La situation économique régionale vue par CERFRANCE 59-62

Pour Grégory Denys, directeur général de CERFRANCE 59-62, le constat est simple : la situation économique n’est pas bonne. Malgré tout, il se veut rassurant et prône un discours volontariste. Il préfère donner des pistes de développement en attendant des jours meilleurs pour l’économie régionale.

Depuis le début de l’année 2013, le secteur du bâtiment et des travaux publics souffre. Le contexte électoral du début d’année 2014 et le manque de moyens des collectivités sont les principales causes des difficultés rencontrées par ce secteur économique.
Depuis le début de l’année 2013, le secteur du bâtiment et des travaux publics souffre. Le contexte électoral du début d’année 2014 et le manque de moyens des collectivités sont les principales causes des difficultés rencontrées par ce secteur économique.
ACT'Presse

Depuis le début de l’année 2013, le secteur du bâtiment et des travaux publics souffre. Le contexte électoral du début d’année 2014 et le manque de moyens des collectivités sont les principales causes des difficultés rencontrées par ce secteur économique.

CERFRANCE, pour analyser la conjoncture économique, se base sur les trois indicateurs principaux que sont l’emploi, la création et les défaillances d’entreprise.

«Nous cherchons tout d’abord à savoir si l’économie crée ou non de l’emploi. C’est un indicateur assez fiable pour détecter les redémarrages d’activité, notamment dans l’intérim − les entreprises préfèrent passer par l’intérim avant le CDD ou le CDI. Et ce que l’on peut dire, c’est qu’actuellement, l’emploi intérim ne décolle pas.»
Dans le domaine des créations d’entreprise, «le chiffre brut a plutôt tendance à augmenter, ce qui peut sembler positif». Cependant, ce chiffre englobe également les créations sous le statut d’auto-entrepreneur qui représente plus de la moitié des 24 000 créations annuelles. «Sur les six premiers mois de l’année, le nombre de créations augmente plus par le nombre d’auto-entrepreneurs que par les créations dites traditionnelles qui sont plutôt à la baisse.»
Enfin, dernier indicatif qui lui est alarmant, les défaillances d’entreprise : «Le nombre des défaillances reste à la hausse. Si on le met en perspective de l’allongement des délais de paiement moyens des entreprises, cette hausse de défaillances pourrait ne pas encore être enrayée.» Or, une entreprise qui a du mal à payer ses fournisseurs à cause de problèmes de trésorerie met souvent ses fournisseurs en difficulté également.
Ces trois indicateurs ne sont pas au vert sur le premier semestre de l’année 2014. «Maintenant, si on fait une analyse sectorielle sur la région, je n’ai pas envie de parler de secteurs qui s’en sortent mieux que d’autres, mais plutôt de secteurs qui s’en sortent moins que d’autres.» Et Grégory Denys de poursuivre : «Là où c’est le plus dur actuellement, c’est dans le BTP.»
Plusieurs éléments s’ajoutent : le marché ne se développe pas, le nombre de mises en chantier et le nombre de demandes de construction sont à la baisse : «pas d’embellie à attendre avant la fin de l’année sur ce secteur”.  Parallèlement à cela, la commande publique n’est pas au rendez-vous, les arbitrages budgétaires conduisent les collectivités à ne pas entreprendre de travaux ou à repousser les décisions.
Autre secteur à la peine, le commerce non alimentaire : «Il s’agit d’achats qui sont reportables. Le secteur souffre parce que la consommation est au ralenti, le moral des Français est au plus bas et le chômage continue à augmenter.»
La majorité des secteurs souffrent, les trésoreries se dégradent : «On peut donc s’attendre à d’autres défaillances d’ici la fin de l’année.». Et si des entreprises sont en phase de croissance, le processus reste trop volatil et n’est donc pas suffisant pour créer de l’emploi et générer une croissance durable.
«Géographiquement, les chiffres sont très hétérogènes et globalement le Pas-de-Calais souffre plus que le Nord.» Le poumon économique qu’est Lille attire beaucoup plus de projets que le reste de la région.

