Échanges et pratiques

La Mission opérationnelle transfrontalière (MOT) a donné une conférence un peu particulière le 30 septembre dernier, dans les locaux de la Caisse des dépôts et consignations, à Paris. Objectif : «Le développement économique intégré des territoires transfrontaliers».

« Carte des actions transfrontalières dans la grande région Nord-Pas-de-Calais-Picardie ».
« Carte des actions transfrontalières dans la grande région Nord-Pas-de-Calais-Picardie ».
CAPresse 2015

Une centaine de personnes a assisté à la conférence de la MOT au siège de la Caisse des dépôts et consignations, le 30 septembre dernier à Paris.

C’est l’un des projets phares de la MOT. Commencé il y a 18 mois, le projet de développement économique intégré des territoires transfrontaliers a touché son point ultime avec une conférence financée par l’Europe à travers le programme national d’assistance technique Europ’Act. Le fruit de ce travail s’est concrétisé avec deux publications. La première rend compte, sur 130 pages, de neuf cas d’espèces entre la France, la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg, l’Allemagne, la Suisse, l’Italie, les principautés de Monaco et d’Andorre, l’Espagne, le Danemark, l’Autriche et la Slovaquie. La seconde est un guide pratique qui met en exergue la construction de partenariats entre acteurs transfrontaliers (voir encadré). Évident quand le sujet est abordé, le développement économique transfrontalier reste cependant “un sujet peu exploré” lit-on dans le préambule de la publication de la MOT. Cette dernière rappelle en effet que ce thème a été à l’ordre du jour de son premier cahier thématique en 2001, qu’il est revenu plusieurs fois sur le devant de la scène, mais pas de manière suivie. Il y eut aussi un colloque en 2007, puis un travail sur la reprise d’entreprise dans les régions transfrontalières. Enfin, un travail parlementaire en 2010 a réuni Fabienne Keller, sénatrice du Bas-Rhin, Etienne Blanc, député de l’Ain, et Thérèse Sanchez-Schmid, députée européenne. Ces trois parlementaires avaient alors proposé d’expérimenter des pôles de développement économique transfrontalier, avec un statut spécifique à fort levier.

Une approche territoriale intégréeLe document réalisé par les experts de la MOT “se situe résolument dans l’hypothèse de l’approche territoriale intégrée, qui, par son opposition à une approche sectorielle, vise à traiter simultanément les questions d’emploi, de développement économique et d’aménagement, en portant attention aux territoires dans lesquels les politiques sont mises en place.” Exemple, la grande Région Nord-Pas-de-Calais-Picardie : le programme Interreg 2 Mers avec le Pôle métropolitain de la Côte d’Opale et le GECT West Vlaanderen ; une coopération transfrontalière poussée et ancienne en Wallonnie avec un autre GECT. Outre un capital d’expérience précieux, elle connaît des convergences intéressantes. Ainsi, la Belgique a un taux d’imposition proche de celui de la France, même si son coût du travail est moindre. Si le prix du foncier en France est moins élevé, la Belgique a une image plus attractive en termes d’affaires. Les deux parties sont engagées dans une tertiarisation importante depuis les difficultés industrielles du dernier siècle. Pour autant, le secteur textile est le plus “intégré du point de vue transfrontalier“. Un centre de recherche belge sur les textiles (Centrexbel) et le pôle de compétitivité UP-tex “ont des représentations croisées dans leurs conseils d’administration“. Quant aux TIC, des rapprochements entre clusters sont à l’œuvre avec le projet Tandem. Innovation encore avec Innov’Eurométropolis où une plate-forme est active. Autre exemple, sur les bords de Meuse : les conditions-cadres des régions belges, allemandes et néerlandaises sont proches malgré des taux d’imposition sur les sociétés différents (25% aux Pays-Bas, 30% en Allemagne sur deux taux et 34% en Belgique). Le passé industriel de ces régions les a conduites à travailler ensemble sur des projets de chimie, d’électronique et de pharmacopée. En termes d’innovation, ces régions ont elles aussi rapproché leurs clusters via le projet TTC (Top Technology Center), qui doit déboucher sur la création de consortiums transfrontaliers de PME.

Kiosk franco-allemand déséquilibré. Lors du colloque, la MOT a mis en exergue d’autres projets de développement économique comme celui de soutien aux créateurs et porteurs de projet dans l’Eurodistrict de Strasbourg /Offenburg, qui vise à animer le territoire avec des workshops, des ateliers, de la documentation et des rencontres des deux côtés du Rhin. “On passe d’un endroit à l’autre côté de la frontière pour recevoir nos clients, explique Henri Beillet, président du Kiosk Office. Le Kiosk ne doit pas garder les projets mais les accélérer dans l’autre partie de l’Eurodistrict.” Depuis sa création, 600 personnes ont été accueillies ; en Allemagne, 100 m² sont disponibles dans un espace fréquenté régulièrement par une centaine de personnes. De même, 250 m² en France sont à la disposition de traducteurs, commerciaux, commerçants, soit une fréquentation de 25 personnes, utilisatrices épisodiques. Un pli à prendre.

 

Guide pratique de la construction des partenariats et du montage de projet de la MOT.

 

CAPresse 2015

Carte des actions transfrontalières dans la grande Région Nord-Pas-de-Calais-Picardie.

Un guide pratique

Les 40 pages de ce guide donnent plus qu’un aperçu du transfrontalier sous l’angle du développement économique. En cinq points, la publication détaille en effet les problématiques clés de tout engagement dans ce domaine. “Identifier et valoriser la dimension transfrontalière du développement économique auprès des acteurs institutionnels” ou comment convaincre que la création de richesses est au bout d’un projet ; “définir les paramètres optimaux des partenariats” ou pourquoi la géographie conserve son importance ; “dépasser les logiques de concurrence entre les territoires“, c’est-à-dire passer une marche dans la nouvelle économie ; “construire une vision stratégique du développement économique transfrontalier“, soit fédérer les acteurs ; “articuler les dispositifs de financement“, c’est-à-dire partager les subsides dans un intérêt collectif.