Le festival de l'initiative fait découvrir l'entreprise aux jeunes
Depuis neuf ans, Entreprendre Pour Apprendre organise un événement qui rassemble les jeunes et leur montre ce qu'est l'entrepreneuriat...
Mardi, collège Saint Thomas de Roncq. Une classe plongée dans l’obscurité. Des douzaines de sweat-shirts entassés sur des tables. Une petite dizaine d’élèves est en pleine répétition pour le grand jour. Les adolescents défilent par deux au tableau pour un exercice un peu particulier. Dans une semaine, ils seront à Lille Grand-Palais pour présenter leur projet d’entreprise. Un namedropping qui interpelle : «Jamel Debbouze, Mathieu Debuchy, Vincent Ledoux…» Tous ont vu le projet. Certains l’ont porté. Il s’agit d’un sweat-shirt à écouteurs intégrés.
Cinq adultes sont là, assistant à la répétition, powerpoint à l’appui. Enseignants ou entrepreneurs, ils distillent leurs derniers conseils pour que le 4 juin, tout soit prêt : «Insistez bien sur les événements que vous avez organisés. 150 personnes réunies à un défilé, vous m’avez vraiment bluffé. Ce serait dommage de ne pas en parler un peu plus. Le parcours de votre idée, votre aventure, tout est à détailler.» De vrais cours de prise de parole.
Les volets s’ouvrent, laissant passer la lumière, qui caresse les tissus gris, noirs, bleus des vêtements. De suite, la salle de classe s’active. Les jeunes hommes entassent les sweats dans les cartons. On pense à un stock. Ils sont d’ores et déjà vendus. Le seuil de rentabilité est dépassé. Objectif accompli.
«TEX a sorti le même produit alors que leur projet était en développement» déplore toutefois Thomas Bourghelle, directeur associé de CoJT conseil faisant partie de l’expérience pour la deuxième année. «Lorsque j’ai vu le spot publicitaire pour le produit, je n’en revenais pas.» La propriété intellectuelle n’est pas la même pour les mineurs. Lorsqu’on brigue le brevet des collèges, celui de l’INPI semble inaccessible. Pour simple exemple, le butter stick, un projet qui avait fait parler de lui l’an dernier, est désormais commercialisé par Auchan…
Volontaires. Les élèves sont présents sur la base du volontariat : il s’agit d’heures supplémentaires facultatives, ce qui fait que les acteurs de la mini-entreprise sont réellement motivés. «Ils sont pleins de ressources, d’idées. Ils s’adaptent très vite. Ils m’ont scotché à plusieurs reprises. Le défilé devant 150 personnes, avec l’écran, les fleurs, la sonorisation… J’étais vraiment bluffé.»
«Lorsqu’on arrive dans une classe, les élèves ont des idées reçues sur l’entrepreneuriat. Lorsqu’on leur parle de patrons, ils imaginent tout de suite des PDG d’entreprises du CAC 40, qui gagnent des millions sans rien faire et qui jouent au golf, relate Hervé Knecht, retraité d’Altereos, qui participe lui aussi au festival de l’initiative. Il faut vraiment qu’il y ait une éducation de ce côté. Les jeunes ont l’avenir entre leurs mains. Encore faut-ils qu’ils en aient conscience.»
En voyant les organigrammes et les graphiques présentés par les collégiens, on peut se dire que la méthode porte ses fruits. Au fil de l’année scolaire, les apprentis entrepreneurs ont «mis les mains dans le cambouis. Ils ont créé leur projet de toutes pièces», avance Thomas Bourghelle. «Ils ont tous fait d’énormes progrès. C’est vrai qu’au départ, les préjugés étaient énormes. Mais au fur et à mesure de l’avancement du projet, ils comprennent ce que c’est que de gérer une entreprise, et qu’entreprendre peut être un exercice difficile.»
Malgré tout, les idées développées en mini-entreprise au collège ne peuvent malheureusement pas devenir réalité. Travailler ensemble sur une idée d’entreprise peut effectivement être grisant. Mais les règles de la propriété intellectuelle sont sévères pour ces jeunes. Si certains de ceux qui sont passés par l’expérience d’EPA ont monté leur projet (une boulangerie, une association), il peut sembler décourageant de voir son projet dans les mains d’autres entrepreneurs. Là aussi, il s’agit d’entreprendre pour apprendre les lois du marché…