Cannes: Serebrennikov présente sa créature "Limonov" et Costner sa saga western

Le cinéaste russe en exil Kirill Serebrennikov s'est lancé  dans la course à la Palme d'or avec son biopic rock sur les 1.000 vies d'Edouard Limonov, lors d'une journée également marquée par la saga western de Kevin Costner...

 © Clotilde GOURLET
© Clotilde GOURLET

Le cinéaste russe en exil Kirill Serebrennikov s'est lancé  dans la course à la Palme d'or avec son biopic rock sur les 1.000 vies d'Edouard Limonov, lors d'une journée également marquée par la saga western de Kevin Costner et un film d'horreur féministe avec Demi Moore.

"Limonov, la ballade" est l'adaptation du roman d'Emmanuel Carrère, qui a fait découvrir au public ce personnage inclassable, mi-ombre mi-lumière, mort en 2020 à 77 ans. 

Limonov a été tour à tour voyou en Ukraine, poète nouvelle garde anti-soviétique à Moscou, loser au cœur brisé à New York, écrivain adulé à Paris, mercenaire dans les Balkans et à Moscou de nouveau, le chef d'un parti de jeunes révolutionnaires rouge-brun anti-Poutine, qui lui vaudra le pénitencier glacé.

La performance autour du thème de l'artiste maudit et de l'exil est entièrement portée par le Britannique Ben Wishaw (Q dans James Bond), qui se glisse en anglais avec les "r" roulés dans la peau du personnage. 

Kirill Serebrennikov lui a confié qu'il voyait dans ce film la possibilité d'un "autoportrait". 

Stone sur Lula

Considéré comme un des artistes russes les plus audacieux de sa génération, le metteur en scène et réalisateur a profité un temps des faveurs du pouvoir.

Devenu encombrant pour ses positions anti-conservateurs et pro-LGBT, il finit assigné à résidence en 2017. La sentence lui est signifiée en plein tournage de "Leto", présenté à Cannes en 2018.

Le projet Limonov a été entamé dans la foulée. La guerre en Ukraine est encore lointaine mais, en février 2022, le tournage prévu à Moscou s'interrompt et l'équipe se redéploie en urgence en Lettonie. 

Le script a évolué pour inclure de plus en plus de messages sur la Russie d'aujourd'hui et d'hier, et le monde russe d'avant si cher à Poutine qui "était un chaos total et en cela follement amusant", dit dans le film Limonov.

Côté documentaire, le réalisateur américain Oliver Stone a présenté hors compétition "Lula", son documentaire sur le président brésilien. Une véritable déclaration d'amour et d'adhésion au leader sud-américain.

"Ce film porte sur une personne spéciale", "un leader unique". "J'admire profondément cet homme", a confié aux spectateurs avant la projection Oliver Stone qui a tourné en cinq décennies plusieurs œuvres de fiction et documentaires liés à l'Amérique latine, à commencer par "Salvador" (1986).

Il a également tourné "Comandante" (2003) sur Fidel Castro et "My Friend Hugo" (2014) sur l'ancien président vénézuélien Hugo Chavez.

Dans la soirée, "The Substance" de la Française Coralie Fargeat, un film d'horreur féministe, promet un moment gore avec Demi Moore qui cherche à obtenir grâce à la substance du titre la meilleure version d'elle-même.

Liberté folle

Autre film féministe, cette fois-ci hors compétition, celui de la Française Noémie Merlant: "Les femmes au balcon". Une belle charge contre le patriarcat toxique, tourné avec une liberté folle.

Kevin Costner est venu montrer son bébé pour lequel il a confié à l'AFP avoir dû, comme Francis Ford Coppola, engager sa fortune personnelle, en hypothéquant "sa maison". 

"Horizon: An American saga", est un western qui veut se décliner en plusieurs volets et que l'acteur a commencé à écrire il y a... 36 ans. 

A quasiment mi-parcours de la compétition, de nombreux critiques prédisent un prix à "Emilia Perez" de Jacques Audiard, film hors du commun sur un baron de la drogue mexicain qui change de vie et devient une femme. Voire une deuxième Palme d'or pour son réalisateur.

"Une Palme, c'est déjà très bien", a commenté le réalisateur. Mais remettre un prix à l'actrice transgenre Karla Sofía Gascón, "ce serait fort, ce serait intelligent !", a-t-il ajouté lors d'une rencontre avec des journalistes.

"Comme une rose qui fleurit au milieu d'un champ de mines, c'est un miracle que +Emilia Perez+ de Jacques Audiard existe", s'émerveille Variety aux Etats-Unis, quand le Guardian au Royaume-Uni salue "une histoire totalement invraisemblable (...) portée par une énergie kitsch à la Broadway". 

En France, Le Figaro est ressorti enchanté de ce film sur la transidentité qui casse les codes machistes, et prévoit que "cette épopée brûlante vers la rédemption (...) fera bouger les choses".

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