Le livre du jour
Manhattan Beach
Découverte avec Qu’avons-nous fait de nos rêves ?, prix Pulitzer 2011, Jennifer Egan signe ici une fresque ambitieuse où se dessine en creux le portrait ambivalent des États-Unis et de sa place dans le monde. Le titre du livre évoque un secteur côtier de Brooklyn où se rend Eddie Kerrigan, accompagnée de sa fille Anna, pour un rendez-vous professionnel avec un certain Dexter Styles, l’homme qui règne sur les bookmakers de la ville. Même si elle n’a que douze ans, Anna capte alors le mystérieux lien qui unit les deux hommes… Quelques années plus tard, après la disparition de son père, elle travaille au chantier naval de Brooklyn – où les femmes effectuent des tâches réservées aux hommes désormais au front –, ambitionne de devenir scaphandrier et subvient aux besoins de sa mère et de sa sœur Lydia, handicapée. Mais surtout, Anna aimerait découvrir si son père est mort ou s’est enfui et, lorsqu’elle croise Dexter Styles dans une boîte de nuit, elle pressent qu’il pourrait avoir les réponses à ses interrogations… Portés par une écriture au classicisme élégant et la virtuosité de la construction, ce roman passionnant peint le destin singulier d’une femme au cœur des communautés du New York des années 1930 et 1940, dessinant les lignes de force d’une quête intime émouvante parfaitement agencée entre chronique sociale et roman d’aventures. Un magnifique portrait de femme libre enfin qui, entre terre et mer, survit en eaux troubles, résiste aux vents contraires, navigue à contre-courant avant de s’accomplir.
Manhattan Beach de Jennifer Egan (Editions Robert Laffont – Traduit de l’anglais (États-Unis) par Aline Weill).