Le parquet demande un procès contre l'ex-patron de la DGSE pour complicité de tentative d'extorsion

Le parquet de Bobigny a requis jeudi le renvoi devant le tribunal correctionnel de Bernard Bajolet, ex-patron de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), pour complicité de tentative d'extorsion envers un homme d'affaires en 2016...

Le directeur général des services secrets de la DGSE, Bernard Bajolet, quitte l'Elysée à Paris après une réunion interministérielle, à Paris le 7 janvier 2015 © PATRICK KOVARIK
Le directeur général des services secrets de la DGSE, Bernard Bajolet, quitte l'Elysée à Paris après une réunion interministérielle, à Paris le 7 janvier 2015 © PATRICK KOVARIK

Le parquet de Bobigny a requis jeudi le renvoi devant le tribunal correctionnel de Bernard Bajolet, ex-patron de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), pour complicité de tentative d'extorsion envers un homme d'affaires en 2016, a appris mardi l'AFP auprès du ministère public.

L'homme d'affaires Alain Duménil accuse le service de renseignement d'avoir fait usage de la contrainte pour lui réclamer de l'argent en 2016. Le parquet a également demandé que Bernard Bajolet soit jugé pour atteinte arbitraire à la liberté individuelle par personne dépositaire de l'autorité publique.

A la tête des services de renseignement extérieur français d'avril 2013 à mai 2017 avant de prendre sa retraite, Bernard Bajolet avait été mis en examen en octobre 2022 par une juge d'instruction de Bobigny. 

Il avait contesté sa mise en examen devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris mais celle-ci a rejeté sa demande d'annulation en octobre 2023.

En mars 2016, Alain Duménil, Franco-Suisse impliqué dans une pléthore d'affaires judiciaires et de litiges commerciaux, s'apprête à embarquer pour Genève à l'aéroport de Roissy. Au guichet d'Air France, il est contrôlé par deux fonctionnaires de la police aux frontières qui l'invitent à les suivre au poste de police.   

Dans le local, il se retrouve face à deux agents de la DGSE en civil. Se présentant comme "l'État", ils expliquent qu'il doit rembourser 15 millions d'euros à la France. Pour appuyer leur requête, ils lui montrent des photos de lui et de sa famille, prises en Angleterre et en Suisse. 

D'après Alain Duménil, ils auraient proféré des menaces.

L'homme d'affaires s'emporte et annonce porter plainte. Les agents disparaissent. Protégés par le secret défense, leurs noms n'ont pas été révélés. 

Lors de son interrogatoire devant la juge, Bernard Bajolet a expliqué qu'il avait seulement validé le principe d'une entrevue à l'aéroport mais n'était pas rentré dans les détails de sa mise en œuvre. D'après lui, l'objectif était une prise de contact courte et sans contrainte.

Alain Duménil est une bête noire de la DGSE depuis un litige qui remonte à plus de deux décennies.

Depuis la fin de la Première guerre mondiale, la DGSE gère un "patrimoine privé" confié par l'Etat. 

À la fin des années 1990, elle réalise des investissements infructueux dans une société. Une décennie plus tard, dans un échange de titres, Alain Duménil devient majoritaire dans cette société et cède à la DGSE des parts de sa holding. Il transfère par la suite l'intégralité des parts de la holding détenues par la DGSE dans trois autres sociétés qu'il détenait également. La holding est mise en liquidation judiciaire.

Dans la procédure judiciaire qui en découle, l'homme d'affaires a été mis en examen pour banqueroute.

La DGSE estime qu'Alain Duménil leur doit 15 millions d'euros, dont trois d'intérêts.

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