Des indicateurs à suivre. Partant de ces constats, il est compliqué de se projeter en 2015 et Grégory Denys préfère suivre certains indicateurs pour détecter au bon moment les signes d’une reprise de la croissance : «Pour une entreprise ou l’économie, la croissance est la résultante de plusieurs éléments : la consommation des ménages, l’investissement des entreprises et l’export.»

Dans le domaine de la consommation des ménages, la baisse du taux du livret A à 1% prouve qu’il y a «bien une volonté du gouvernement de ne plus être dans une logique d’épargne, mais bien dans une logique de consommation. Pour relancer la consommation, il faut réduire le chômage, tout en augmentant le pouvoir d’achat».
Concernant l’investissement des entreprises, «je dirais que c’est plus le climat des affaires qui est à suivre. Quel est le moral des chefs d’entreprise en France tout d’abord, mais aussi aux Etats-Unis, toujours en avance économiquement parlant». Et «tous les indicateurs laissent à penser que les Etats-Unis devraient rebondir d’ici à la fin de l’année, ce qui est très intéressant pour nous». Notre région étant limitrophe avec la Belgique, il convient également de prêter attention à ce qui se passe chez nos voisins et, pourquoi pas, aller y chercher des marchés. Sur la zone euro, c’est assez hétérogène. On connaît les performances «parfois assez insolentes de l’Allemagne», l’Espagne qui revient de loin. Par contre, pour «la France et l’Italie ce n’est pas très bon».
Reste le souci de l’export et la parité euro/dollar. «L’euro est trop fort, ou le dollar pas assez, ce qui pénalise les exports de produits français.» Sans oublier l’embargo russe sur l’agroalimentaire qui peut largement déstabiliser la filière agricole régionale.
Tous ces éléments sont donc très volatils et hétérogènes et ne permettent pas de dresser une véritable feuille de route de l’évolution de la situation pour 2015.

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Grégory Denys directeur général de CERFRANCE 59-62 : si la situation économique régionale est difficile, il donne quelques indications qui laissent à penser que celle-ci peut évoluer positivement.

Des raisons d’espérer. Les Français adoptent de plus en plus de nouvelles habitudes de consommation et l’économie de la fonctionnalité, le service à la personne s’en sortent mieux que d’autres secteurs d’activité. «Il s’agit de secteurs qui innovent et qui émergent actuellement. Ils ne sont malheureusement pas forcément tous générateurs de beaucoup d’emplois.»
En parallèle, «sans parler de politique puisque ce n’est pas notre métier, les pouvoirs publics mènent des actions visant à relancer la croissance et la consommation : la baisse des charges, le CICE, le pacte de responsabilité… Il y a toute une série d’actions nationales, voire européennes, qui visent à améliorer le pouvoir d’achat et la capacité d’investissement des entreprises».
A l’échelle régionale, il existe quelques opportunités : «Le canal Seine-Nord Europe, même s’il s’apparente à un serpent de mer, est potentiellement une source d’activité économique à saisir, notamment dans sa construction.» De même, le plan de rénovation énergétique «100 000 logements»  ( “le renouvellement des compteurs électriques sont autant de grands projets auxquels il faut être attentifs”) ou la troisième révolution industrielle engagée par la Région et qui rassemble l’ensemble des acteurs économiques. Et puis, «en région, nous avons toute une série de pôles de compétitivité qui sont dynamiques et qui génèrent de la valeur et de l’innovation» : il est important pour les entreprises de pouvoir s’adosser à ces centres de recherches.
Enfin, il existe une embellie à venir quant à la reprise d’entreprise, un secteur encourageant : «Un quart des 130 000 entreprises régionales seront à transmettre dans les cinq ans à venir. Parmi elles, certaines marchent très bien, traversent la crise sans souci, sont résiliantes, avec des emplois stables et des marchés stables.»
Dernier constat : «2013 a été une année bien plus catastrophique que 2014, même si cette année reste une mauvaise année par rapport à des années fastes de référence», conclut Grégory Denys.