Outils et services à l’entreprise

La santé en entreprise autrement

La pandémie et son après ont accéléré l’éclosion de nouveaux outils de prévention et de promotion de la santé en entreprise qui s’invitent aux côtés de la réduction des risques : un changement majeur de paradigme s’opère.

Phénomène de notre temps : un salarié sur deux se dit en «détresse psychologique». © D.R.
Phénomène de notre temps : un salarié sur deux se dit en «détresse psychologique». © D.R.

La santé des collaborateurs est devenue un enjeu majeur pour les entreprises, mais beaucoup d’entre elles ne parviennent pas à formuler une vraie stratégie claire en la matière. Si le 4e Plan Santé au Travail 2021-2025 présente des pistes intéressantes, il est parfois difficile à appréhender sur le terrain. Pourtant l’urgence est là. Les rapports annuels, comme les études dédiées au sujet, mettent l’accent sur un problème récurrent, véritable question sociétale. Selon les dernières données publiées en 2022 par l’Assurance maladie, le secteur privé dénombrait plus de 560 000 accidents du travail suivis d’un arrêt de travail, soit plus de 10 700 par semaine en moyenne. Parmi ces accidents, près de 35 000 ont laissé aux salariés des séquelles physiques jugées indemnisables. Les chiffres de 2023 qui seront publiés en janvier prochain seront, à plus d’un titre, des indicateurs précieux. Certains secteurs d’activité sont davantage sensibles aux accidents de travail. Dans le BTP, par exemple, le nombre d’accidents recensés pour 1 000 salariés est de 60. Les raisons principales : la manutention manuelle, l’outillage et les chutes. Une activité de plus en plus soumise aux risques d’accidents de travail est celle des services à la personne : 95,5 pour 1 000 salariés, soit + 45 % en dix ans. Pour l’employeur, santé signifie encore généralement hygiène et sécurité, réglementation, coûts supplémentaires, obligations et négociations avec les partenaires sociaux. Il est une réalité observée : les troubles musculo-squelettiques (TMS), c’est-à-dire les affections touchant les articulations, les muscles et les tendons représentent 90 % des maladies professionnelles. Parmi les plus courants, on retrouve le syndrome du canal carpien, le syndrome de la coiffe des rotateurs à l’épaule, l’épicondylite au coude et les lombalgies.

Les troubles de la santé mentale, maladies professionnelles

Les lombalgies, justement. Elles ne cessent de progresser. Depuis une décennie, on compte chaque année plus de 2 000 cas nouveaux. En 2021, 167 000 arrêts de travail pour lombalgies ont été actés. Un chiffre bien inquiétant quand on sait que la durée moyenne de l’arrêt maladie en cas de lombalgie est de deux mois. Causes du mal de dos : le port de charges lourdes, la manutention, les chutes, les postures. Mais elles peuvent être également d’ordre psychologique, comme le stress ou de mauvaises conditions de travail. Un salarié sur deux s’estimerait en détresse psychologique, tandis que le burn-out, les dépressions, les tentatives de suicide, les comportements addictifs augmentent. Le Premier ministre, Michel Barnier, a annoncé «la santé mentale grande cause nationale en 2025.» Les risques psycho-sociaux (RPS) sont de plus en plus reconnus comme facteurs d’accidents du travail. Angoisse, mauvaises relations, manque d’autonomie, intensité de charge de travail participent à l’altération de la santé, notamment de la santé mentale. Conséquence : de plus en plus d’entreprises en font un axe fort de leur stratégie et de leur marque employeur. Au point d’adopter un mouvement de paradigme fort : la responsabilité en matière de santé des salariés ne s’arrête pas à la porte de l’entreprise et doit s’élargir à l’environnement et aux comportements des salariés en dehors de leur temps d’activité professionnelle. L’accent est mis ces dernières années sur les dommages liés au stress et plus généralement sur la prévention des risques psycho-sociaux. On assiste à un infléchissement, en proposant une vision élargie des problématiques de santé, qui dépasse la prise en compte classique des dommages physiques dus aux accidents du travail. Cela entre dans le cadre d’une définition positive de la santé. Avec davantage de cohésion sociale, un climat de travail plus serein, des leviers pour améliorer l’investissement dans le travail, augmenter la qualité du recrutement, favoriser l’innovation des équipes. La santé devient ici un facteur de compétitivité. Aux maladies chroniques et risques cardio-vasculaires s’ajoutent les risques liés à l’exposition aux polluants dans l’air intérieur, l’alimentation ou le lieu de travail. L’entreprise a donc cette responsabilité d’investir ces champs et de proposer à ses salariés des actions de prévention de santé quant à ces enjeux. Motivation collective, recul de l’absentéisme, développement d’une culture d’entreprise en seront les premiers bénéfices.





Depuis une décennie, les cas de lombalgies ne cessent de progresser. © D.R.