Le long train-train de SNCF réseau

De l'ambition sans moyens nouveaux dans le bouleversement du marché de la mobilité : un an après sa nomination au poste de directeur régional, Franck Meyer a dressé un premier bilan de SNCF réseau (ex-RFF) dans la grande Région. Si des investissements sont toujours programmés, l'ampleur des rénovations nécessaires au réseau ferré du Nord - Pas-de-Calais se mesure en décennies. Compte rendu.

« Travaux sur les lignes du Pas-de-Calais en 2015 et 2016 ».
« Travaux sur les lignes du Pas-de-Calais en 2015 et 2016 ».
CAPresse 2016

François Meyer, directeur régional de SNCF réseau.

2015 : c’était la première année de la réforme portant sur le regroupement de la SNCF et de RFF. Dans toutes les régions, les chantiers de réformes internes se sont multipliés. «Le gros de la fusion est fait, avec un EPCI de tête qui en coiffe trois autres. Un régulateur − l’AREF qui fixe les prix − veille au bon fonctionnement de l’ensemble. Nous avons trois enjeux pour les années qui viennent : la sécurité. Même si le ferroviaire reste le moyen de transport le plus sûr, il est arrivé plusieurs accidents ces dernières années», explique le directeur régional. Seconde problématique, la mobilité : à l’heure où les bus «Macron» se développent très rapidement, le rail doit réagir. «Les zones de mobilité changent. Certaines lignes sont bien remplies ; d’autres, beaucoup moins. Les habitudes changent aussi : il y a les bus aujourd’hui. Cette concurrence peut faire varier la pertinence de certaines lignes», explique François Meyer. Plus généralement, SNCF réseau se questionne : «vend-on du rail et du ballast, ou de la mobilité ? Il vaut mieux un gâteau plus grand avec plus d’acteurs qu’un plus petit», sourit-il. Quid des parts ? Des prix à l’heure où un aller-retour Lille-Lyon coûte 40 à 50 euros en bus et cinq fois plus en train ? La vitesse à tout prix ?

300 millions d’euros d’investissement en 2016Dans la région, la tâche est immense. «Il est clair que nous avons un retard énorme à rattraper. Entre les années 1980 et 2005, nous sommes passé de 1 000 à 500 km de voies renouvelées par an sur le réseau», pointe le cadre. Depuis cinq ans, le rythme annuel tend vers la moyenne des années 1980. Les chantiers sont conséquents : 1 500 en 2016 en France pour 4,9 milliards d’euros, dont 1,3 pour l’Ile-de-France. La région s’en sort avec environ 300 millions (190 pour le Nord − Pas-de-Calais et 112 pour la Picardie). Le fait d’être l’un des réseaux les plus étoffés (vu le passé industriel-fret de la région) n’a visiblement pas joué dans les arbitrages nationaux… Ces travaux concernent notamment la rénovation de la ligne TGV : «Elle a 20 ans, c’est l’âge. Cela nous mobilisera beaucoup dans les prochaines années, à commencer par 2016.» 10% de l’enveloppe régionale d’investissement y seront consacrés. En sus, on compte la réalisation de deux ponts-rails à Lens (derrière le stade Bollaert), également au programme. De plus, 57 aiguillages seront renouvelés cette année. Pour autant, la modernisation pointe des défauts à corriger. «On ne peut tout rénover. Nous n’en avons tout simplement pas les moyens», déclare sans ambages François Meyer. Cela conduira notamment à la «suspension de lignes dans l’Aisne en 2016. Il y aura d’autres choix douloureux à venir», ajoute-t-il.

Des contraintes financières fortes qui ralentissement l’action. Troisième priorité de la direction régionale, le développement. Qu’on peut qualifier de complexe et défensif : «Nos actions se font sur des ressources qui ont diminué, sauf dans les années 2011, 2012. Nous priorisons le renouvellement. Sur la LGV, le rail est usé, surtout la centrale. La ligne date de 1993. Nous finançons sur fonds propres sur dix ans.» Les contraintes budgétaires restent fortes pour une entreprise contrainte par des prix fixés et dotée d’un patrimoine (trop ?) important. SNCF réseau hérite de 3 milliards de pertes de RFF. Un long chemin encore.

Morgan RAILANE

 

CAPresse 2016

Travaux sur les lignes du Pas-de-Calais en 2015 et 2016.

Encadré :

Un réseau imposant

Le réseau de la SNCF dans la grande Région est impressionnant : ses 4 777 salariés sont à l’oeuvre directement ou indirectement sur 2 820 km de voies ferrées, dont 333 km de lignes à grande vitesse. Le réseau voit passer plus de 2 000 trains (fret et voyageurs). SNCF réseau gère 363 gares et près de 2 000 passages à niveau. L’ensemble des sites atteint le nombre de 685 répartis sur 1 380 hectares, 2 391 bâtiments (soit 392 000 m² de bâti hors gares). La grande Région bénéficie de 190 installations terminales embranchées et de liens fixes avec la Belgique et le Royaume-Uni.