Budget 2024: le Sénat en quête d'économies, face au gouvernement

Dépenses rabotées à l'horizon: le Sénat, dominé par l'opposition de droite, s'est attaqué jeudi au budget du gouvernement pour 2024 avec la ferme intention de dégager des économies, mais l'exécutif pourra...

L'hémicycle du Sénat pendant un débat le 14 novembre 2023 © Geoffroy Van der Hasselt
L'hémicycle du Sénat pendant un débat le 14 novembre 2023 © Geoffroy Van der Hasselt

Dépenses rabotées à l'horizon: le Sénat, dominé par l'opposition de droite, s'est attaqué jeudi au budget du gouvernement pour 2024 avec la ferme intention de dégager des économies, mais l'exécutif pourra balayer ses propositions d'un revers de manche.

Les sénateurs sont lancés pour près de trois semaines d'intenses débats budgétaires à la chambre haute avant le vote solennel prévu le 12 décembre sur ce projet de loi de finances pour 2024 (PLF).

Ce budget a déjà connu un parcours parlementaire tumultueux avant son arrivée au Palais du Luxembourg: le gouvernement, sans majorité absolue à l'Assemblée nationale, a dû recourir par deux fois à l'article 49.3 de la Constitution pour le faire adopter sans vote, écourtant les débats dans l'hémicycle.

L'exécutif, qui a résisté sans mal aux motions de censure des oppositions au Parlement, est désormais dans l'œil de Bruxelles pour tenir ses engagements. Et Bercy attend avec anxiété la décision de l'agence Standard and Poor's sur la note de la dette française, le 1er décembre.

Cause toujours

Dans ce contexte, "les sénateurs sont les bienvenus pour proposer des économies supplémentaires, ils auront toujours une oreille attentive de ma part", a déclaré le ministre de l'Economie Bruno Le Maire, défendant son budget à 16 milliards d'économies, un déficit ramené en 2024 à 4,4% du PIB. 

Cela tombe bien, le Sénat, à majorité de droite et du centre, semble plus déterminé que jamais à rétablir l'équilibre budgétaire.

"Les finances publiques sont dans le rouge cramoisi", s'alarme le rapporteur général du budget Jean-François Husson (Les Républicains), s'inquiétant d'un budget "irresponsable" et promettant de trouver "plus de 5 milliards d'euros d'économies".

Problème: rien n'assure que l'exécutif conservera la moindre des mesures votées à la chambre haute. Le texte semble promis au 49.3 lors d'une nouvelle lecture à l'Assemblée nationale en décembre et le gouvernement pourra retenir uniquement les amendements qui lui conviennent.

"Le gouvernement doit nous entendre !" s'indigne M. Husson, "s'il ne le fait pas, c'est qu'il a des œillères et qu'il a déjà perdu la partie".

"Personne n'est dupe. A l'Assemblée, le gouvernement dit +taisez-vous!+, et au Sénat +Cause toujours+", a regretté l'écologiste Thomas Dossus.

Collectivités bichonnées

Un accord Sénat-exécutif semble tout de même en bonne voie sur le bouclier tarifaire sur l'électricité des ménages: l'exécutif souhaite le maintenir à grande échelle en 2024, la droite sénatoriale propose elle de le restreindre en ciblant seulement "les bas revenus", avec un milliard d'euros d'économies à la clé.

"Nous sommes prêts à reprendre" cette "bonne proposition", à condition que "les tarifs n'augmentent pas de plus de 10% en février 2024", a affirmé Bruno Le Maire.

Le groupe centriste, allié des LR au Sénat, compte bien pour sa part se distinguer de la droite en portant des mesures de "justice fiscale": le sénateur Bernard Delcros a appelé à "une plus grande solidarité des plus fortunés" et proposera de taxer les "superprofits" et les rachats d'actions des grandes entreprises. Il aura du soutien à gauche de l'hémicycle.

Le logement, considéré comme une "bombe sociale" par de nombreux parlementaires, sera l'un des points centraux de ce budget, tout comme les collectivités locales, souvent bichonnées par la "chambre des territoires".

Une enveloppe exceptionnelle de 100 millions d'euros pour les départements sera proposée par la majorité sénatoriale, alors que de nombreux maires défilent ces derniers jours au Sénat en marge de leur Congrès à Paris.

Une fois n'est pas coutume, le Sénat défendra très largement une taxe, baptisée "taxe streaming", visant à faire contribuer les plateformes de musique en ligne pour financer le Centre national de la musique (CNM).

Enfin, un amendement inédit a été déposé par plusieurs groupes politiques pour introduire un "prix minimum unitaire" de l'alcool, une mesure de santé publique qui entend cibler la consommation excessive tout en préservant la filière viticole locale, dont le lobby est bien implanté au Palais du Luxembourg.

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