Compétitivité et croissance : oublions le débat politique… !
Discours politiques, débats télévisés, articles à foison sur ce sujet… pourquoi aborder une nouvelle fois ces deux notions, compétitivité et croissance ,qui reviennent quotidiennement à nos oreilles ? Nous ne rentrerons pas ici dans le débat, consistant par exemple à comparer le coût du travail en Allemagne et en France, et encore moins dans les arguties sur les prévisions de croissance économique qui sont tributaires de facteurs trop souvent occultés par le monde politique. Nous souhaitons plutôt apporter un regard d’investisseur sur ces deux notions, le propre des marchés financiers, et donc des investisseurs, étant d’essayer d’anticiper les tendances à venir, d’identifier les marchés porteurs et les entreprises sur lesquelles investir.
Qu’est ce que la compétitivité pour un investisseur ?
Il s’agit avant tout d’identifier les pays, secteurs économiques, et enfin entreprises, qui bénéficient d’un avantage concurrentiel certain sur leurs concurrents respectifs. A cet égard, la compétitivité idéale… pourrait ainsi être qualifiée par l’absence de concurrence.. ! A l’échelle d’un pays, les investisseurs ont par exemple compris depuis plusieurs mois que les Etats-Unis bénéficient d’un avantage compétitif certain grâce à un positionnement sur les gaz de schiste. Malgré un coût du travail équivalent à celui de l’Europe et supérieur à celui des pays émergents, la politique énergétique des Etats- Unis donne un avantage compétitif tel à ce pays que les industriels ouvrent de nouveau des usines outre atlantique. La bourse de New York portée, entre autres, par cette compétitivité énergétique en a largement profité depuis plusieurs mois. En termes de secteurs, cette notion de compétitivité se retrouve aussi dans des domaines comme la technologie, l’aéronautique ou le luxe. Prenons un exemple typiquement européen: Airbus Industrie. Comment expliquer qu’avec une production disséminée sur toute l’Europe, une main d’oeuvre plus onéreuse et une monnaie forte, Airbus soit le leader mondial dans l’aviation ? Simplement, par des capacités d’anticipation et d’innovation technologique qui permettent, à cette société, de maintenir sa compétitivité face à des concurrents souvent mieux lotis en termes d’environnement économique. Au plan des entreprises, il est certain que l’environnement dans lequel elles évoluent en termes de coût du travail et d’importance des charges fiscales sont des facteurs importants de contribution à la performance. Mais les investisseurs s’attachent plus à juger la compétitivité d’une entreprise par ses capacités intrinsèques. L’industrie automobile caractérise assez bien cette contradiction entre la vision des investisseurs et le discours politique ambiant. Si le constructeur Peugeot fait malheureusement la une de l’actualité en raison de ses difficultés, ce n’est pas le cas d’autres groupes automobiles qui produisent aussi en France, comme Renault ou encore Toyota. Comme en atteste la contre performance de son cours de bourse, les investisseurs considèrent que les problèmes de Peugeot sont plus liés à un positionnement compétitif défaillant face à ses concurrents qu’à une situation exclusivement française. A contrario, la concurrence automobile allemande mais également française (exemple de Renault avec l’aide de Nissan) ont su se positionner chacun sur leurs segments et savoirs faire pour profiter de l’élément indissociable de la compétitivité : les zones de croissance.
Investir sur la croissance…
Puisque la croissance est fondamentalement liée à la démographie, toute activité pour se développer ayant in fine besoin d’un nombre croissant de clients potentiels, penchons nous sur les zones de croissance à venir… Répondons malheureusement d’emblée que ce ne sera très certainement pas l’Europe, dont la croissance économique des dernières années était plus liée à l’explosion de la demande émergente qu’à celle de la demande locale. Pour ce qui concerne déjà la France, contrairement aux annonces politiques, il paraît illusoire de croire à un retour rapide d’une forte croissance économique, tant notre pays semble enkysté dans ses rigidités , et tout au plus devrons nous nous contenter d’une croissance proche de zéro sur les prochaines années. Et globalement à l’échelle de l’Europe, la croissance économique, qui semblait régulière depuis plusieurs décennies et ne devoir être ponctuée que de quelques brèves périodes de récession, devrait entrer dans les années à venir dans une phase de stagnation durable. En effet, la consommation européenne n’est pas en mesure de prendre le relais d’une moindre progression des exportations vers les pays émergents et la population européenne la plus impliquée dans la vie économique,à savoir la tranche d’âge démographique comprise entre 25 et 55 ans, c’est-à-dire celle qui dépense et épargne le plus, vient à l’instar du Japon d’entamer son déclin… A l’inverse, depuis le début du 21ème siècle la croissance s’est déplacée vers les zones en forte poussée démographique, donc essentiellement vers les pays émergents. Par ailleurs, outre la démographie, les investisseurs s’intéressent aussi aux secteurs comme la technologie dont la croissance potentielle peut être déclenchée par l’innovation. Dans ce domaine les sociétés françaises les plus connues comme Dassault Système, Ingénico, Gémalto, connaissent des progressions boursières exceptionnelles traduisant une compétitivité qui les positionne parmi les meilleures dans leurs domaines. Quels que soient les secteurs d’activités le luxe, l’agroalimentaire, le tourisme… nous pouvons multiplier les exemples de réussites françaises et européennes qui ont su prendre le virage de la mondialisation et miser sur la croissance internationale pour le bonheur de leurs actionnaires. Alors aujourd’hui, sortons du débat politique: la forte croissance économique européenne appartient au passé, certaines industries ne sont plus compétitives. Pourtant, des dizaines de métiers et d’entreprises s’affranchissent des débats actuels et affichent compétitivité et croissance. D’autres régions bénéficiant d’une démographie plus favorable que la nôtre tireront la croissance mondiale des années à venir. Les investisseurs, les chefs d’entreprises n’ont pas attendu les débats actuels pour se positionner sur les métiers les plus compétitifs et les marchés de croissance. Bien sûr, le pouvoir politique, nos administrations, doivent faire tout ce qui est en leur pouvoir pour faciliter la compétitivité et la croissance, mais comme les chefs d’entreprises et les investisseurs, n’attendons pas les réformes à venir pour investir sur les tendances et marchés de demain.