Jacques Coulon : "Il faut donner une réelle importance aux très petites entreprises"

Jacques Coulon, patron de DBD nettoyage, une TPE villeneuvoise, est remonté contre les acteurs politiques et économiques. Interview d'un ancien de la chambre de commerce et d'industrie Grand Lille.

Pour Jacques Coulon, les TPE ne sont pas assez prises en compte.
Pour Jacques Coulon, les TPE ne sont pas assez prises en compte.
Corentin Escaillet

Pour Jacques Coulon, les TPE ne sont pas assez prises en compte.

La Gazette. Après avoir été membre de la CCI Grand Lille, vous êtes désormais à la tête d’une TPE. Quelle expérience en tirez-vous ?

Jacques Coulon. Je trouve que les acteurs politiques et économiques ne mettent pas assez l’accent sur les TPE. Qu’il s’agisse d’en parler, de discuter avec elles… les TPE ne sont pas assez prises en compte. Pourtant, elles représentent 95% des entreprises françaises. Mais on s’obstine : les discours politiques ne parlent de développement économique qu’à travers les petites et moyennes entreprises, les entreprises de taille intermédiaire et les très grandes entreprises, qui accaparent les canaux de communication. D’ailleurs, le terme même de TPE (très petite entreprise) est presque insultant lorsqu’on connaît leur importance dans l’économie du pays.

Il faudrait défendre les intérêts des TPE…

C’est difficile. Ces entreprises sont très nombreuses, et toutes différentes de par leur taille, la culture de leur chef et ses valeurs, sa psychologie, sa culture… Il serait impossible d’en brosser un tableau précis. Il faudrait toutefois se fédérer, se rassembler, mais les chefs de TPE ont tellement de travail – ils exécutent à eux seuls le travail de plusieurs employés d’une entreprise de taille moyenne – qu’il leur devient très difficile de trouver du temps pour défendre leurs intérêts et d’avoir le recul nécessaire pour analyser leurs entreprises dans leurs marchés. Dès lors, il devient difficile de se rassembler…

Mais alors, comment faire ?

Les entreprises recherchent deux choses : la réactivité et le pragmatisme. Sans ces deux données, il est impossible d’avancer. Il faut faciliter les échanges entre les entreprises, aider les chefs d’entreprise à en rencontrer d’autres. Les réseaux existants permettent aux dirigeants de se former entre eux, de parler de leurs difficultés et de se former un carnet d’adresses pour développer une nouvelle offre. Il faudrait soutenir ces démarches. Un annuaire des réseaux, des clubs ou des cercles, par exemple, serait une bonne idée. Il faut que les chefs de TPE puissent se rencontrer.

Quelles difficultés aujourd’hui pour les chefs de TPE ? Le réseau est certes une chose importante, mais n’y a-t-il pas d’autres contraintes ?

La première contrainte, c’est le chiffre d’affaires. Une entreprise doit générer un chiffre d’affaires, et certains ont tendance à l’omettre : plus d’une entreprise sur trois avait des problèmes de trésorerie en 2012. On arrive à 40% pour les entreprises de moins de cinq salariés. En 2006-2007, période de croissance économique, 15 à 20 avaient des difficultés de cet ordre.

Pour quelle raison ?

Les chefs de TPE ont avant tout un métier avant d’être des gestionnaires. De plus, ils ne disposent pas des ressources humaines d’une entreprise d’une taille supérieure. Les compétences en termes de développement commercial, de marketing, ne sont pas toujours acquises. S’ajoutent à cette difficulté les problèmes de financement de l’entreprise : un créateur d’entreprise se tournera instinctivement vers l’autofinancement ou vers les banques. Le financement est donc compliqué et se fait la plupart du temps au prix de garanties excessives.

Des solutions ?

Dans l’idéal, il faudrait donner aux responsables de TPE un accès plus direct, naturel et simple à la banque publique. D’autre part, la mise en place d’un fonds de garantie financé par les collectivités locales contribuerait à la création et le développement d’entreprises. Cela viendrait modifier le rapport de force entre le créateur et les banques, qui ont tendance à prendre le moins de risques possibles…