses publiques
Selon
la dernière édition du « baromètre
de la commande publique »,
publié par Intercommunalités de France et la Banque des
Territoires, en 2023, la commande de l'ensemble des acteurs publics
s'élève à 89
milliards d’euros,
soit une progression de 4 milliards d’euros (+ 4,4 %), par rapport
à l’année 2022. En volume, cela représente un retour au niveau
de 2021. Les collectivités locales sont
le
premier acheteur public depuis dix ans. En 2023, elles représentent
50% de la commande publique.