Les Français, des consommateurs responsables ?
En dépit de la crise, les consommateurs s'inquiètent toujours plus de l'impact environnemental et social de leurs achats. Au-delà de ceux alimentaires, ils s'intéressent à présent à d'autres secteurs, comme la mode, d'après le baromètre annuel Max Havelaar.
Des habitudes qui s'enracinent, des attentes nouvelles : tel est le constat posé par la troisième édition du baromètre annuel de la transition alimentaire, rendue publique par Max Havelaar France, ONG spécialisée dans le commerce équitable, le 18 novembre. Le sondage, réalisé par OpinionWay ce mois d'octobre, montre «la persévérance, la maturité et le pragmatisme» des consommateurs, estime Eléonore Quarré, directrice des études opinion et politique chez OpinionWay. Premier constat, en effet, «les achats en produits responsables n'ont pas diminué. On retrouve des niveaux égaux ou supérieurs à 2019. Cette tendance est rassurante pour l'avenir», annonce Éléonore Quarré. Actuellement, neuf Français sur dix achètent un produit dit «responsable» (local, bio, issu du commerce équitable, zéro déchet, Made in France…), au moins une fois par mois. Et ils sont près des deux tiers à avoir un rythme hebdomadaire. Dans cette catégorie, nombreux sont ceux qui ont accru leur consommation de produits équitables ou limitant les emballages cette année, poursuivant la progression de 2020. Au-delà de l'évolution quantitative de la consommation, deux autres constats réalisés par l'étude semblent indiquer une croissance pour le futur. À commencer par un fort effet générationnel : les jeunes sont les premiers concernés par ce type de consommation. Par exemple, 65 % des moins de 35 ans consomment des produits bio, contre 52 % pour l'ensemble de la population. Et ils sont 67 % à choisir des produits sans ou limitant les emballages, contre la moitié de la population. Autre dynamique positive, «la consommation responsable ne se limite plus à l'alimentation, même si celle-ci reste le premier domaine concerné. D'autres types de produits sont aujourd'hui touchés, car les consommateurs essaient d'avoir une consommation responsable globalisée, un signe de maturité de leur démarche», constate Éléonore Quarré. Parmi les secteurs où ce type de consommation se développe figurent, notamment, l'habillement et la papeterie.
Une offre se développe dans la grande distribution
L'étude met également en lumière d'autres évolutions qui semblent, elles aussi, aller dans le sens d'une croissance des achats responsables. Aujourd'hui, les lieux privilégiés pour les courses alimentaires responsables restent les hypermarchés et supermarchés généralistes. Ces derniers sont fréquentés par 69 % des personnes achetant au moins une fois par semaine ce type de produits. Quant aux magasins proches du domicile et aux sites marchands, ils obtiennent de plus en plus la faveur des consommateurs : 19 % d'entre eux les fréquentent, contre 12 % en 2019. A contrario, avec le retour à la normale après les périodes de confinements, les Français ont un peu délaissé marchés, enseignes bio et ventes directes chez les producteurs, vers lesquels ils s'étaient alors tournés. Toutefois, le niveau auquel ils les fréquentent demeure supérieur à celui de 2019. Au total, «les consommateurs ont diversifié leurs lieux d'achats» de produits responsables, commente Éléonore Quarré. Et cette évolution tient pour partie à une modification de l'offre. Par exemple, en novembre 2020, les acteurs de la grande distribution se sont engagés à mettre en avant des produits frais et des produits locaux. «Les supermarchés généralistes ont étoffé leur offre», confirme Éléonore Quarré. Les consommateurs semblent avoir perçu une évolution du comportement des entreprises alimentaires. Suite à la crise sanitaire, elles bénéficient d'un regain de confiance des Français : une écrasante majorité (88 %) d'entre eux considèrent encore qu'elles devraient proposer plus de produits responsables, mais cette proportion est en baisse depuis 2019. Autre nouveauté pointée par l'étude : en matière de produits alimentaires responsables, les attentes des Français commencent à se porter sur la restauration. «Proposer ce type de produits à la carte d'un restaurant n'est plus un bonus», souligne Éléonore Quarré. D'après l'étude, 86 % des Français souhaitent qu'on leur propose des produits alimentaires locaux, et 79 % veulent être informés sur la provenance et la qualité de ce qu'ils mangent. Une proportion à peine inférieure (77 %) souhaitent que les produits proposés garantissent une juste rémunération à leurs producteurs... Une attente qui ne rencontre pas forcément une offre suffisante, semble-t-il : 87 % des Français considèrent qu'il est plus facile de consommer responsable chez soi qu’au restaurant...
Anne DAUBRÉE