La région en manque d’entreprises à reprendre
Alors que les créations d’entreprise battent leur plein, les reprises accusent un ralenti à cause d’un déséquilibre avéré entre l’offre et la demande. Franck Lamotte, directeur M&A Hauts-de-France auprès d’In Extenso Finance & Transmission, apporte quelques éléments d’éclairage sur ce constat.
Ce ne sont pas les repreneurs qui manquent mais bien les entreprises. En 2016, 54 entreprises régionales ont changé de main (contre 55 en 2015 – source CFNews). Un chiffre assez faible, même s’il est minoré car reposant sur du déclaratif, si on le compare aux 32 895 entreprises créées en 2016. Au niveau national1, sur 75 000 cessions par an, 15 000 concernent les artisans et commerçants ; 45 000, les TPE de moins de 10 salariés ; et 15 000, les PME et ETI. La probabilité de cession dépend davantage de la taille de l’effectif que de l’âge du dirigeant : pour les entreprises de 10 à 49 salariés, le taux de cession s’élève à 3,8%, à 7,5% pour les entreprises de 50 à 99 salariés, à 9,7% pour les entreprises de 100 à 249 salariés et 15% pour les groupes de plus de 250 salariés. Surtout, un repreneur a en général un bon bagage derrière lui et dispose de fonds personnels indispensables : 46% des repreneurs personnes physiques mettent entre 200 000 et 400 000 € sur la table. «Il est plus coûteux de reprendre une entreprise que d’en créer une, mais c’est aussi plus rassurant car le futur dirigeant reprend des clients et un savoir-faire», explique Franck Lamotte. Ce qui explique aussi le profil des repreneurs, souvent âgés entre 40 et 50 ans, disposant d’une expérience significative en entreprise. Sur les 70 repreneurs reçus ces derniers mois par In Extenso en Hauts-de-France, 41% se tournent vers l’industrie, 31% vers la distribution, 27% dans l’agroalimentaire et 6% dans le BTP. «En général, la recherche se limite à un périmètre d’une heure autour de Lille, il y a donc peu d’entreprises à revendre dans un périmètre restreint. Le phénomène n’est pas nouveau, les repreneurs ont des difficultés à trouver une cible. C’est frustrant pour eux comme pour nous. Certains repartent dans le salariat à contrecœur», détaille Franck Lamotte.
Faute de trouver un repreneur «personne physique», les cédants se tournent vers des personnes morales, non sans une certaine appréhension concernant les restructurations ou les licenciements, même si cela signe la garantie d’une reprise de l’entreprise à un meilleur prix. Lors de la cession, 54% des cédants vont privilégier la qualité du repreneur ; 41%, la pérennité ; 30%, un prix plus élevé ;et 23%, la préservation de l’emploi. S’il ne semble pas manquer de repreneurs, les cédants restent malgré tout frileux à l’idée de «laisser» leur entreprise : trois dirigeants disent vouloir céder, mais seulement un le fait réellement…
Mieux encourager la reprise ? «Il y a une méconnaissance du process de cession qui semble complexe. Les repreneurs peuvent être accompagnés. La fiscalité française est un frein, mais elle est favorable pour les cédants qui partent à la retraite, c’est même la plus favorable d’Europe (ndlr : abattements spécifiques , 500 000 € et 85%, réduction de l’impôt sur le revenu de 18% des sommes investies, exonération possible de l’impôt de la solidarité sur la fortune, exonération d’impôt de deux ans pour la reprise d’une entreprise industrielle en difficulté ou en zone de revitalisation rurale…)», poursuit Franck Lamotte, non sans souligner le manque d’aides propres à la reprise d’entreprise alors que celles à la création sont multiples. Il faut savoir qu’une cession engage en moyenne 27 emplois pour une PME et deux salariés pour une TPE.
- Source Observatoire BPCE – cession transmission.