L’entreprise et les salariés

Clause de non-concurrence. La stipulation dans le contrat de travail d’une clause de non-concurrence nulle cause nécessairement un préjudice au salarié (cass. soc. 27 novembre 2013 – pourvoi n° 12-23740).
Pour débouter un salarié de sa demande d’indemnisation en réparation du préjudice résultant de l’illicéité de la clause de non-concurrence, les juges du fond, après avoir déclaré la nullité de cette clause du fait d’une contrepartie financière dérisoire, avaient retenu qu’elle n’avait pu recevoir exécution dans la mesure où l’intéressé n’avait pas commencé à travailler. La Haute Cour rejette cette décision.
Cadre dirigeant. Seuls les cadres participant à la direction de l’entreprise relèvent de la catégorie des cadres dirigeants (cass. soc. 26 novembre 2013 – pourvoi n° 12-21758 12-22200).
Les juges du fond avaient débouté un salarié de ses demandes de paiement d’heures supplémentaires, des congés payés afférents ainsi que d’indemnité compensatrice de repos compensateur : ayant une grande liberté dans son emploi du temps, un niveau très élevé de responsabilité, puisqu’il était habilité à prendre des décisions de façon largement autonome, et bénéficiant d’une des rémunérations les plus élevées de l’entreprise, il avait la qualité de cadre dirigeant.
Dans sa décision la Cour de cassation rappelle que sont considérés comme cadres dirigeants les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l’importance implique une grande indépendance dans l’organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement. Ces critères, qui sont cumulatifs, impliquent que seuls relèvent de cette catégorie les cadres participant à la direction de l’entreprise. Les juges du fond devaient vérifier que l’intéressé participait à la direction de l’entreprise.
Rupture de la promesse d’embauche. La prise de connaissance tardive par l’employeur de la condamnation du salarié, dans le passé, pour des faits de violence ne peut constituer en soi une cause de rupture de la promesse d’embauche (cass. soc. 20 novembre 2013 – pourvoi n° 12-23864).
Un organisme avise une personne, par courrier du 16 juin 2004, que sa candidature est retenue comme auxiliaire de protection de la forêt méditerranéenne sur le site de Cucuron (Vaucluse), pour un travail débutant le 30 juin suivant. Le 22 juin, il revient sur sa décision et signifie à l’intéressé qu’il ne donne pas suite à l’embauche. Le candidat saisit alors la juridiction prud’homale pour faire juger que le non-respect de la promesse d’embauche s’analyse en une rupture abusive d’un contrat de travail et obtenir des dommages-intérêts. Pour débouter le salarié de sa demande, les juges du fond ont retenu que l’employeur, informé du fait que le bénéficiaire de la promesse d’embauche avait, dans le passé, commis des faits de violence à l’encontre d’ouvriers de l’équipe du site sur lequel il travaillait, devait prendre des mesures préventives pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, de sorte qu’il avait légitimement rompu la promesse d’embauche. La Cour de cassation invalide cette décision.
Reprise d’activité. Si la simple perte d’un marché n’entre pas dans le champ d’application de l’article L. 1224-1 du code du travail, celui-ci s’applique en cas de transfert d’une entité économique autonome qui poursuit un objectif propre (cass. soc. 27 novembre 2013 – pourvoi n° 12-19071).
Dans le cadre d’une reprise d’activité se posait la question de reprise des salariés. Pour la Cour de cassation, si la simple perte d’un marché n’entre pas dans le champ d’application de l’article L. 1224-1 du code du travail, celui-ci s’applique en cas de transfert d’une entité économique autonome, soit un ensemble organisé de personnes et d’éléments corporels ou incorporels permettant l’exercice d’une activité économique qui poursuit un objectif propre. Or, en l’espèce, l’activité était toujours exploitée dans le même lieu, le contrat de location et d’entretien des téléviseurs avait été poursuivi avec la même clientèle, ce qui caractérisait le transfert d’une entité économique autonome conservant son identité. Peu importe que le nouveau concessionnaire ait décidé d’exploiter l’activité dans d’autres conditions.
Durée du travail. En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, le salarié doit étayer sa demande par des éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l’employeur de répondre en fournissant ses propres données (cass. soc. 27 novembre 2013 – pourvoi n° 12-21186).
Une responsable de salon de coiffure avait pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l’employeur, auquel elle reprochait notamment un manquement aux dispositions légales sur le temps de travail.
Pour rejeter sa demande en paiement d’heures supplémentaires, les juges du fond avaient retenu qu’elle n’apportait aucun élément précis sur le nombre des heures effectivement travaillées et qu’elle ne s’était pas manifestée pendant deux ans, ce qui semblait signifier qu’elle était en accord avec son employeur sur cette façon de fonctionner.
Pour la Cour de cassation, le juge ne peut rejeter une demande en paiement d’heures supplémentaires aux motifs que les éléments produits par le salarié pour l’étayer ne prouvent pas le bien-fondé de celle-ci, et, d’autre part, que l’absence de réclamation ne vaut pas renonciation à se prévaloir d’un droit.