Décisions : quand la justice tranche
Rémunération variable, modification du contrat de travail, licenciement économique, reclassement, rupture de contrat, maladie professionnelle, faute lourde… autant de cas auxquels salariés et chefs d’entreprises sont un jour ou l’autre confrontés. Que disent les textes, quelles sont les décisions de la cour ? Le point sur la législation avec quelques exemples…
Rémunération variable : calcul
Lorsque le paiement de la rémunération variable du salarié résulte du contrat de travail et que l’employeur n’a pas fixé d’objectifs pour l’exercice considéré, le juge doit déterminer son montant selon les critères du contrat et les accords des années précédentes. (Cass soc. 13 février 2013. pourvoi n° 11- 21073). Un salarié réclamait le versement d’une prime d’objectifs prévue dans son contrat de travail. Pour la chambre sociale de la Cour de cassation, lorsque le paiement de la rémunération variable du salarié résulte du contrat de travail et que l’employeur n’a pas fixé les objectifs pour l’exercice considéré, il appartient au juge de déterminer le montant de celle-ci en fonction des critères visés au contrat et des accords des années précédentes. Or, en l’espèce, les parties n’avaient pas convenu des objectifs à atteindre pour l’exercice 2007 et au titre de l’année 2006. Et le salarié avait perçu une certaine somme compte tenu du pourcentage de réalisation de ses objectifs. La cour d’appel a donc pu fixer à 20 % de la rémunération brute annuelle, le montant de la prime pour la réalisation de l’ensemble des objectifs pour l’année 2007.
Licenciement économique Reclassement
Dans le cadre d’un licenciement économique, ne satisfait pas à son obligation de reclassement l’employeur qui ne propose qu’une seule offre au salarié, impliquant un déclassement et une forte baisse de son salaire, et qui ne démontre pas qu’aucun autre poste compatible avec ses fonctions n’était disponible. (Cass soc. 13 février 2013. pourvoi n° 11-21074). Une salariée avait été licenciée pour motif économique à la fin de l’année 2007, dans le cadre de la suppression de huit postes de cadres sur quatorze. Elle avait adhéré à la convention de reclassement personnalisé et avait été licenciée pour motif économique après avoir refusé la proposition de reclassement qui lui avait été faite, lors de l’entretien préalable, dans un poste de standardiste-suivi commercial. La Cour de cassation valide la décision des juges du fond. L’employeur n’avait pas loyalement satisfait à son obligation de reclassement : il n’avait proposé à la salariée, qu’une seule offre de reclassement, impliquant un déclassement et une forte baisse de son salaire, et il ne démontrait pas qu’il n’avait aucun autre poste compatible avec les fonctions de sa salariée.
Faute lourde : notion
La responsabilité pécuniaire d’un salarié à l’égard de son employeur ne peut résulter que de sa faute lourde. (Cass soc. 13 février 2013. pourvoi n° 11-23920). Un ressortissant étranger avait été engagé en qualité d’agent de sécurité, en contrat à durée déterminée du 2 juillet 2007, renouvelé pour une durée de trois mois, puis suivant un contrat à durée indéterminée du 1er janvier 2008.Le 13 février 2009, l’employeur avait notifié au salarié son licenciement depuis le 10 février précédent, au motif de sa situation irrégulière sur le territoire français. Contestant son licenciement, ce dernier avait saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes. Les juges du fond l’avaient condamné au paiement d’une somme en réparation du préjudice subi par l’employeur : le salarié ne contestait pas avoir délibérément trompé celui-ci sur son identité et sa situation sur le territoire français. Son attitude avait causé un préjudice certain à l’employeur qui, d’une part, avait été soupçonné de travail dissimulé et, d’autre part, avait subi les répercussions de l’interpellation d’un de ses agents de sécurité chez un client. La Haute cour invalide cette décision : les juges du fond n’avaient pas caractérisé la faute lourde du salarié.
Etranger : rupture du contrat
La rupture du contrat de travail d’un étranger engagé irrégulièrement ouvre au salarié le droit à une indemnité de préavis, même si celui-ci ne peut être exécuté et que l’indemnité due ne peut être que la plus élevée de l’indemnité forfaitaire ou de celle de préavis. (Cass soc. 13 février 2013. pourvoi n° 11-23920). Suivant l’article L.8252-2 du Code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2011- 672 du 16 juin 2011, l’étranger non muni du titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France a droit, au titre de la période d’emploi illicite, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à un mois de salaire, à moins que l’application des règles figurant aux articles L.1234-5, L.1234-9, L.1243-4 et L.1243-8 du même code ne conduise à une solution plus favorable. En conséquence, la rupture du contrat de l’étranger engagé irrégulièrement ouvre au salarié le droit à une indemnité de préavis, même si celui-ci ne peut être exécuté et que l’indemnité due ne peut être que la plus élevée de l’indemnité forfaitaire ou de l’indemnité de préavis. Doit donc être cassé l’arrêt suivant lequel le préavis ne pouvait être exécuté en raison de l’impossibilité pour le salarié de travailler sur le sol français.
Rémunération : modification du contrat de travail
Le mode de rémunération contractuel d’un salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié sans son accord. (Cass soc. 13 février 2013. pourvoi n° 11-28565). En l’espèce, le contrat de travail d’un salarié prévoyait une rémunération mensuelle nette de 1 372,04 euros correspondant, selon les bulletins de paie, à un montant brut de 1 944,56 euros pour 151,67 heures. Le salarié avait perçu cette rémunération de janvier à mars 2007. Le montant brut avait été ramené à 1 757,94 euros en avril 2007, puis à 1 561,74 euros à compter de juillet 2007, et le salaire net calculé sur ces nouvelles bases.
Maladie professionnelle : notion
La décision de reconnaissance d’une maladie professionnelle par la caisse primaire d’assurance maladie est sans incidence sur l’appréciation par le juge prud’homal de l’origine professionnelle ou non de l’inaptitude du salarié. (Cass soc. 13 février 2013. pourvoi n° 11-26887). En l’espèce, une salariée avait été licenciée le 9 septembre 2008 pour inaptitude et impossibilité de reclassement. Contestant le bien-fondé de cette décision, elle avait saisi le conseil des prud’hommes. L’employeur, condamné pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, reprochait aux juges du fond de ne pas avoir recherché si le courrier de reconnaissance de la maladie professionnelle de la CPAM avait été reçu avant le licenciement. La Cour de cassation rejette cette argumentation.
Dirigeant de fait : notion
Dès lors que le salarié possède 49 % des parts d’une société, signe les documents engageant la société, n’exerce pas ses fonctions sous le contrôle du gérant et s’immisce dans la gestion de la société dont il assure la représentation vis-à-vis des tiers, il exerce les fonctions de dirigeant de fait, exclusives de l’existence d’un contrat de travail. (Cass soc. 13 février 2013. pourvoi n° 11-19870). Dans cette affaire, un associé invoquait l’existence d’un contrat de travail avec son entreprise.