Rencontre avec Sophie Lemierre-Pupier, dirigeante du cabinet de ressources humaines Sofia
«Les anciens militaires sont des perles pour une entreprise»
Être chef d'entreprise est un engagement du quotidien. Chez Sophie Lemierre-Pupier, ce terme prend tout son sens. Capitaine d'Armée, elle a choisi de mettre son expérience humaine au service de militaires en reconversion professionnelle en montant le cabinet Sofia.
Quand on parle de révélation, pour
Sophie Lemierre-Pupier, l'armée a surtout été une évidence. Même
sans être issue d'une famille de militaires, elle s'est rapidement
reconnue dans ces valeurs. «La
Journée Défense et Citoyenneté a été pour moi une révélation.
Je me suis découverte un côté patriote que je ne pensais pas du
tout avoir ! Je me suis d'abord engagée en tant que réserviste dans
l'Armée de terre, tout en menant mes études en ressources humaines
en parallèle»
se rappelle-t-elle. Elle intègre Saint-Cyr et obtient le grade de
capitaine, spécialisée dans les ressources humaines. «Mais
on reste avant tout militaire donc nous sommes soumis aux mêmes
entraînements»
précise la dirigeante.
Elle
effectue différentes missions au Liban ainsi qu'à La Réunion, pour y organiser sur place les effectifs. En 2022, elle
quitte l'armée pour pouvoir mieux gérer sa vie de famille mais sans
pour autant quitter le monde des ressources humaines. Arrivée à
Lille il y a bientôt un an – pour suivre son mari, lui aussi
militaire – Sophie Lemierre-Pupier se dit que c'est le bon moment
pour se lancer un nouveau challenge.
20
000 militaires quittent l'Armée chaque année
«Avec
mes compétences RH d'un côté, et militaires de l'autre, j'ai la
possibilité d'aider les militaires qui veulent retourner dans le
civil. Ils sont 20 000 chaque année à quitter l'Armée française».
Autant de profils variés – l'Armée compte plus de 400 métiers –
mais qui ont parfois du mal à s'insérer dans le civil. «C'est
un choc de quitter l'Armée et d'arriver en entreprise. Étrangement,
la vie civile ressemble à une jungle pour eux : il n'y a plus de
grade ni d'uniforme... Il faut les rassurer. 80% de ces militaires ne
savent pas ce qu'ils veulent faire et souvent, ils ont changé de
métier tous les deux ans. Ce sont de vraies perles pour les
entreprises parce qu'ils savent s'adapter et il ont aussi beaucoup de
résilience».
Via
son cabinet, Sofia, elle accompagne donc ces profils atypiques sur
des ateliers : comment rédiger son CV et traduire ses expériences
pour le civil, test de personnalité... Sophie Lemierre-Pupier mise
beaucoup sur les softskills. «J'ai
des postes pour tout le monde : directeur de site, manager de
transition, DRH... dans la logistique comme dans l'industrie ou les
services. Les entreprises qui me contactent recherchent le
savoir-faire des militaires qui ont l'habitude de travailler dans des
conditions difficiles, de changer plusieurs fois de carrière...».
Aujourd'hui la majorité de ses clients sont régionaux mais la
dirigeante travaille aussi partout en France et même à
l'international.
En
complément des dispositifs existants à l'Armée
À
son actif, près de 70 postes et 200 militaires – dont seulement 4
femmes ! – qu'elle accompagne sur un secteur des RH très
confidentiel. «Il
y a quelques indépendants mais je n'ai recensé que deux cabinets
comme le mien, et je pense être la seule à avoir ces deux
casquettes : militaire et RH. Il faut être du milieu pour
accompagner le militaire comme il le faut».
Il existe déjà des dispositifs intrinsèques à l'Armée, via des aides à la reconversion. «Il est difficile d'absorber l'ensemble du flux. Je travaille dans une logique de partenariat avec l'Armée, Sofia compense un manque, je ne veux pas du tout prendre la place de ce qui peut déjà exister».
Si elle est aujourd'hui passée dans le civil, Sophie Lemierre-Pupier n'a pour autant pas du tout oublié l'Armée puisqu'une fois par semaine, elle travaille dans la cellule partenariat jeunesse en tant que commandante, où elle œuvre à des opérations de sensibilisation de la jeunesse aux métiers de la défense et à la mémoire. «Je suis avant tout au service du militaire. Évidemment, j'ai envie de faire évoluer mon entreprise mais mon objectif n'est pas du tout capitalistique. Il est social.»