L'Assemblée nationale près de clore la page budgétaire, mais pour quoi faire ?
Les députés s'apprêtent à rejeter mercredi une dernière motion de censure sur le budget de la Sécurité sociale, un vote décisif avant de clore la page budgétaire 2025, et un nouveau succès à l'actif de François Bayrou...
![Une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale, à Paris, le 11 février 2025 © Thibaud MORITZ](/thumbs/1368×1026/articles/2025/02/36XM8GR.jpg)
Les députés s'apprêtent à rejeter mercredi une dernière motion de censure sur le budget de la Sécurité sociale, un vote décisif avant de clore la page budgétaire 2025, et un nouveau succès à l'actif de François Bayrou, dans une Assemblée toujours guettée par la paralysie.
Quatre mois après la présentation du budget en Conseil des ministres, une petite semaine après l'adoption définitive du budget de l'Etat, le rejet attendu de la motion de censure déposée par LFI permettra l'adoption en nouvelle lecture du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), celui-là même qui avait fait chuter Michel Barnier en décembre.
Comme lors des trois précédentes motions de censure sur le projet de loi de finances (PLF) et le PLFSS, le PS ne prévoit pas de joindre ses voix à celles des Insoumis, invoquant la nécessité de doter la France d'un budget, même si celui-ci n'est "pas juste". Le RN ne devrait pas non plus censurer le texte.
Le Sénat s'en saisira à son tour en séance lundi et mardi prochain, avec comme objectif pour le gouvernement une adoption conforme qui vaudrait adoption définitive du texte. Dans le cas contraire, le PLFSS devrait revenir à l'Assemblée pour une ultime lecture.
Tâche immense
Passé à la moulinette de la censure, et des concessions accordées aux oppositions mais aussi à la majorité, le budget de la Sécu prévoit désormais une hausse des dépenses d'Assurance maladie de 3,3% en 2025, contre 2,6% initialement prévu, notamment parce que le gouvernement Bayrou a rallongé d'un milliard d'euros l'enveloppe de l'hôpital.
Le déficit devrait lui s'élever à plus de 22 milliards d'euros, au lieu de 16 milliards. Le gouvernement a dû renoncer à une hausse des tickets modérateurs (reste à charge du patient après le remboursement de l'assurance maladie), accepter de revoir à la baisse les efforts demandés aux entreprises concernant les exonérations de cotisations sociales, et faire le deuil de la désindexation des retraites sur l'inflation.
L'idée d'une journée de solidarité, ou de l'instauration de sept heures de travail annuelles supplémentaires non rémunérées, n'a pas non plus fait florès, après avoir été adoptée au Sénat.
Un budget qui in fine ne satisfait personne, ce qui a fait dire au Premier ministre lundi qu'il faudrait "dès le lendemain de l'adoption des budgets" trouver les voies et moyens d'un "retour à l'équilibre", une "tâche immense" pour l'avenir.
Piège à retardement
Dans la majorité, pas plus que dans les oppositions, la clôture de cette longue période d'incertitudes ne devrait donner lieu à des marques de joie excessives.
A gauche, l'épisode a profondément divisé le Nouveau Front populaire, et laisse aux socialistes un goût amer, eux qui ont parfois "la mort dans l'âme" renoncé à la censure, et ont vu dès la semaine dernière le gouvernement recommencer à creuser un sillon bien à droite, que ce soit sur le droit du sol ou la justice des mineurs.
Le groupe PS déposera une motion de censure en début de semaine prochaine, pour protester contre la "trumpisation et la lepénisation des esprits".
Du côté du Rassemblement national, les cadres se félicitent d'avoir obtenu "des victoires" grâce à la censure, tout en appelant plus que jamais à un "changement de dirigeants".
Si le parti de Marine Le Pen donne le sentiment de ne pas vouloir censurer le gouvernement avant qu'une nouvelle dissolution ne soit possible, c'est-à-dire à partir de cet été, un changement de pied est toujours possible.
Et dans la majorité, si quelques-uns se félicitent de l'esprit de "responsabilité" dont a fait preuve le PS, beaucoup craignent que l'Assemblée ne soit très vite renvoyée à la paralysie à laquelle la condamnerait sa division en trois blocs.
"Chacun a bien compris que cette législature ne servirait strictement à rien", bougonne un cadre macroniste (Ensemble pour la République).
"Aujourd'hui, je ne vois pas quel texte structurant on peut mettre sur la table", abonde un député LR, qui ne voit à l'horizon ni "grande réforme des services publics", ni "grand texte sur l'immigration". Et qui craint à l'inverse que le fait d'avoir rouvert le débat sur les retraites ne soit un "piège à retardement".
36XM8GR