La fiabilisation des comptes publics locaux

Claire Gaspar.
Claire Gaspar.
D.R.

Claire Gaspar.

Entretien avec Claire Gaspar, Inspectrice principale, adjointe à la division chargée des collectivités locales à la Direction régionale des finances publiques (DRFiP) du Nord-Pas-de-Calais – Picardie et du département du Nord.
La qualité des comptes publics locaux n’est pas un sujet nouveau. Pourquoi vous semble t-il toujours aussi prégnant ?
L’amélioration de la qualité des comptes publics locaux est effectivement l’un des chantiers menés depuis une dizaine d’années par la Direction Générale des Finances Publiques (DGFiP), en liaison avec les décideurs du secteur public local. L’objectif est, comme pour tout système d’information financière et comptable qu’il soit public ou privé, de fournir aux différents partenaires une information fiable. L’article 47-2 de la Constitution prévoit ainsi que “les comptes des administrations publiques sont réguliers et sincères. Ils donnent une image fidèle du résultat de leur gestion, de leur patrimoine et de leur situation financière.” Cette exigence de qualité participe d’une amélioration de la transparence de l’information à destination des partenaires des collectivités et des citoyens. Elle contribue également au renforcement de la performance de la gestion des collectivités en permettant aux élus de fonder leurs décisions, notamment en matière d’investissement, sur des informations solides et précises (coûts des services publics, niveau d’endettement, capacité d’autofinancement…). La production d’une information financière fiable revêt une importance particulière face aux mutations économiques actuelles et dans un contexte de restructurations des collectivités, au titre de l’intercommunalité- dissolution de syndicats, transferts de compétences… -, des suppressions de CCAS dans les communes de moins de 1 500 habitants ou des créations de communes nouvelles par exemple… Pour réaliser au mieux ces opérations, qui intègrent souvent des transferts de biens immobiliers entre collectivités, une bonne connaissance du patrimoine des collectivités et plus globalement de la qualité comptable sont nécessaires. La tenue d’inventaires physiques est cruciale dans ce cas. En outre, le chantier de fiabilisation des comptes s’inscrit dans une trajectoire non encore achevée.
Qualité comptable, fiabilisation des comptes, certification, pouvez-vous nous en dire plus sur cette “trajectoire” visant à l’amélioration de la qualité comptable ?
L’amélioration de la qualité comptable est l’objectif général recherché, la fiabilisation et la certification des comptes des moyens pour l’atteindre. Des efforts importants ont d’ores et déjà été réalisés afin de produire dans des délais rapides des comptes de qualité. Il s’agit par d’exemple de travaux menés en partenariat entre ordonnateurs et comptables pour arrêter les comptes annuels en anticipant les opérations de fin de gestion ou d’opérations dites de “haut de bilan”. Pour autant, les juridictions financières et les commissaires aux comptes intervenant dans la certification des comptes des établissements publics de santé et de certains établissements publics nationaux ont identifié des points d’attention dans le secteur public portant sur le rattachement des charges et produits à l’exercice, les amortissements et provisions ainsi que le suivi de la gestion patrimoniale. Mais, la qualité comptable dépend également de la qualité du dispositif de contrôle interne et du système d’information financière.
Et concrètement ?
Les comptables publics de la DGFIP, en leur qualité de teneurs de comptes mais également de conseillers aux décideurs publics locaux, sont les partenaires privilégiés des collectivités et participent pleinement à l’atteinte de l’objectif de transparence et d’efficacité de la gestion locale. La fiabilisation des comptes publics locaux repose sur un travail partenarial entre ordonnateurs et comptables. Qu’il s’agisse en effet de rattacher les charges et produits à l’exercice comptable concerné, de connaître exhaustivement le patrimoine de la collectivité ou de constater des amortissements et des provisions, chacune de ces actions nécessitera un travail préalable chez l’ordonnateur et une transcription comptable chez le comptable avec des rapprochements et des ajustements réguliers. Une approche pragmatique est à privilégier. Après un diagnostic partagé de la situation et des marges de progrès, les collectivités peuvent conclure avec leur comptable des conventions de partenariatformalisant leurs engagements réciproques notamment dans l’objectif d’améliorer la lisibilité des comptes et la qualité de l’information et des restitutions comptables. Des actions concrètes dont la réalisation est mesurable sont fixées dans ces conventions : par exemple l’élaboration d’un calendrier de fin d’exercice, un plan d’action sur l’inventaire ou la définition d’une politique de provisionnement. Les comptables disposent d’un indicateur de qualité comptable permettant d’identifier les marges de progrès. Le Comité national relatif à la fiabilité des comptes publics locaux met à disposition des ordonnateurs et des comptables une boîte à outils1.
Vous évoquiez la certification des comptes des établissements publics de santé, qu’en est-il des autres collectivités locales ?
Les choses évoluent également rapidement sur ce sujet. Une expérimentation en matière de certification des comptes publics locaux vient d’être lancée en application de l’article 110 de la loi NOTRE du 7 août 2015. Fondée sur le volontariat des collectivités, elle comportera deux phases : une phase d’accompagnement des collectivités par les juridictions financières dans une démarche progressive d’évaluation de la fiabilité de leurs états financiers entre 2017 et 2019, suivie d’une phase de certification préparatoire. Plusieurs collectivités du département du Nord ont candidaté à cette expérimentation.