«Il ne faut pas sous-estimer le facteur humain»

«Il ne faut pas sous-estimer le facteur humain»

Il y a différentes méthodes pour évaluer la valeur d’une entreprise, mais, surtout, il y a un principe de base : le prix d’une entreprise est celui qu’un acheteur est prêt à la payer ! Différents modes de valorisation coexistent, on peut valoriser l’entreprise par ses actifs (approche patrimoniale), ses cash flows… L’approche la plus utilisée reste la valorisation à travers le multiple d’EBE (excédent brut d’exploitation), qui dépend bien évidemment des conditions de marché. Les multiples d’EBE, différents selon les secteurs d’activité, se calculent sur la base de l’historique de l’entreprise. Ce multiple dépend également du rythme de croissance et de la maturité de l’entreprise. Si, par exemple, l’acheteur dispose d’une visibilité sur la croissance, il peut déjà en acheter une partie. La valeur des titres sera ensuite influencée par le niveau d’endettement et la propriété de certains actifs (immobiliers, par exemple). Il faut aussi prendre en compte les logiques de «goodwill» (différence entre le prix d’acquisition et la juste valeur de la société acquise, ndlr). C’est pour cela que l’acheteur, aussi, est très important. Par exemple, un fonds d’investissement peut, au travers d’une acquisition, consolider un marché et y acquérir une position de leader, ce qui valorisera l’ensemble de son portefeuille à la revente. Dans le même esprit, un industriel peut identifier des synergies significatives lors d’une croissance externe et accepter d’intégrer une partie de celles-ci dans son prix d’achat.

Aujourd’hui, les entreprises sont très bien valorisées ; les multiples d’EBE moyens sont à des niveaux historiquement élevés, plus importants qu’après le précédent pic, en 2006/2007. Cela s’explique par plusieurs raisons : un cycle économique favorable ces dernières années, mais, surtout, un niveau de liquidités très important sur le marché. Comme les taux sont très bas, les investisseurs se reportent sur le private equity, avec de meilleurs rendements. De plus, il y a de nombreux intervenants dans le financement. En 2007, la part des banques était très importante dans le financement des acquisitions et aujourd’hui elle l’est moins, car les instruments de dette désintermédiée (fonds de dette, unitranches…) ont pris de l’ampleur, et les investisseurs institutionnels financent beaucoup plus les transmissions d’entreprise qu’auparavant.

Plus l’entreprise dépend de son dirigeant, plus la valorisation en est impactée. Le rachat d’une PME familiale, dans laquelle le dirigeant a un rôle très important, peut s’avérer plus compliqué pour un acheteur. Pour une entreprise familiale qui a l’intention de se céder, il faut qu’en amont, elle commence à structurer son organisation et son activité. C’est un travail parfois très long. On conseille aussi de bien préparer la transmission, y compris lorsque celle-ci est familiale. Et pour celles qui envisagent des croissances externes, il ne faut surtout pas sous-estimer la composante humaine. Intégrer une croissance externe demande des compétences, de l’expérience et de l’investissement : les cultures d’entreprise ne sont pas les mêmes, il faut identifier les «hommes et femmes clés». L’acquisition d’une entreprise ne peut pas s’approcher uniquement d’un point de vue financier.

ENCADRE

Les tendances du
marché

«S’il y a bien un secteur qui se dégage, c’est celui de la santé, parce qu’il concentre plusieurs activités solides. Je pense notamment à la santé à domicile, mais aussi aux laboratoires d’analyses médicales. Dans la région Hauts-de-France, la logistique est aussi très recherchée, à la fois du point de vue de l’immobilier comme celui des entreprises, d’autant mieux valorisées si elles sont ancrées dans le e-commerce. Le transport, assez connexe, semble un peu moins recherché ; pour autant des transactions se réalisent mais plutôt par des industriels que par des fonds d’investissement.»