La démographie française se rapproche de celle de ses voisins

Le « bilan démographique » de la France, publié par l’Insee au moment de lancer la campagne du recensement pour 2025, montre une baisse de la natalité, le maintien de la mortalité à un niveau élevé et une espérance de vie record. Un tableau qui ressemble à celui de la plupart des pays européens.

(c) adobestock
(c) adobestock

Le paysage démographique de la France, avec quelques années de retard, finit par ressembler à celui de l’Allemagne, l’Espagne ou l’Italie : une natalité en berne, une population vieillissante, une espérance de vie élevée. Jusqu’aux années 2010, la France se caractérisait par une forte natalité, exception en Europe. Le « bilan démographique » diffusé le 14 janvier par l’Insee, révèle une baisse des naissances de 2,2% entre 2023 et 2024. Cette inflexion est inférieure à celle de l’année précédente (-6,6%), mais dépasse la moyenne des années 2010-2022 (-1,3%). Si 663000 bébés sont nés en 2024, ils étaient plus de 800 000 au début des années 2010 et plus de 900 000 il y a 50 ans, alors que la France ne comptait que 52 millions d’habitants. La population française continue toutefois de croître, avec 68,6 millions d’habitants au 1er janvier 2025, a calculé l’Insee. Le solde naturel, différence entre le nombre de décès et de naissances, reste positif, mais c’est surtout le solde migratoire, différence entre le nombre d’entrées et de sorties, qui fournit l’essentiel de la croissance démographique. La France se classe ainsi comme deuxième pays plus peuplé de l’Union européenne, avec 15 millions d’habitants de moins que l’Allemagne et 10 millions de plus que l’Italie.

Le ralentissement français de la natalité avait inspiré au président Macron, en janvier 2024, le souhait d’un « réarmement démographique », qui n’a, pour autant que l’on puisse en juger, pas encore convaincu. La baisse de la natalité s’explique en effet par un tassement de l’indice de fécondité, davantage que par un moindre nombre de femmes en âge d’avoir des enfants. Alors qu’il atteignait un niveau de 2,02 enfants par femme en 2010, l’indice de fécondité est tombé à 1,62 en 2024, et même à 1,59 en France métropolitaine. Selon les statisticiens, « il faut remonter à la fin de la première guerre mondiale pour retrouver un indice aussi bas ». En 1919, on ne comptait que 1,59 enfant par femme, un taux qui était même descendu à 1,23 en 1916. « En 1993 et 1994, lors de son dernier point bas, l’indice de fécondité était plus élevé qu’en 2024, à 1,66 enfant par femme en France métropolitaine », précise l’Insee.

La mortalité infantile ne baisse plus

En face de la courbe des naissances, celle des décès se maintient à un niveau élevé. 646 000 personnes sont mortes en 2024, alors que la moyenne annuelle n’excédait pas 550 000 jusqu’en 2014. Cela s’explique évidemment par « l’arrivée à des âges de forte mortalité des générations nombreuses du baby-boom, nées de 1946 à 1974 », observe l’Insee. Les années 2023 et 2024 montrent toutefois un retour à la normale après la forte mortalité des années 2020 à 2022, conséquence de la pandémie de Covid.

Les statistiques font par ailleurs émerger une donnée inquiétante concernant la mortalité infantile. A 4,1 pour mille, le taux ne baisse plus depuis 2005 et se situe à un niveau nettement plus élevé que d’autres pays d’Europe, Finlande (2), Suède (2,2), Italie (2,3) ou Espagne (2,6), selon Eurostat. Un rapport du Sénat consacré à ce phénomène, publié en septembre dernier, souligne « une offre de soins de réanimation néonatale insuffisante et mal répartie » et déplore « un contexte de ressources humaines et de temps médical limités », entraînant des « difficultés à assurer la permanence des soins en obstétrique, pédiatrie et anesthésie ».

En dépit de ce contexte, l’espérance de vie se maintient en France « à un niveau historiquement élevé », souligne l’Insee. Elle atteint 85,6 ans pour les femmes et 80 ans pour les hommes. L’espérance de vie a ainsi retrouvé (pour les femmes) et dépassé (pour les hommes) le niveau pré-Covid. « Depuis le milieu des années 1990 », souligne l’Insee, « l’espérance de vie à la naissance croît moins vite pour les femmes que pour les hommes, réduisant ainsi l’écart entre les deux sexes ». Celui-ci est de 5,6 ans en 2024, contre 7,1 ans en 2004. Ces chiffres font de la France l’un des pays d’Europe où l’on vit le plus longtemps. Les records européens sont atteints en Espagne, pour les femmes (86,7 ans), et à Malte, pour les hommes (81,8 ans).

Dans une autre étude publiée le même jour, l’Insee s’intéresse aux enfants qui ne vivent qu’avec un seul de leurs deux parents. C’est le cas de 33% des mineurs, 23% vivant dans une famille monoparentale (dont 19% avec leur mère) et 10% dans une famille recomposée. Cette situation est plus fréquente dans les départements d’Outre-mer (47%) et dans les grands centres urbains hors Paris (28%). Sans que l’Insee établisse de lien avec la baisse du taux de natalité, l’étude observe que les enfants qui vivent avec leur seule mère sont confrontés à davantage de difficultés. Dans 34% des cas, la mère n’occupe pas d’emploi (contre 24%, lorsque les deux parents sont présents), tandis que 25% de ces familles monoparentales vivent dans un logement suroccupé (contre 11% pour les familles traditionnelles).