French Tech Lille, locomotive de l’innovation régionale

À la tête de French Tech Lille depuis mars 2024, l’expérimentée Hélène Clary, parallèlement co-fondatrice de l’entreprise ClicData, est un personnage clé du paysage start-up régional, l’un des plus dynamiques à l’échelle nationale. Elle dresse pour La Gazette un état des lieux de l’innovation en Hauts-de-France.

Hélène Clary, présidente de French Tech Lille. © Lena Heleta
Hélène Clary, présidente de French Tech Lille. © Lena Heleta

Que représente aujourd’hui l’écosystème French Tech Lille et quelles sont ses caractéristiques ?

L’écosystème est très diversifié puisqu’on travaille avec l’ensemble des incubateurs de la région, on a ce dénominateur commun de la Tech et du numérique mais en termes de spécialisation sectorielle, on va de la santé à l’industrie, les deux secteurs les plus ancrés en région, mais aussi de l’agroalimentaire à la logistique… Finalement l’innovation technologique se retrouve dans tous les secteurs ! Nous avons une richesse entrepreneuriale très forte et un appétit de croissance de par l’histoire de notre territoire. Lille fait partie des plus importantes French Tech de France avec Bordeaux en nombre de programmes, d’adhérents (300) et d’entreprises suivies ; en l’occurrence près de 1 000. On ressent une vraie culture du collectif dans le Nord avec l’envie de s’entraider pour aller plus vite. On ne monétise pas une mise en relation car il y a de la solidarité avant tout.

On voit de plus en plus de liens entre certains secteurs, vous confirmez ?

Tout à fait ! Nous sommes loin d’un monde siloté : croiser de l’industrie avec de la tech, c’est quelque chose de précieux. Il y a effectivement de plus en plus de start-up industrielles mais aussi des industries qui cherchent à prendre ce virage et qui ont besoin d’être dotés de bons ingrédients numériques. Et ce n’est qu’un exemple. On voit aussi des entreprises avec des degrés de maturité très différents travailler ensemble, ce qui rend la dynamique particulièrement riche.

Quel est le rôle premier de French Tech Lille ?

C’est d’emmener les entreprises du numérique vers la croissance et leur faire gagner du temps avant tout. Pour cela, nous avons mis en place des programmes bien spécifiques. Typiquement avec French Tech Tremplin, l’objectif est de mettre en lumière et d'équiper des entrepreneurs qui sur le papier n’avaient rien pour devenir entrepreneur. Amazing ladies met en avant les femmes du numérique, on attaque la 4e édition en septembre. Quant à Tech & Fab Summit qui cartonne, on entame la 3ème édition en novembre. Nous expérimentons beaucoup de choses. L’idée est créer des connexions et de travailler sur des thématiques qui sont chères aux entreprises du numérique à l’instant T. On va consolider nos événements phares plutôt que de créer de nouveaux rendez-vous.

Comment se portent les start-up actuellement ? Quid des levées de fonds ?

En 2023, le montant global des levées de fonds atteignait 84 millions, contre 80 millions en 2024. On observe une stabilisation mais pas de décrochage. Par contre il y a un vrai changement de configuration. En 2023, un acteur représentait quasiment 80% du montant global ; en 2024 on a constaté beaucoup plus d’opérations. Signe qu’il n’y a pas moins de start-up et que l’innovation n’a pas ralenti. Par contre nous observons une vraie frilosité bancaire et capital-risque. Les levées continuent avec des montants moindres, c’est juste qu’on a davantage de Business Angels et de Family offices. 2025 va s’inscrire dans cette continuité.

Existe-t-il des passerelles avec les autres antennes French Tech ?

Absolument ! On a un pied très important par exemple à Toronto au Canada, une antenne ultra dynamique avec laquelle on a été mis en relation en décembre dernier. Il existe plus d’une centaine de communautés French Tech partout dans le monde (la différence étant qu’elles s'auto-financent contrairement aux antennes nationales soutenues par Bercy). On se réunit tous chaque année en décembre afin notamment de définir la feuille de route de l’année suivante.

Pouvez-vous nous dévoiler la roadmap 2025 ?

La cyber et la souveraineté font partie des principaux enjeux. L’entrepreneuriat au féminin est un chantier plus récent sachant que la parité n’est pas du tout une réalité dans la Tech en France (70 % d’hommes vs 30 % de femmes). Le développement à l’international représente également un gros sujet tout comme l’emploi et l’accès aux talents. La question c’est surtout : comment faire pour garder les talents ? Mais nous retrouvons aussi tout ce qui touche à l’impact environnemental autour duquel il existe un vrai enjeu pédagogique. Nous avons pour cela lancé un podcast «TOCATÉ» dont l’objectif est de dévoiler les bonnes pratiques des entreprises qui ont pris le sujet par les cornes.

Double casquette

Embarquée dans le circuit French Tech depuis 5 ans, Hélène Clary est en parallèle co-dirigeante et co-fondatrice de ClicData fondée en 2008 à Lille. Cet éditeur de logiciels est spécialisé dans l’analyse de données accessible à toutes tailles d’entreprises : «Nous avons créé une plateforme permettant aux entreprises principalement du retail et de la santé de faire facilement sens de ce qui se passe au niveau de leur data pour mieux piloter leur activité». ClicData compte plusieurs centaines de clients à travers 20 pays. En 2025, les ambitions sont clairement affichées : «continuer à pousser fort sur nos principaux marchés : l’Angleterre, les Pays-Bas, la France et l’Amérique du Nord, tout en accélérant sur le marché de l’hôtellerie-restauration».

La French Tech Lille en chiffres

- 300 adhérents
- 1 000 entreprises suivies
- 80 M€ : montant global des levées de fonds en 2024
- Une trentaine d’incubateurs et de structures d’accompagnements affiliés en HDF