Le secteur du sport attend son héritage olympique

Les professionnels du sport aimeraient transformer l’enthousiasme inédit suscité par les épreuves olympiques en pratique régulière. Un enjeu économique, mais surtout sanitaire, alors que la sédentarité aggrave les maladies et tue chaque année 50 000 personnes en France.

Les épreuves de para-athlétisme au Stade de France, le 6 septembre.
Les épreuves de para-athlétisme au Stade de France, le 6 septembre.

Les espoirs se concentrent sur la natation, le tennis de table et le BMX. Il ne s’agit plus de médailles, puisque les Jeux olympiques et paralympiques sont terminés, mais de conversions des exploits sportifs en inscriptions dans les clubs de sport et en vente de matériel. Le secteur économique du sport espère bénéficier de l’impact des compétitions de Paris 2024. Après « cet été exceptionnel où on a chanté la Marseillaise et du Joe Dassin », « nous avons une responsabilité dans l’héritage qui s’annonce », s’écrie Virgile Caillet, délégué général d’Union sport et cycle (USC), qui rassemble les entreprises « du sport, des loisirs et des mobilités actives ». Les représentants de la filière étaient rassemblés le 5 septembre pour leur congrès annuel au « Club France », un lieu du nord-est parisien ouvert, pendant la période olympique, aux supporters et aux athlètes.

Le secteur représente « 2,6% du PIB, l’équivalent de l’hôtellerie et la restauration, et davantage que la culture », précise Benoît Gausseron, « directeur des Jeux olympiques et paralympiques » au sein du groupe bancaire BPCE. Il ajoute que le sport constitue « le deuxième poste de dépenses des collectivités locales ». Présidente d’USC jusqu’à ce congrès, Pascale Gozzi, qui dirige quatre points de vente sous l’enseigne Sport 2000 dans la région grenobloise, assure que « les événements internationaux ont un impact sur la dynamique de nos commerces ».

Pour l’instant, toutefois, les conséquences demeurent mesurées. « Les premières remontées, en août, sont positives, mais on attend la confirmation », admet le délégué général d’USC. En réalité, « la rentrée se fait sous tension pour les entreprises du secteur », reconnaît-il en livrant les clefs de cette morosité : « Le pouvoir d’achat est en berne, la demande atone, les dépenses d’investissement baissent ». L’industrie du vélo ressent plus que d’autres ce coup de frein. Après un engouement pour les bicyclettes « made in France » juste après la pandémie, les assembleurs et les distributeurs peinent à écouler leurs stocks. « Les ventes de vélos enregistrent une baisse de 9% au premier semestre », révèle Virgile Caillet. Le délégué général d’USC voit toutefois un signe d’espoir dans les ventes d’accessoires pour bicyclettes, qui progressent de 2% durant la même période : « Cela veut dire que les gens roulent ».

Les seules données tangibles qui rassurent le secteur du sport concernent les Jeux olympiques eux-mêmes. Dominique Carlac’h, présidente du comité sport du Medef, aligne les chiffres. « 181 000 emplois ont été créés depuis 2018 grâce aux JO », indique-t-elle, dont « 50 000 dans la restauration et l’hôtellerie, 30 000 dans la construction, 26 000 dans la sécurité et 12 000 dans la logistique ». Dans ces « secteurs en tension », ce seront « des emplois durables », affirme-t-elle. Geoffroy Cailloux, à la Direction générale des entreprises (DGE) du ministère de l’Economie, ajoute que l’événement a attiré « 11,2 millions de visiteurs » en Ile-de-France, soit « 4% de plus qu’en 2023 ». Dès lors, la France serait inspirée de miser sur le « tourisme sportif », qui inclut les séjours actifs, de cyclotourisme par exemple, mais aussi le fait d’assister à des événements sportifs, précise le responsable de Bercy.

L’urgence sanitaire

Le principal espoir du secteur, toutefois, est moins spectaculaire, mais plus vital. Valérie Fourneyron, médecin, qui fut ministre des Sports dans le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, le rappelle brutalement : « on compte en France chaque année 50 000 décès liés à l’inactivité physique ». La sédentarité constitue un « tsunami sanitaire » aux conséquences dévastatrices : « maladies chroniques, cancers, dépressions, maladies cardio-vasculaires ». Chaque année, on enregistre 2 millions de chutes chez les personnes de plus de 65 ans, dont 150 000 sont hospitalisées. Dans le monde professionnel, ajoute-t-elle, « les gens restent assis 12 heures par jour les fesses sur la chaise. Comme on dit en anglais, ‘sitting is the new smoking’» [rester assis, c’est comme fumer]. L’ancienne ministre compare cette crise sanitaire au réchauffement climatique, dans le sens où, même si nous sommes parfaitement informés, nous peinons à agir.

Justement, « nous avons tous un traitement, sans effet secondaire, entre les mains : l’activité physique ». Certes, poursuit celle qui fut aussi maire (PS) de Rouen, « nous savons tous que l’activité physique, c’est bon pour la santé. Mais peu d’entre nous sommes conscients du danger de ne pas en faire ». Et il ne suffit pas de faire du sport le week-end, car ce serait comme dire à un enfant : « si tu ne te laves pas les dents du lundi au samedi, tu n’as qu’à te les brosser sept fois le dimanche ». Pour les professionnels du sport, cet avertissement sonne comme un programme d’investissement.