Collectivité
Commercy, la petite ville qui résiste
Sous-préfecture de la Meuse, Commercy a su tirer son épingle du jeu malgré le départ du 8e Régiment d’Artillerie de Commercy qui a été dissout en juin 2013. Depuis, la Cité de la Madeleine, soutenue par un contrat de revitalisation, a accueilli l’usine de Safran Albany ou encore le Campus John Cockerill. Décryptage avec le maire, élu seulement depuis huit mois, après avoir été le 1er adjoint du maire Jérôme Lefèvre, démissionnaire en 2024.
![© Alexandra Marquet- Jean-Philippe Vautrin, élu seulement depuis huit mois à la tête de Commercy.](/thumbs/1368×1026/articles/2025/01/Capture-d-ecran-2025-01-27-a-20-55-46.jpg)
Un mot sur votre parcours et votre engagement à la suite de la démission de Jérôme Lefèvre en 2024. Pourquoi vous êtes-vous engagé ?
Étant premier adjoint, j’ai naturellement souhaité poursuivre l’action. Pour revenir en arrière, à l’origine de mon engagement, je me suis retrouvé à Commercy au grès de mes mutations. J’y ai posé mes valises en 2000 et je n’y suis plus jamais reparti. Mon ainé était au collège, c’est d’ailleurs la taille de ville idéale pour élever des enfants, pratiquer du sport avec un tissu associatif fortement développé. Mon engagement politique remonte à 2014 où mon ami Jérôme Lefèvre avait monté une liste et je l’ai suivi. Il a été élu maire, et moi président de la Codecom (ancienne formule). À cette époque, Safran venait de s’installer. Le développement économique était en plein boom. On a enchaîné les projets et les accompagnements de Safran-Albany, Concordia Fibers, le campus Cockerill… Aujourd’hui on n’a quasiment plus de place en termes d’offre foncière. On a créé également un centre aquatique de 10 millions d’euros en 2016, ce qui est rare pour une ville de notre taille. Cet équipement structurant accompagne le développement économique de notre territoire et offre un service à la population.
L’annonce du départ du 8e RA a été faite en 2008 à un moment où le bassin d’emploi de l’arrondissement de Commercy était fragilisé. Comment expliquez-vous la dynamique qui a suivi ?
Cette décision aurait effectivement pu coïncider avec une descente aux enfers. Or la compensation de l’État avec le contrat de redynamisation et l’engagement de l’ensemble des élus nous ont permis de rebondir. À cette époque, tous nos projets étaient subventionnés (plafond des 80 %), les sous-préfets étaient dynamiques. Nous, élus, nous avons répondu aux demandes des entreprises, comme Safran qui voulait un restaurant d’entreprise. C’était notre contribution, même si finalement cet équipement n’a pas trouvé son public. Il va falloir trouver une solution sur ce site non fréquenté.
Commercy dispose du centre de formation international baptisé Campus Cockerill. Est-ce que cet équipement est toujours opérationnel ?
L’État avait cédé à la Codecom pour l’euro symbolique l’ancien régiment (20 hectares de terrains/bâtiments) de la future friche militaire. Gérard Longuet qui était ministre de la Défense a pesé dans la venue du campus pour la formation des Saoudiens. Le groupe belge a investi 40 millions d’euros dans ce projet de Campus palace qui s’étend sur dix hectares. Aujourd’hui le contrat avec les Saoudiens s’est terminé fin 2024. Le groupe Cockerill dispose donc d’un site avec un auditorium de 170 places, des salles de cours et de réunion, des ateliers techniques mais également une structure résidentielle haut de gamme. Au-delà de leur formation, il va falloir faire vivre ce site. Je ne voudrais pas que l’ancienne friche militaire évitée ne se transforme à l’avenir en friche industrielle.
Le départ du 8eme RA a eu une incidence sur la démographie avec une baisse notable de la population (6 400 habitants en 2008 contre 5 319 en 2021 selon l’Insee). Quelle est la dernière tendance ?
Le recensement 2024 nous annonce officiellement l’arrêt de l’hémorragie avec 5610 habitants, après une longue phase descendante, soit une hausse de 300 personnes en plus par rapport à 2021. Le départ de 800 familles n’a pas été compensé par les 500 emplois de Safran-Albany. Les retombées ont été finalement constatées pour l’ensemble du territoire. Notre point faible reste aujourd’hui l’habitat. Nous n’avons pas la capacité d’accueillir à grande échelle.
Est-ce que Commercy profite toujours de cette bulle de dynamique économique ?
À une époque où les mauvaises nouvelles s’enchaînaient en Meuse en 2024 avec Stenpa du côté de Stenay, Bonduelle à Saint-Mihiel, nous, à Commercy, c’était l’inverse avec le projet d’agrandissement de l’usine de Safran-Albany qui devrait aboutir en 2027. Ce projet est synonyme de pérennisation mais aussi créateur d’emplois ; il donne de la perspective et fait souffler un vent d’optimisme. Commercy ne se porte pas mal.
J’ai toujours été optimiste, mais je dois dire qu’il y a de nombreux signes positifs que ce soient la fin de la baisse démographique ou encore l’installation de nombreuses enseignes nationales alors que nous sommes une petite ville. Commercy profite indéniablement d’une dynamique et d’une attirance vers Nancy. Le statut de sous-préfecture nous apporte beaucoup, que ce soient avec l’hôpital Saint-Charles sachant que nous sommes rattachés au GHT Sud Lorraine (avec le CHRU de Nancy), la présence de la gare, du centre des finances publiques ou du siège de plusieurs banques. Ce sont des marqueurs importants.
Quels sont les projets que vous souhaitez conduire avant la fin de votre mandat ?
On a déjà eu besoin de communiquer, de faire parler de Commercy. On a créé une mascotte, une signature olfactive, l’affiche vintage. On marque des points sur le marketing territorial. Derrière ce terme, c’est une question d’attractivité et d’image qui se jouent. En parallèle, nous avons un gros projet autour de la réhabilitation de la place de Gaulle qui est un des deux lieux de vie du centre-ville. On va mettre cinq millions d’euros dans ce projet avec la démolition de l’ancien immeuble du Bragui qu’on a acheté en 2023, puis dans la construction d’une halle ouverte pour aérer l’espace. Elle accueillera notamment le marché avec ouverture sur le parvis. On va transformer le parking pour le végétaliser. Aujourd’hui, les habitants viennent sur cette place pour se garer, demain, ce sera un véritable lieu de vie. On espère inaugurer en 2026. En tout état de cause, dans le contexte actuel, nous envoyons un signal en engageant ces travaux qui vont aussi profiter aux entreprises du bâtiment.
L’habitat
Initié en 2012 et labellisé en 2016, le projet d’écoquartier Le Clos des Capucins a été profondément remanié. «Il ne correspondait pas aux demandes de la population locale, car nous étions sur des petites parcelles, des maisons en bois…
Nous avons dû l’adapter en réduisant les contraintes. Il reste quelques surfaces disponibles. L’idée est désormais de remplir les dents creuses et de ne pas s’étendre pour créer de nouveaux lotissements, comme l’exige la loi zéro artificialisation nette», explique Jean-Philippe Vautrin, le maire. Pour y parvenir, la municipalité a fait le choix d’engager un programme de réhabilitation de l’habitat de centre-ville avec une politique offensive en rachetant les immeubles délabrés si les propriétaires n’investissent pas dans des travaux puis de les revendre. Reste un point faible ! aucune offre pour les célibataires ou les jeunes. La mairie travaille actuellement autour d’une réflexion pour installer un foyer de jeunes travailleurs. C’est une piste de développement.