La culture du houblon, un choix de diversification

Dans l'est du département à Mesnil-Saint-Nicaise, Damien Depoers se lance dans la culture du houblon. Au pays de la pomme de terre et de la betterave, le jeune agriculteur a voulu se diversifier et a fait le choix de cette culture atypique. Grâce à l'essor des bières artisanales, cette diversification peut devenir mousseuse pour cet agriculteur qui s'est installé en mars 2023.

Damien Depoers utilisera un déchaumeur neuf et un tracteur de verger d’occasion pour cette nouvelle culture.
Damien Depoers utilisera un déchaumeur neuf et un tracteur de verger d’occasion pour cette nouvelle culture.

Depuis tout petit Damien Depoers n'a aucun doute, il sera agriculteur, comme son père et son grand père. Toutefois, ce jeune homme de 25 ans a souhaité se diversifier dans une culture peu connue dans notre région, conscient qu'il devait se diversifier, étant sur une toute petite exploitation de 38 hectares. Son père Albert avait lui aussi choisi une culture atypique puisque durant 25 ans il a cultivé du tabac. « Je ne voyais pas faire autre chose qu'être agriculteur », explique le jeune homme qui déjà tout petit était sur le tracteur. Le passionné de la terre a donc étudié au lycée agricole de Chauny, dans l'Aisne. Muni de son BTS, il a durant quelques temps été double actif en travaillant sur l'exploitation familiale et salarié chez un collègue voisin.

Une diversification à haute valeur ajoutée

« Mon père arrivait à l'âge de la retraite et je souhaitais reprendre l'activité à plein temps. Je cherchais à me diversifier vers une culture à forte valeur ajoutée. J'ai pensé tout d'abord au safran puis je me suis renseigné sur le houblon, explique Damien Depoers. Après six mois de réflexion, je suis allé en Alsace qui est la première région de France à cultiver cette plante grimpante. Je me suis inscrit à une formation mise en place par la chambre agricole. J'ai quitté mon travail de salarié et en mars 2023 j'ai repris la ferme familiale pour me lancer dans cette culture. La ferme est en conventionnelle, je cultive blé, betteraves, colza et les trois hectares de houblon sont en conversion bio depuis août 2023. C'est en septembre 2025, qu'il pourra être vendu en bio. En attendant il est en conversion. »

Damien Depoers a travaillé d’arrache pied pour installer l’houblonnière.

La mise de départ s'élève à 200 000 euros, comprenant un aménagement conséquent de la structure de l'houblonnière, subventionné pour l'achat de la structure et le matériel neuf à 50% par la Région et 10% par le Département. L'exploitant agricole a également acheté du matériel d'occasion tel qu'un tracteur de verger et une cueilleuse vendue par un houblonnier Alsacien.

Un travail d'installation conséquent

Huit mille plants de houblon de six variétés différentes sur une superficie de trois hectares ont été plantés en février, sachant qu'un pied a une durée de vie d'une quinzaine d'années. Mais avant la plantation, un travail d'installation conséquent a été réalisé. Le houblon étant une plante grimpante pérenne, les lianes peuvent atteindre plus de six mètres de hauteur... il a donc fallu installer une structure composée de poteaux en bois de plus de six mètres de hauteur ainsi que des câbles et des fils tuteurs afin de pouvoir attacher la plante grimpante. « Pour installer cette structure, nous y sommes depuis le mois d'octobre et en avril nous n'avions pas encore fini. La pluie ne nous a pas facilité la tâche », souligne Damien Depoers.

La première année, l'agriculteur pense récolter 500 kg de houblon pour obtenir en année de croisière une tonne à 1,2 tonne 200. À ce jour, le houblon cultivé en conventionnel est vendu 8 à 15 euros le kg selon les variétés. Cultivé en bio, il faut compter 30 euros le kg. Quant au travail qu'implique la culture de cette plante, en conventionnel, le temps estimé est de 300 heures de travail à l'hectare et de 500 heures de travail à l'hectare en culture bio car, notamment, le houblon craint le vent et les maladies telles que le mildiou et l'oïdium. Pour traiter ces maladies, Damien Depoers va utiliser le cuivre, le souffre et le savon noir, sans oublier le purin d'orties et les huiles essentielles. Il va également se servir des auxiliaires telles que les coccinelles pour lutter contre les pucerons.

Appel aux saisonniers

Pour travailler les trois hectares de plantation, l'agriculteur va faire appel à quelques saisonniers durant les périodes fortes. Fin avril début mai, cinq à huit salariés saisonniers sont embauchés pour la mise au fils. La manipulation consiste à aider le houblon à se mettre autour du fil. En juillet, viendra le moment de défaner sur un mètre de hauteur. Munis d'un gant de protection quatre à cinq personnes supprimeront les feuilles du houblon. Ensuite viendra la dernière étape, celle de la récolte, du triage et du séchage où environ quatre personnes seront sur ces tâches. Les cônes de houblon seront ensuite envoyés dans une coopérative dans les Flandres. Les lianes seront broyées et utilisées pour faire du compost et les déposer sur les chaumes de blé. « Il sera également possible de vendre du houblon frais directement à des brasseurs pour faire de la bière de récolte. Et dans quelques temps, je ne suis pas fermé à l'idée de faire de la bière », conclut le jeune agriculteur motivé, qui constate que le marché de la bière locale, houblon compris, a le vent en poupe et répond à de nouvelles attentes des consommateurs.

Les pieds de houblon ont été plantés durant une période ou la pluie était quasiment présente chaque jour.

L'Allemagne, terre du houblon

L’Allemagne cultive 17 000 hectares, ce qui représente 60% de la superficie consacrée à la culture du houblon dans l'Union européenne et un tiers de la superficie mondiale. Les autres principaux pays sont la Tchéquie, la Pologne et la Slovénie. Quant à la France, la quasi-totalité de la production de houblon est située en Alsace (94%) et dans les Flandres. Toutefois, le houblon sort depuis quelques temps de ces régions puisqu'il peut se cultiver partout en France.