Matériel agricole

De la charrette en bois au châssis composite

Implantés depuis 1910 à Caulières, les Établissements Dangreville irriguent le marché agricole européen de bennes et pulvérisateurs de qualité. Ils innovent aujourd’hui avec un châssis 100 % composite, ultra léger.

Emmanuel Carpentier devant un châssis acier présente le produit de demain : le châssis composite.© Aletheia Press/ B. Delabre)
Emmanuel Carpentier devant un châssis acier présente le produit de demain : le châssis composite.© Aletheia Press/ B. Delabre)

C’est une belle histoire familiale comme seules les PME françaises savent en écrire. Ici pas question d’entrées en bourses, d’OPA ou de médiatiques levées de fonds… Nous sommes à Caulières, à quelques kilomètres de la frontière avec la Normandie. Et c’est là, à l’entrée du village, que depuis 1910 et depuis quatre générations, l’entreprise Dangreville s’épanouit. « Nous sommes issus d’une famille de forgerons et de maréchaux-ferrants, raconte Emmanuel Carpentier, co-dirigeant du groupe. Après la guerre, avec la mécanisation de l’agriculture, les maréchaux-ferrants se sont mis à construire du matériel. » Et ce sont les parents d’Emmanuel qui se sont spécialisés ensuite dans la fabrication de bennes et d’épandeurs.

Un châssis composite pour les bennes

L’entreprise dont la renommée dépasse aujourd’hui les frontières de la France (avec des marchés importants en Belgique, en Pologne et en Russie) reste à 100 % familiale. « On fabrique tout de A à Z, aime à répéter Emmanuel Carpentier. On reparle du "fabriqué en France" aujourd’hui, mais nous, on ne l’a jamais quitté. » Fière de ses racines et de son histoire, Dangreville, qui abrite en son sein un petit musée du machinisme agricole, revendique sa volonté de rester à Caulières et d’y faire venir des jeunes pour les former. Emmanuel Carpentier : « Nos salariés sont multicartes. Ce n’est pas du travail à la chaîne. Nous sommes fiers de former des jeunes dans la culture du travail et du savoir-faire. Et nous avons à cœur de conserver les compétences sur nos territoires ruraux. C’est important de savoir innover sans avoir à faire des milliers de kilomètres. » L’innovation justement, les Établissements Dangreville sont en plein dedans. En développant un châssis de remorque en matériau composite, comme alternative au châssis en acier. Objectif : diminuer le poids du châssis. Le gain est estimé à une tonne pour une remorque trois essieux ! Un argument important pour des bennes de plus en plus grandes, dont le poids peut altérer la structure du sol et impacter les cultures sur plusieurs années.

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À Caulières, Dangreville construit ses bennes et pulvérisateurs. L’entreprise remet aussi à neuf ses anciens produits, et ceux de ses marques associées : Danel et Deguillaume. © Aletheia Press/ B. Delabre


                            "Nous sommes fiers de former des jeunes 

                            dans la culture du travail et du savoir-faire"

250 véhicules par an

Utilisé dans l’aéronautique ou le naval, le composite offre de belles perspectives pour le secteur du machinisme agricole. Encore faut-il l’apprivoiser. Avec le soutien financier de BPIfrance, Dangreville a collaboré sur ce produit avec un spécialiste, dont le nom est tenu secret. Les tests en conditions réelles d’utilisation ont été concluants. « Ça a tenu et c’est déjà beaucoup », souffle Emmanuel Carpentier. Reste désormais à franchir le pas de l’industrialisation. À ce stade,  « quand on parle d’innovation, la question de la quantité vient tout de suite sur le tapis », se désole Emmanuel Carpentier. Il faut rentabiliser le moule. Mais des remorques, l’entreprise n’en fabrique pas des millions chaque année… ni même des milliers. « À Caulières, on fabrique environ 250 véhicules par an environ, compte le dirigeant. Mais le nombre n’est pas un objectif en soi. On mise sur la qualité d’abord. » Cet objectif de qualité est aussi en ligne de mire du projet de châssis composite. Pas si facile de passer du travail de l’acier au moulage d’un composite. « On change toutes nos façons de travailler. C’est une vraie révolution pour nous… », avoue Emmanuel Carpentier. La voie est toutefois ouverte. La mise en production industrielle des châssis est espérée pour fin 2021.