L’entreprise et les salariés

Revue de récentes décisions de justice en matière de droit du travail.

(c) adobestock
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Contrat de travail

Le contrat à temps partiel est requalifié en contrat à temps plein en l’absence de mention relative à la répartition du temps de travail, dès lors que l’employeur ne démontre pas que la salariée n’était pas dans l’obligation de se tenir en permanence à sa disposition : l’argument tenant au fait qu’elle était étudiante ne saurait suffire. (Versailles, 2 décembre 2024, RG n° 22/00914).

Licenciements

Concurrence déloyale et faute grave. Une salariée à temps partiel responsable juridique dans un cabinet d’expertise comptable avait été licenciée pour faute grave après avoir créé une activité d’auto-entrepreneure en concurrence directe avec son employeur. Ce qu’il faut retenir : un salarié à temps partiel peut exercer une autre activité, mais celle-ci ne doit pas concurrencer son employeur.(Cass. Soc., 11 décembre 2024, n° 22-18362)

Dès lors que la clause de mobilité du contrat de travail, qui envisageait notamment une mobilité au sein des filiales, ne définissait pas de façon précise sa zone géographique d’application et était donc nulle, la cour d’appel ne pouvait pas apprécier le caractère sérieux du licenciement en faisant application de cette clause. (Cass. soc., 18 décembre 2024, pourvoi n° 23-13531)

Convention de rupture et transaction. La fraude ou le vice du consentement par violence, dol ou erreur peuvent entraîner l’annulation d’une convention de rupture, qui produit alors à l’égard du salarié les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Un salarié et un employeur ayant signé une rupture conventionnelle homologuée peuvent valablement conclure une transaction dès lors, d’une part, que celle-ci intervient postérieurement à l’homologation de la rupture conventionnelle par l’autorité administrative et, d’autre part, qu’elle a pour objet de régler un différend relatif non pas à la rupture du contrat de travail mais à son exécution, sur des éléments non compris dans la convention de rupture. Par conséquent, la concomitance de signature d’une rupture conventionnelle homologuée avec une transaction postdatée portant tant sur l’exécution que sur la rupture du contrat de travail entraîne la nullité de la transaction et de la rupture intervenue, laquelle a donc les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. (Paris, 26 septembre 2024, RG n° 22/09021).

Sanctions

Des SMS envoyés par un salarié depuis un téléphone portable professionnel et dont le contenu est en rapport avec son activité professionnelle ne revêtent pas de caractère privé et peuvent être pris en compte par l’employeur pour justifier une sanction disciplinaire. (Cass. soc., 11 décembre 2024, pourvoi n° 23-20.716)

Rémunération

Erreur de versement : le temps joue contre l’employeur. L’employeur peut-il stopper le paiement d’une prime versée à tort pendant des années ? La Cour de cassation vient de rappeler qu’après 20 ans de versements réguliers, l’erreur de l’employeur ne peut plus être invoquée : la prime devient un élément de rémunération, impossible à supprimer unilatéralement. (Cass. soc., 4 décembre 2024, n° 23-19528).

Une clause du contrat de travail peut prévoir une variation de la rémunération du salarié dès lors qu’elle est fondée sur des éléments objectifs indépendants de la volonté de l’employeur, ne fait pas porter le risque d’entreprise sur le salarié et n’a pas pour effet de réduire la rémunération en-dessous des minima légaux et conventionnels. (Cass. soc., 18 décembre 2024, pourvoi n° 23-12995)

Santé au travail

Dès lors que le salarié informe son employeur de son classement en invalidité de deuxième catégorie, sans manifester la volonté de ne pas reprendre le travail, il appartient à celui-ci de prendre l’initiative de faire procéder à une visite de reprise, laquelle met fin à la suspension du contrat de travail. (Cass. soc., 18 décembre 2024, pourvoi n° 23-16280)

François TAQUET, avocat,

spécialiste en droit du travail et protection sociale