Retour sur le Salon VivaTech
French tech cherche chiffre d'affaires
Grands groupes et secteur public achètent de manière encore très limitée aux start-up, montre un rapport du Médiateur des entreprises. L'enjeu est de taille pour aider un écosystème économique dont le modèle d'affaires, fondé sur le financement, est à la peine.
Sauver
la French
tech ? Le 23 mai dernier, Pierre Pelouzet, Médiateur des entreprises,
remettait le rapport de l'Observatoire des relations entre grands
comptes et start-up à Marina Ferrari, ministre
chargée
du numérique à Bercy, sur le salon VivaTech, à
Paris, consacré
aux entreprises de
la tech.
Constat
central de l'étude : une «hausse
des achats auprès des start-up»
qui concerne - même si de manière différenciée - le secteur privé
et le secteur public. En 2022, au total, ce dernier leur a acheté
services et prestations à hauteur de
1,75
milliard
d'euros (dont 296
millions d’euros pour les ministères). Les sommes dépensées par
les grands groupes du secteur privé sont nettement plus
importantes : 4,28
milliards en 2022.
Néanmoins,
l'étude note un «rattrapage
d’ampleur des acteurs publics vis-à-vis
du recours aux start-up».
Ces dernières années, la dynamique a doublé passant de 10% à 20% de croissance du chiffre d'affaires par an. Mais,
le
trend
de
croissance reste indéniablement plus fort avec le secteur privé (+35% par an, en moyenne depuis 2019). De cette évolution, le rapport
tire en tout cas la conclusion selon laquelle «les
start up se sont imposées dans le paysage économique».
D'après
un sondage réalisé dans le cadre de l'étude, 41% des acheteurs
répondants ont déjà bénéficié des services des start-up. Et 14% s’apprêtent à franchir le pas dans les 12 prochains mois.
Soubassement
de
cette évolution, un changement de mentalité, avec une «relative
normalisation»
des start-up, dans l'esprit des décideurs publics et privés. Plus
de la moitié des entreprises considèrent que collaborer avec une
start-up ne représente qu'un risque assez faible. Et parmi les
freins identifiés, la problématique de la pérennité des jeunes
entreprises n'est citée que par 15% des répondants. Bref, ces
sociétés ne sont plus considérées par la majorité des acheteurs
comme proposant des solutions économiquement risquées, ou
réservées à des organisations nécessairement elles-mêmes très
innovantes.
Des mondes qui ont encore du mal à communiquer
En dépit de ces évolutions, les relations entre start-up et grands groupes et secteur public restent limitées. En 2022, les achats réalisées auprès de ces entreprises représentent environ 2% de la commande publique, et 2,4% de celle privée. Parmi les cinq groupes privés qui sont les meilleurs clients des start-up, la proportion s'élève à à 9,9%.
De fait, ces deux mondes continuent à avoir du mal à
communiquer et à se comprendre : plus de sept grands comptes
sur dix qui ont déjà eu recours à des start-up déplorent
l’insuffisance de réponses de ces dernières à leurs appels
d’offres. Et environ le tiers de ceux qui n'ont jamais franchi le
cap l'expliquent par le manque de connaissance des offres des jeunes
pousses. Quant aux grands comptes publics, ils sont la moitié à
pointer le fait que celles-ci ont une mauvaise connaissance des
dispositions du Code de la
commande publique...De leur coté, les start-up déplorent la
longueur excessive du cycle de
vente (68% pour le secteur public et 69% pour le secteur privé). Et aussi, la difficulté à obtenir des contacts et des opportunités
de rencontres avec les prospects (63% pour le secteur public et
66% pour le secteur privé) .
Or, l'enjeu de cette rencontre est vital pour les entreprises de la tech : en 2023, en France, les faillites ont augmenté dans ce secteur, avec une quarantaine de cas, dont deux tiers de faillites et un tiers de procédures d'insolvabilité. Tel est le constat de ScaleX Invest, spécialiste de l'évaluation des profils de risque dans la tech, relayé par le quotidien économique Les Échos du 28 mai.
Pis, l'année 2023 n'a fait que prolonger la tendance de 2022. Le secteur est fragilisé par la baisse de financements liée à la hausse des taux d'intérêt. C'est l'essence même du modèle économique de ces entreprises, dont la croissance se base sur des levées de fonds successives, et non sur leur chiffre d'affaires, qui est remis en cause. Pour soutenir la French Tech, Bercy a donc lancé en juin 2023, un programme «Je choisis la French Tech». Il vise à doubler la commande publique et les achats des grands groupes auprès des start-up.