Droit

L’entreprise et les salariés

Revue de récentes décisions de la Cour de cassation en matière de droit du travail.

© fizkes
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Contrats de travail

Lorsque, à l’issue d’un ou de plusieurs CDD, la relation de travail se poursuit par un CDI sur un même emploi, la durée de ces contrats s’impute sur la période d'essai éventuellement prévue dans le contrat de travail à durée indéterminée, peu important que les CDD aient été espacés de courtes périodes. (Cass. soc., 19 juin 2024, pourvoi n° 23-10783)

En cas de litige relatif à la validité d’une signature apposée sur un CDD, l’original du contrat doit être produit devant le juge. À défaut, le contrat est réputé non écrit et encourt la requalification en contrat à durée indéterminée. (Cass. soc., 12 juin 2024, pourvoi n° 22-20962)

Dès lors que la clause de non-concurrence prévoit la possibilité pour l’employeur de renoncer à cette clause par lettre recommandée avec avis de réception, dans un délai de 15 jours maximum après la notification de la rupture du contrat de travail, l’envoi d’un courriel ne peut pas avoir cette conséquence. (Cass. soc., 3 juillet 2024, pourvoi no 22-17452)

Accident du travail : preuve

La Cour de cassation juge désormais que, dans un procès civil, l’illicéité ou la déloyauté dans l’obtention ou la production d’un moyen de preuve ne conduit pas nécessairement à l’écarter des débats. Le juge doit, lorsque cela lui est demandé, apprécier si une telle preuve porte une atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble ; le droit à la preuve peut justifier la production d’éléments portant atteinte à d’autres droits, à condition que cette production soit indispensable à son exercice et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi. Cette solution a été retenue dans un contentieux en matière d’accident du travail.

En l’espèce, un salarié, molesté par le gérant de la société, lors d’une altercation, a produit en justice, entre autres documents, un procès-verbal d’huissier de justice retranscrivant un enregistrement effectué sur son téléphone portable lors des faits. L’employeur conteste l’existence de l’accident du travail, et estime que l’enregistrement audio réalisé à son insu a été obtenu de manière déloyale ; le salarié demande la reconnaissance de la faute inexcusable du gérant.

Pour la Cour de cassation, la cour d’appel a bien recherché, comme elle le devait, si l’utilisation de l’enregistrement de propos, réalisé à l’insu de leur auteur, portait atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit au respect de la vie privée du dirigeant et le droit à la preuve de la victime. Elle a pu déduire que la production de cette preuve était indispensable à l’exercice par la victime de son droit à voir reconnaître tant le caractère professionnel de l’accident résultant de cette altercation que la faute inexcusable de son employeur à l’origine de celle-ci, et que l’atteinte portée à la vie privée du dirigeant était strictement proportionnée au but poursuivi d’établir la réalité des violences subies par le salarié et contestées par l’employeur. (Cass. 2e civ, 6 juin 2024, pourvoi n° 22-11736)