Handicap et vacances, mode d’emploi
En fauteuil roulant, avec des béquilles, accompagnant un enfant, portant de lourds bagages, nous pouvons tous être confrontés aux situations de « handicap ». Alors que les Jeux paralympiques débuteront fin août, un guide, « Vacances accessibles », présente de nombreuses activités adaptées aux diverses formes de handicap, partout en France.
Editrice chez Michelin, Lucie Fontaine, qui se déplace en fauteuil roulant, a tout expérimenté. L’entrée dans un établissement public par le local des poubelles, parce que rien n’a été prévu pour franchir quelques marches. L’attente sous la pluie devant une salle de spectacle, en attendant que le gardien trouve les clefs du local où se trouve la passerelle. Le placement obligatoire au premier rang, au théâtre et au cinéma. Les toilettes au rez-de-chaussée du restaurant, seul local désigné comme accessible, mais transformé en débarras. Les rampes qui remplissaient correctement leur rôle, jusqu’à ce quelqu’un décide de les enlever en raison de travaux.
Malgré ces vexations, Lucie Fontaine demeure optimiste. Depuis 2004, date à laquelle elle écrivait un guide intitulé « Paris en fauteuil » (Ed. Parigramme), « le regard des gens a changé », assure-t-elle. Quant aux décideurs, « ils commencent à comprendre que tout le monde peut se retrouver un jour en situation de handicap », avec des béquilles ou à l’occasion d’un déplacement avec une personne âgée ou d’enfants en bas âge. « L’accès des bâtiments et de la voirie aux personnes handicapées facilite la vie de tous », résume Lucie Fontaine.
Toutefois, l’accessibilité demeure toujours abordée sous l’angle utilitaire : se rendre au travail, faire ses courses, accomplir des démarches administratives. Les loisirs ou les vacances des personnes handicapées, on n’en parle jamais. L’éditrice a voulu remédier à ce manque. Les Jeux paralympiques de Paris, qui se déroulent du 28 août au 8 septembre, « sont l’occasion d’évoquer le sujet », dit-elle.
Expériences gastronomiques et plans inclinés
Le guide « Vacances accessibles », publié en mars dernier, s’adresse aux « 5 millions » de personnes « à mobilité réduite et à leur entourage », pour lesquels « organiser ses vacances relève du parcours du combattant », écrit dans son édito Lucie Fontaine, qui est également rédactrice en chef de l’ouvrage.
En près de 400 pages et 30 chapitres, qui couvrent toute la France métropolitaine, les auteurs proposent un vaste champ d’activités. Deux pages sont consacrées aux « ressources pour préparer ses vacances ». Rien ne doit être laissé au hasard, assure Lucie Fontaine, car « l’organisation prend beaucoup plus de temps ». A titre d’exemple, la réservation d’un service de fauteuil roulant dans une gare est exigée par la SNCF 24 heures à l’avance, et le voyageur doit se présenter 30 minutes avant le départ du train. Le guide recommande de « toujours appeler un hébergement pour vérifier que les aménagements correspondent à vos besoins », qu’il s’agisse d’ascenseurs ou de sièges de douche.
Les hôtels et maisons d’hôtes ont été minutieusement sélectionnés. « Trop souvent, les chambres accessibles donnent sur un parking, ou ne sont éclairées par des mini-fenêtres », regrette Lucie Fontaine. Le guide passe en revue une grande diversité d’expériences gastronomiques, des brasseries aux salons de thé en passant par les rooftops ou les bistrots animés. Tous sont accessibles et leur personnel aguerri, comme l’ont vérifié les rédacteurs.
Ils ont aussi repéré les musées « totalement accessibles », comme celui qui raconte l’histoire des nourrices morvandelles, à Alligny-en-Morvan (Nièvre), la villa Cavrois, œuvre de l’architecte Robert Mallet-Stevens à Croix (Nord), ou encore le musée de la Tapisserie à Bayeux (Calvados). Ils signalent également les lieux qui prêtent des fauteuils roulants ou des « cannes-sièges » sur lesquelles s’appuyer.
Comme le prouveront à la fin de l’été les épreuves olympiques de cécifoot, de volley assis ou de para tennis de table, on peut être à la fois handicapé et très sportif. A tourner les pages des « Vacances accessibles », le lecteur est impressionné par la liste d’activités adaptées, des plus « pépères » aux plus intrépides. Les petits trains touristiques, à Montmartre (Paris) ou Metz, réservent parfois des places aux personnes handicapées. A l’est de Nice, le bus n°12 longe la côte, offrant une vue magnifique sur le littoral. Dans les centres-villes, comme celui de La Rochelle, le guide signale les « trottoirs larges », et les « surfaces planes, goudronnées et sans obstacle ». Plusieurs villes ont dessiné, au sol, un cheminement touristique, sous forme de ligne verte (à Nantes) ou de clous (à Angers).
Vélos accessibles et sports extrêmes
Les voies vertes, accessibles aux vélos et piétons, suggèrent de superbes promenades, que l’on se déplace en fauteuil roulant, avec une canne blanche ou un déambulateur, comme ce parcours sur caillebotis au milieu d’une tourbière, dans la vallée du Grésivaudan (Isère). Des vélos adaptés, tricycles à assistance électrique ou vélos-fauteuils, sont à louer en Alsace, le long du canal de la Bruche ou entre Beaune et Pommard (Côte d’Or).
La liste des moyens de transport semble infinie, en quad électrique dans la vallée de la Rance (Ille-et-Vilaine), en bateau dans les hortillonnages d’Amiens, en kayak dans les calanques de Cassis (Bouches-du-Rhône), ou pirogue hawaïenne à Saint-Jean-de-Luz (Pyrénées-Atlantiques). Au fil des pages, le lecteur se familiarise avec la joëlette, une sorte de siège monté sur une seule roue, tenue par des personnes valides à l’avant et à l’arrière, qui permet d’arpenter les chemins de montagne. Le Tiralo et l’Hippocampe, marques déposées, facilitent l’entrée dans l’eau. Dans la catégorie des sports extrêmes, le guide mentionne une initiation au canyoning dans le massif des Bauges (Savoie), au char à voile à Quend-Plage (Somme), au parapente au-dessus du lac d’Annecy, ou une sortie en mer en bouée tractée sur une plage du Calvados.
Les auteurs décernent, enfin, leurs félicitations au festival de théâtre d’Avignon. « Quasiment toutes les salles sont accessibles aux personnes en fauteuil roulant, y compris la cour du Palais des papes, et une adresse mail dédiée permet de réserver les spectacles. Le personnel est formé et tout est facilité. Bravo ! ». Un guide utile, pour tous les publics.