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Coup de rabot sur les primes d’apprentissage : inquiétudes en Moselle

Plus d’un milliard d’euros : c’est la diminution des aides à l’apprentissage mises en place pour soutenir l’emploi des jeunes dans le budget 2025. Le flou se marie avec une certaine amertume du côté des employeurs, en Moselle, comme ailleurs. L’Union des Entreprises de Proximité (U2P) réagit.

Les annonces récentes quant à l'apprentissage vont-elles être un frein pour celui-ci ?
Les annonces récentes quant à l'apprentissage vont-elles être un frein pour celui-ci ?

«Dans son budget 2025, le gouvernement prévoit de diminuer de 1,2 milliard d’euros les aides à l’apprentissage, mises en place pour soutenir l’emploi des jeunes», a indiqué le ministère du Travail, en marge de la présentation du budget 2025. «Il est demandé un effort sur les primes à l'embauche de 1,2 milliard d'euros», a indiqué le ministère, en précisant que la piste d'une aide unique ramenée de 6 000 à 4 500 € est «un scénario parmi d'autres.» Les pistes d'une «modulation par niveau de qualification» ou «par taille d'entreprise» sont également envisagées, selon la même source. Le gouvernement prévoit une stabilisation du nombre d'apprentis, qui grâce notamment à ces primes, est passé depuis 2017, de 317 000 à 853 000 € 2023. Le président de la République s'était donné l'objectif d'un million d'apprentis par an. En outre, pour faire plus d'économies, les exonérations de cotisations salariales et patronales dont bénéficient les contrats d'apprentissage ne s'appliqueront plus que jusqu'à la moitié du Smic, et non jusqu'à 0,79 Smic comme aujourd'hui, ce qui va augmenter le coût pour les employeurs des apprentis les mieux rémunérés. Pour ces derniers, le salaire net diminuera : ils paieront davantage de cotisations sociales et verront également leur rémunération au-delà d'un demi-Smic assujettie à la CSG et à CRDS.

Variable d'ajustement budgétaire...

Le Premier ministre Michel Barnier avait prévenu qu'il entendait regarder «si certaines aides à l'apprentissage ne (pouvaient) pas être reciblées» et qu'il comptait éviter les «effets d'aubaine.» Un récent rapport de l'Inspection générale des finances (IGF) avait calculé que le coût des aides à l'apprentissage a été multiplié par 3,4 entre 2018 et 2022. Ces annonces inquiètent les entreprises, particulièrement les plus petites, là où l’apprentissage est très présent et efficace. L’Union des Entreprises de Proximité (U2P) exprime ses doutes. En Moselle, elle fait entrer dans son champ plus de 30 000 entreprises, présidée par Séverine Stano : «Le gouvernement s’apprête-t-il à tuer la poule aux œufs d’or ? L’action conduite en faveur de l’apprentissage est l’une des grandes réussites des politiques publiques de ces dernières années. Cette filière de formation, qui offre un taux d’insertion dans l’emploi de 12 points supérieur (75 %) à celui de la filière classique (63 %), s’est considérablement développée jusqu’à atteindre près d’un million de contrats d’apprentissage. Et pourtant, le gouvernement envisage de raboter l’accompagnement financier de toutes les entreprises qui forment un apprenti, sans distinction de taille, en le faisant passer de 6 000 à 4 500 €. Certes l’U2P regrette que les déficits publics se soient accumulés au fil des années et partage l’impérieuse nécessité de réduire les dépenses publiques. Pour autant, l’apprentissage ne peut pas être une variable d’ajustement budgétaire. L’effort de formation consenti par les entreprises au profit des apprentis doit au contraire être assimilé à un investissement, qui profite à l’ensemble de la collectivité nationale en ce qu’il combat le chômage, et qui mérite donc une compensation financière adaptée. L’État ne finance-t-il pas à 100 % l’enseignement sous statut scolaire ?»

Pari risqué...

«L’U2P rejoint le Premier ministre quand il appelle à combattre les effets d’aubaine et invite pour cela à revenir à la situation d’avant 2020 quand les entreprises de plus de 250 salariés étaient exclues du dispositif d’aide à l’apprentissage. Qui peut affirmer qu’une entreprise du CAC 40 a autant besoin d’une aide à l’apprentissage que la TPE de moins de 10 salariés ? L’économie s’élèverait à plus d’un milliard d’euros. En parallèle, le gouvernement s’apprêterait également à réduire les exonérations de charges sur le salaire des apprentis, s’orientant vers une double peine : moins d’aides et plus de charges. Quant aux propositions visant à supprimer certaines exonérations de charges au niveau du SMIC, l’U2P y voit un pari risqué qui mériterait à tout le moins une évaluation branche professionnelle par branche professionnelle, voire entreprise par entreprise. La vraie solution pour améliorer le pouvoir d’achat des Français qui travaillent viendra d’une réforme d’ensemble définissant de nouvelles sources de financement de notre protection sociale, à l’instar de la création de la CSG dans le passé, de façon à alléger le coût du travail.» On rappellera qu’en Moselle le nombre d’apprentis ne cesse de croître. Quand il y a cinq ans encore, il dépassait à peine les 5 000, il a bondi à plus de 8 000 sur l’exercice 2023.