Desseilles relève l'image d'une industrie en difficulté

C'est une première qui a fait du bruit à Calais. La projection du documentaire sur le dentellier Desseilles a rassemblé plus d'une centaine de personnes à la Cité internationale de la dentelle et de la mode à Calais, le 6 octobre dernier. Retour sur l'étude d'un redressement judiciaire qui finit bien dans un métier qui a enchaîné les plans sociaux et les fermetures d'usines depuis 20 ans.

« Jean-Louis Dussart, dirigeant de Desseilles, à la Cité Internationale de la Dentelle et de la Mode à Calais, le 6 octobre dernier ».
« Jean-Louis Dussart, dirigeant de Desseilles, à la Cité Internationale de la Dentelle et de la Mode à Calais, le 6 octobre dernier ».
CAPresse 2014

Jean-Louis Dussart, dirigeant de Desseilles, à la Cité internationale de la dentelle et de la mode à Calais, le 6 octobre dernier.

 

C’est avec un humour certain et un regard décalé que Valérie Jourdan et Eric Beauducel ont rendu leur expérience de 18 mois chez Desseilles. «Au départ, on voulait montrer ce qu’était un redressement judiciaire. Que ça peut bien se passer aussi», raconte Valérie Jourdan, auteur du documentaire. En 2011, Desseilles dépose le bilan. Trois de ses cadres décident de reprendre l’entreprise. «On est complémentaires et on est trois copains», souligne Gérard Dezoteux, esquisseur et dessinateur, dans la dentelle depuis 45 ans. «Oui, on est un peu fous mais c’est ce qui est drôle aussi», pointe Jean-Louis Dussart, membe du trio. Un sérieux conflit avec des salariés protégés alourdit le plan de charge de l’entreprise. «Quand vous avez des délégués syndicaux qui forment l’essentiel de l’atelier tulliste et qu’ils sont en délégation illimitée sans que vous sachiez quand ils prennent leurs heures de délégation, vous avez un peu de mal à livrer vos clients», ironise encore Jean-Louis Dussart. Des pince-sans-rire, la direction et les salariés qui font bloc le sont devenus avec les difficultés récurrentes qu’ils ont traversées.

L’humour comme méthode de combat. Quelques mois après la reprise, Desseilles pointe au tribunal de commerce de Boulogne-sur-Mer. En une année, le dentellier règle les uns après les autres les problèmes de la profession. Les tullistes ne veulent pas s’adapter au plan de charge de l’entreprise ? «On a pris des passeurs de chaînes qui travaillent mieux et plus vite», retoque Jean-Louis Dussart. L’inspection du travail finit par autoriser le licenciement des délégués syndicaux plus de trois ans après la reprise… «C’est une plaisanterie à plus d’un million d’euros sur trois ans», calcule Jean-Louis Dussart, qui a passé des journées entières en comité d’entreprise à répondre aux questions des délégués syndicaux : «entre 12 et 36 questions par CE, des séances de 9 heures parfois». Le 26 juin dernier, Desseilles sort du redressement judiciaire avec un carnet de commandes à faire pâlir d’envie ses confrères calaisiens. A la rentrée dernière, Gérard Dezoteux réalisait un dessin géant sorti des archives, dont les cartons n’existent plus depuis longtemps (pour le linger Simone Pérèle). «Un tour de force qui n’a jamais été réalisé par personne depuis près d’un siècle», souffle Michel Berrier, le troisième de la bande. Le même jour, la CIDM lançait son premier dessin produit sur ses métiers : dentellier, un art qui ne se résigne pas à finir dans un musée.