Le droit environnemental (encore) virtuel...

C'est une brochure bien inspirée qu'a publiée récemment la Fondation pour le droit continental, sur la base des travaux de sa commission environnement du Club des juristes. Un récapitulatif qui dresse un constat sans appel : inefficient !

a Une du rapport sur le droit international sur l'environnement
a Une du rapport sur le droit international sur l'environnement
CAPresse 2015

Le rapport sur le droit international sur l'environnement

Quelques semaines avant que commence la COP21, la Fondation pour le droit continental a fort justement contextualisé la rencontre des chefs d’Etat et de gouvernement réunis à Paris : le droit international sur les questions environnementales ne s’applique pas ou peu. Un “double échec” pour les 20 spécialistes de la commission. “Echec du processus d’élaboration : lenteur, voire paralysie des négociations diplomatiques qui sont commandées par les intérêts à court terme des Etats, et qui ne débouchent que très rarement sur des accords ambitieux et contraignants. Echec dans l’application : même lorsqu’un traité est finalement adopté, il n’est pas suivi d’effet en l’absence de mécanismes de contrôle et de sanctions efficaces“, lit-on dans l’avant-propos. Sans appel ? Le rapport met en exergue des portes de sorties qui peuvent oxygéner le débat et contraindre les acteurs publics légitimes à aller plus loin grâce au rôle de la société civile : “Pour rendre plus effectif le droit international de l’environnement, il faut que la société civile s’en empare.” Simple slogan ? Pas sûr. Le fait d’exposer les négociations, d’ouvrir (même trop peu) les portes aux ONG spécialisées, d’élargir le débat permet de tordre le cou à une habitude juridique : le fait que les traités sont signés entre nations et sur des périmètres restreints… De fait, “les individus n’ont rien à faire sur la scène internationale“, concluent les experts juristes.

Un droit qui devient opposable..Loin des instances où leur voix n’est (au mieux) que consultative, les membres de la “société internationale” naissante, selon le mot utilisé dans le rapport, n’ont souvent que la rue comme place d’expression. Qui n’est pas toujours efficiente… L’élaboration des traités se fait donc encore de manière peu transparente. Les applications ne donnent souvent lieu à aucune contrainte, qui plus est quand il n’y a pas d’instance judiciaire qui puisse s’en saisir et l’invoquer dans les cas de litige. Mieux encore : l’individu, le citoyen, ne peut opposer un traité à un autre État. Le citoyen doit s’en remettre totalement aux États qui ont “contractualisé“. Pour les juristes de la commission, “le juge national doit être le premier garant du respect par les États des traités environnementaux“. Or, la judiciarisation fait toujours peur aux exécutifs des démocraties libérales. Derrière ce constat, deux traditions juridiques sont en concurrence. L’anglo-saxonne privilégie le contrat sur la loi, l’intérêt individuel par rapport à l’intérêt général, l’agrément par rapport à la règle. De l’autre, le fameux droit romain en prend consubstantiellement le contre-pied. Et le rapport de relater une percée du droit romain avec une décision rendue le 24 juin dernier par le tribunal de La Haye “saisi par une ONG représentant plus de 900 citoyens, il a ordonné à l’État néerlandais de réduire les émissions de gaz à effet de serre d’au moins 25% d’ici à 2020 par rapport au niveau de 1990, en vue de se conformer à ses engagements internationaux” !

Morgan RAILANE