L’Institut Pasteur de Lille, l’excellence au service de la science

Récemment nommé à la présidence de l’Institut Pasteur de Lille – depuis le 1er juillet – le professeur Patrick Berche supervise ce site exemplaire qui, depuis toujours, est reconnu pour son excellence dans six grands domaines de recherche : cancer, maladies cardiovasculaires, neurodégénératives, métaboliques, infectieuses et parasitaires, et enfin, inflammatoires chroniques.

Un équipement de pointe à disposition de la communauté scientifique.
Un équipement de pointe à disposition de la communauté scientifique.

La Gazette. Vous quittez Paris pour arriver dans le Nord mais la région ne vous est pas inconnue… Quel est votre parcours ?

Patrick Berche, des années d’expérience et un retour aux sources dans sa région natale.

Patrick Berche, des années d’expérience et un retour aux sources dans sa région natale.

Professeur Patrick Berche. Je suis professeur à la faculté Paris-Descartes depuis plusieurs années, et depuis 14 ans j’en étais le doyen. Par ailleurs, je suis chef de service de microbiologie à l’hôpital Necker-Enfants malades et j’ai longtemps été directeur d’une unité de recherche INSERM à Necker. J’ai passé les 14 premières années de ma vie à Béthune, dont je suis natif. Mes parents ayant déménagé à Paris, j’y ai fait toute ma carrière. Cette nomination à l’Institut Pasteur de Lille, c’est un retour aux sources ! Cela me fait extrêmement plaisir de revenir dans la région. Surtout que le projet scientifique de l’Institut − de notoriété internationale indubitable − est excellent.

Est-ce que l’Institut Pasteur de Lille jouit de cette notoriété depuis toujours ?

Depuis son origine et Albert Calmette, l’Institut Pasteur de Lille a toujours eu une notoriété internationale, notamment avec la découverte du BCG (Bacille Calmette Guérin), diffusé à partir de 1921 à l’hôpital de la Charité de Paris auprès de nouveau-nés. Je le rappelle, l’lnstitut a deux grandes activités : une pour le public, en phase avec ses origines −vu qu’il a été créé par une souscription publique et une aide de la municipalité – et l’autre concerne le centre de recherche. Depuis plusieurs décennies, la notoriété s’est accrue, notamment dans plusieurs domaines : les maladies infectieuses, cardio-vasculaires, le diabète, la maladie d’Alzheimer, le cancer… En fait, les grands problèmes de santé publique nationaux et régionaux.

Justement, dans une région très touchée par ces maladies, comment anticiper les risques ?

La clé ? Sans conteste, la prévention. En 1950, on comptait 200 centenaires. Actuellement, il y en a 23 000 et il y en aura 140 000 en 2040. Un jeune enfant sur deux, né aujourd’hui, sera centenaire ! Toute la problématique de notre Institut, c’est de permettre de vivre centenaire dans de bonnes conditions. Quand on regarde les chiffres, la France a une des espérances de vie les plus fortes avec l’Espagne et l’Italie, mais avec un nombre d’années en bonne santé moins bon qu’au Danemark . Si l’espérance de vie augmente chaque année, c’est grâce à la prévention. Prenons un exemple de prévention : l’Institut réalise 500 000 dépistages de cancer colorectal. Le Centre de prévention et d’éducation santé (CPES) s’occupe précisément de réaliser des bilans et des dépistages. Il reçoit 18 000 personnes par an grâce à un maillage régional en réseau avec les caisses primaires d’assurance maladie, réalise 40 000 vaccinations et 500 000 tests Hémocultt1. S’il est pris dès le départ, il n’y a aucune conséquence. Le stress, une mauvaise nutrition et d’autres facteurs physiologiques raccourcissent la vie. La région Nord-Pas-de-Calais, malheureusement, bat des records en termes d’obésité, de cancers et d’infections respiratoires. Nous payons le tribut de l’ère industrielle.

Comment inculquer de meilleurs comportements nutritionnels ?

L’Institut Pasteur de Lille dispose d’un pôle dédié et d’une recherche en nutrition à travers le diabète et l’obésité, sous la direction de Philippe Froguel qui recherche les gènes de susceptibilité de ces deux pathologies. Nous ne sommes malheureusement pas égaux au départ et certains chercheurs pensent que cela peut provenir de la flore intestinale. Si la flore est très active, elle détruit les lipides et les glucides, en absorbe moins et, donc, limite les facteurs de risque. Au sein du pôle nutrition, le centre d’études cliniques Nutrinvest s’occupe par exemple de la recherche autour des alicaments, qui contribuent à l’amélioration de la santé. Et nous avons aussi toute une batterie de formations depuis une trentaine d’années.

