L’export, cet Eldorado encore trop difficile à atteindre pour les PME
C’est un grief
souvent reproché aux PME régionales : elles n’exporteraient pas assez.
Comparativement aux autres régions françaises, les Hauts-de-France sont à la
traîne, alors que les frontières sont toutes proches.
L’étude conjointe de l’Insee Hauts-de-France et de la
direction régionale de la Banque de France confirme la réticence des PME
régionales à se tourner vers l’international. Coûteuse et chronophage, la
démarche ne coule pas toujours de source pour des petites structures dénuées d’un
service dédié. L’étude de l’Insee se concentre sur des données de 2015 et la
Banque de France, sur la période 2013-2017 : depuis, il est à noter que la
Région Hauts-de-France et des organismes tels que bpiFrance ou la CCI régionale
ont initié de nombreux outils d’aide à l’exportation, notamment avec Team
France Export, voyant donc ces chiffres probablement réévalués. Même si les
deux études n’ont pas pris en compte les mêmes typologies d’entreprises ni la
même période – les PME de moins de 50 M€ de chiffre d’affaires pour l’Insee sur
la période 2015 et les PME dont le CA est supérieur à 750 000€ pour la Banque
de France, sur la période 2013-2017 –, le constat est similaire : la part des
PME exportatrices reste faible. 6,5% des PME régionales exportent (soit 10 800
entreprises ; 8 500 sont des indépendantes, 2 300 des groupes). Les PME des Hauts-de-France
se hisseraient donc à la 6e place après l’Île-de-France (9,3% des PME
exportatrices en France), Grand-Est (8,3%), Auvergne-Rhône-Alpes (7,4%),
Bourgogne-Franche-Comté (6,8%) et Provence-Alpes-Côte d’Azur (6,7%).
Sur l’échantillon de
16 800 PME (2015) étudié par la Banque de France, 4 600 exportent et 12 200
n’affichent aucun CA à l’international. Les groupes multinationaux, de par
leurs échanges entre filiales, sont davantage représentés. Que ce soit en
termes de chiffre d’affaires, de valeur ajoutée ou d’effectifs, la taille de
l’entreprise est un facteur clé à l’exportation : en Hauts-de-France, les PME
exportatrices affichent un CA moyen de 7,6 M€ (contre 7,2 M€ en Province) pour
un effectif d’une trentaine de salariés. « Il y a clairement une
sous-représentation des petites entreprises. Plus la structure est mature, plus
elle exporte », complète Kathie Werquin-Wattebled, directrice régionale à la
Banque de France. La tranche 10-49 salariés est la plus représentée avec une
part de 53%. 61% des PME exportatrices ont plus de 20 ans d’existence en 2018.
Un chiffre à rapprocher avec le secteur d’activité le plus exportateur en
région : l’industrie, avec 30,5% des exportations régionales sur l’échantillon
de la Banque de France – un taux proche de la moyenne nationale de 31,5% –,
suivie par les services (19%), le commerce (12%) et le bâtiment (6%). L’Insee
observe également que les groupes réalisent 63% de leur CA global à l’export
dans l’industrie contre 27% pour les indépendantes.
Une expérience
difficile à renouveler ?
Autre fait plus inquiétant que soulève la Banque de France,
en 2015, seuls 4 primo-exportateurs sur 10 ont exporté les deux années
suivantes… Les 6 abandons seraient-ils un signe d’un manque de rentabilité ou
d’accompagnement ? Mais surtout, les PME exportatrices régionales ont une
croissance moins dynamique que les non-exportatrices (+8% d’évolution du CA
pour les exportatrices, + 10% pour les PME non exportatrices). Des chiffres
plutôt surprenants – voire décourageants pour les sociétés désireuses de se
lancer ! – mais que l’on pourrait rapprocher aux besoins importants en fonds de
roulement, nécessaires au lancement d’une activité à l’exportation. « En
moyenne, une PME exportatrice régionale mobilise un mois de CA de plus qu’une
PME n’exporte pas. Cela nécessite davantage de stocks mais aussi de financer
des délais clients plus importants », détaille Kathie Werquin-Wattebled.
L’export serait donc déterminant pour trouver de nouveaux débouchés sans être
un gage de meilleure rentabilité. Tant au niveau régional que national, la part
d’entreprises dont le résultat courant avant impôt est déficitaire est
comparable à celle des entreprises non exportatrices.
La Belgique, premier
marché régional
Sans surprise, la Belgique est le premier pays vers lequel
les entreprises se tournent : les zones d’emploi de Roubaix-Tourcoing,
Flandre-Lys, Lille et Cambrai concentrent le plus d’établissements de PME
exportatrices (entre 9% et 12,2% contre 7,7% en moyenne régionale). Ces zones
sont d’ailleurs le plus souvent industrielles et on note une surreprésentation
dans la fabrication textile et l’habillement. Dans les zones d’emploi de
Beauvais, Château-Thierry et Roissy-Sud Picardie, seuls 6,2% des établissements
exportent, soit 1,5 point de moins que la moyenne régionale. Si cette étude a
le mérite de mettre en lumière la difficulté des PME régionales à exporter,
elle reste cependant à affiner depuis la mise en place des dispositifs
d’accompagnement à l’export : selon la Direccte Hauts-de-France, en avril
dernier, la région se plaçait à la 4e position des régions françaises sur le
plan des échanges commerciaux.