L'apprentissage ne connaît pas la crise

Prenez une réforme qui facilite la mise en relation avec les entreprises, ajoutez-y une prime gouvernementale qui minimise le reste à charge, complétez le tout avec une mobilisation exceptionnelle des centres de formation. Le résultat ? Une hausse des contrats d’alternance d’environ 20 % constatée dans plusieurs organismes de la région !

A la chambre des métiers des Hauts-de-France, on est passé, en un an, de 7 000 à 8 000 apprentis. © Aletheia Press/B. Dequevauviller
A la chambre des métiers des Hauts-de-France, on est passé, en un an, de 7 000 à 8 000 apprentis. © Aletheia Press/B. Dequevauviller

L’apprentissage est devenu une priorité gouvernementale. Quatre mesures majeures facilitant l’accès des jeunes à l’apprentissage ont été prises en juin 2020 : une aide à l’embauche de 5 000 euros pour les mineurs et jusqu’à 8 000 euros pour les majeurs, une prime de premier équipement d’ordinateur, la garantie d’accéder à une entreprise et l’allongement de la période de recherche d’une entreprise de 3 à 6 mois.

1 000 apprentis supplémentaires

Un an après, les résultats sont là. A la chambre des Métiers et de l’Artisanat des Hauts-de-France (CMA) qui gère 20 centres de formation, on reconnaît que les aides accordées ont beaucoup aidé. «On a, certes, beaucoup communiqué auprès des entreprises. Mais la prime gouvernementale, qui laisse un reste à charge de zéro à 150 euros par mois, a été incitative». A la chambre des métiers des Hauts-de-France, on est ainsi passé, en un an, de 7 000 à 8 000 apprentis.

«Dans le supérieur, la prime a été confirmée tardivement, remarque Jean Luc Caenen, responsable de l’ensemble des formations en apprentissage de l’IMT de Douai qui représente 600 apprentis ingénieurs. Cela a, cependant, conforté les entreprises qui avaient déjà embauché un apprenti et a permis de compléter le pool d’entreprises pour de nouveaux contrats.»

Réactivité et adaptabilité

Depuis mars 2020, les établissements, comme les apprentis et leurs entreprises, ont dû faire preuve d’une grande adaptabilité. Certains secteurs de l’artisanat, comme l’alimentaire, ont connu une forte hausse, avec une demande de la part des entreprises supérieure à l’offre. D’autres secteurs, comme la restauration ou l’hôtellerie, ont été très impactés. Les apprentis ont encore actuellement du mal à trouver des entreprises.

L’artisanat a dû faire preuve de souplesse puisque c’est par essence un secteur qui privilégie les apprentissages pratiques. Comment, par exemple, s’entraîner et pratiquer en cuisine ou coiffure en cas de fermeture ? «Pour la coiffure, souvent, la famille a pu servir de modèle ! Pour la restauration, ce sont les restaurants d’application qui sont restés ouverts pour les collaborateurs, avec le respect des gestes barrière», explique-t-on à la CMA. Les apprentis coiffeurs ont parfois dû donner un coup de main (ou de peigne) supplémentaire pour aider les salons de coiffure débordés au moment du déconfinement et il a fallu déplacer certaines semaines de cours.

Quant au télétravail, les apprentis ont dû, là encore, composer. «Dans la région, les entreprises sont très variées avec beaucoup de grands groupes industriels ou de la distribution. Ceux-là sont bien plus armés que d’autres pour la mise en place du télétravail ou des aides diverses», remarque Frédéric Sauvage, directeur de Formasup, qui est l’antenne de l’association nationale pour l’apprentissage dans l’enseignement supérieur pour les Hauts-de-France. Cet organisme regroupe 300 formations en alternance pour 6 500 étudiants et 4 500 entreprises. On y retrouve toutes les universités et la plupart des écoles d’ingénieurs de la région.

Le «distanciel» conforté

Voilà déjà quelques années qu’on demandait aux formateurs d’alimenter les sites d’enseignement à distance, par exemple eCampus. Beaucoup étaient donc quasi prêts. «Dans toutes les filières, on a démultiplié les enseignements distance», confirme Jean Luc Caenen.

Tous les établissements ont mis en place des séminaires, des webinaires et un suivi des stages à distance, quitte à les réorienter en fonction des circonstances. Quant aux stages à l’étranger, qui font partie du cahier des charges pour de nombreux cursus, beaucoup ont été annulés. «L’IMT de Douai a ainsi mis en place des cours spécifiques pour acquérir des compétences interculturelles avec l’appui des entreprises, avec un mémoire en anglais et un sujet en relation avec le pays où devait être réalisé le stage» souligne Jean Luc Caenen.

Ainsi, la génération Covid des apprentis n’a, semble-t-il, pas été trop sacrifiée. Au contraire, face à la crise, les apprentis auraient été privilégiés par rapport aux autres étudiants, en multipliant notamment les occasions de contact social. Beaucoup d’embauches ont d’ailleurs déjà été confirmées à l’issue de la fin des contrats d’apprentissage. Quant aux nouveaux apprentis, la prime d’état est prolongée jusqu’en décembre 2021, ouvrant de belles perspectives pour l’avenir.