La région est connue pour son dynamisme entrepreneurial en santé. Travaillez-vous avec des start-up ou avec Eurasanté ?

Comme dans la tradition de Pasteur qui doit sa notoriété par son travail avec les brasseurs, nous sommes très accueillants pour les start-up2, notre seule exigence est qu’elles soient connectées avec une unité de recherche de l’Institut. Nous ne voulons pas être juste un incubateur. Des industriels régionaux collaborent aussi avec des équipes de recherche, par exemple en toxicologie pour tester certaines toxiques dans l’environnement.

Vous arrivez dans un contexte délicat où l’Institut Pasteur de Lille a connu la crise, des déficits et des licenciements. Votre mission sera, on le suppose, de lui redonner un nouveau souffle…

Nous avons un projet phare : le centre transdisciplinaire de recherche sur la longévité. Il rassemblera toutes les équipes de l’Institut Pasteur de Lille autour d’une problématique : permettre de vivre vieux et en bonne santé, comme je l’évoquais précédemment. Par une étude du génome du patient, nous allons étudier les facteurs de risque. Par exemple, en ce qui concerne la maladie d’Alzheimer, les chercheurs ont identifié un nombre de gènes susceptibles de s’associer plus facilement à la maladie. On met ensuite au point des bio-marqueurs et le Dr Benoît Deprez recherche des molécules qui pourraient inactiver un gène anormal. C’est un continuum. Nous allons donc construire ce centre de 7 000 m2 à proximité de l’Institut, avec un objectif d’ouverture en 2016-2017. On envisage aussi pour les maladies infectieuses de développer, dans le cadre du centre d’infectiologie, une recherche sur la résistance aux antibiotiques. Mais aussi de développer davantage la recherche sur le microbiome, plus connu sous le nom de flore intestinale. D’une façon générale, nous voulons renforcer les plates-formes et attirer les jeunes équipes. Nous allons donc certainement lancer des appels d’offres pour voir les champs sur lesquels nous pourrions miser.

Quelle est la santé financière de l’Institut Pasteur de Lille ?

Nous sommes à l’équilibre ! Nous pensons résorber nos dettes pour 2016. Nous avons une subvention récurrente de l’Etat en tant qu’établissement privé d’utilité publique, au même titre que l’Inserm, le CNRS, ou l’Institut Pasteur de Paris. La seule institution privée à but non lucratif, fondation d’utilité publique, c’est l’Institut Pasteur de Lille. Il n’y en a pas d’autres en France (le budget de l’Institut Pasteur de Lille est de l’ordre de 27 millions d’euros dont six provenant de subventions, ndlr).

 

  1. Utilisés dans le dépistage du cancer colorectal.
  2. Sont présentes sur le site lillois Genoscreen, Gènes diffusion, Innobiochips, Lunginnov et X’Prochem.

 Le BioImaging Center de Lille, un équipement d’excellence en imagerie cellulaire

Un équipement de pointe à disposition de la communauté scientifique.

Un équipement de pointe à disposition de la communauté scientifique.

Des équipes parisiennes viennent de publier une découverte marquante dans Nature Medicine du 1er juin 2014. Elle concerne une étape clé dans la compréhension du mécanisme pathogène de la bactérie responsable des méningites à méningocoque. Un pas décisif qui a pu être franchi grâce à l’utilisation de l’Equipex ImaginEx BioMed et de son plateau de microscopie à force atomique présent à l’Institut Pasteur de Lille. Mis à la disposition de la communauté scientifique et du secteur privé, cet outil d’excellence offre cinq plateaux de haute technologie (microscopies électronique, biophonique et à force atomique et cytométrique en flux). Au total : 21 millions d’euros d’équipement (dont 10 millions dans le cadre de l’Equipex) et 44 salariés répartis sur trois sites : la faculté de médecine, la faculté des sciences et l’Institut Pasteur de Lille. «Nous voulons soutenir les activités de recherche dans tous les domaines de la biologie-santé. Ces plateaux sont uniques au monde» ajoute Dr Franck Lafont, directeur de la plateforme d’imagerie ainsi que directeur de recherche au CNRS.