Brexit : pas l'apocalypse économique annoncée sur la Côte d'Opale ?
Avant l'entrée en vigueur du Brexit, le Medef Côte d'Opale, qui a un rôle de conseil auprès des entreprises, se veut rassurant concernant le divorce entre le Royaume-Uni et l'UE.
La Gazette : Le Brexit est imminent, et personne ne sait quelle en sera l’issue, ni quand il interviendra. Comment est-ce que les entreprises se préparent à ce divorce entre le Royaume-Uni et l’Union européenne ?
Franck Helias, Medef Côte d’Opale : On part vers une séparation, et je pense que le scénario de base est le Brexit dur, sans accord. On s’apprête majoritairement à considérer la Grande-Bretagne comme un pays tiers, comme on le fait avec le Canada par exemple.
Fallait-il être pessimiste pour se préparer le mieux possible à l’entrée en vigueur du Brexit ?
On n’a pas rencontré de dirigeant particulièrement pessimiste. Par contre, tout le monde est conscient qu’il y a un certain nombre de mesures à reprendre ou à prendre, comme si on commerçait avec un pays tiers. Pour les entreprises, ce sera certainement des coûts supplémentaires éventuels à répercuter à des clients. Reste à voir comment tout peut se marier correctement.
Quelle est la typologie des entreprises les plus concernées, celles qui exportent, qui importent ?
À l’export, il y aura un certain nombre de démarches à prendre. On ne connaît pas encore la teneur des accords futurs au point de vue douanier. Les différentes branches n’ont pas toutes les informations malgré les tendances qui se dégagent. Par rapport à l’export, pareil. On sait comment sont les règles quand on est en Europe, il en reste à déterminer. C’est sûr qu’au niveau européen, la Côte d’Opale est une porte d’entrée. En face de nous, nous aurons un pays tiers. On aura donc une frontière de l’Europe ici, à Calais.
Comment fait-on pour conseiller les entreprises pendant trois ans alors qu’on ne connaît pas l’issue de cet événement à venir ?
Ce sont les Britanniques qui quittent l’Europe, nous n’avons pas la main. Ils décident ; aujourd’hui, on connaît les règles européennes ; nous nous adapterons, comme l’entreprise a l’habitude de le faire. Il faut avoir des infrastructures qui seront en mesure de gérer les aléas, les nouvelles règles. Nous sommes attentifs par rapport à la mise en place de différentes infrastructures sur la Côte d’Opale, pour les produits de la mer ou d’autres activités.
À vous entendre, on dirait que l’apocalypse annoncée n’aura pas lieu concernant l’économie…
Il y a beaucoup d’entreprises françaises qui exportent plutôt en Europe. Il faudra réapprendre à exporter en dehors de l’Europe. Les autres, qui exportent déjà en dehors de l’Europe, n’auront pas trop de problèmes. Au final, il y aura surtout une période d’inconfort, d’adaptation. Je pense que les Britanniques n’ont pas intérêt à ce que les choses se passent mal, même si on n’est pas rassuré par les décisions qui sont prises, notamment à Londres.
Parmi les entreprises les plus concernées, on compte les transporteurs bien sûr, mais aussi l’industrie automobile…
Ce que j’entends du secteur automobile, c’est que c’est un système d’assemblage au niveau européen. Il y a beaucoup de flux interdépendants et la même pièce peut passer la même frontière à plusieurs reprises. Les chaînes de production fonctionnent à flux tendu, donc on ne peut pas se permettre d’avoir du stock ou que des camions arrivent en retard… Je pense qu’il y a certaines industries comme celles-là qui sont réglées comme des horloges et qui vont devoir s’adapter aux aléas qui vont arriver. Il faut être prudent, c’est au cas par cas, il faut observer attentivement ce qui va se passer. Je suis confiant, je pense qu’on saura s’adapter et qu’on aura une période de transition acceptable. Il faut savoir que depuis le référendum de 2016, il y a eu une incidence sur les entreprises. Il y a eu des pertes financières mesurées, en décembre 2018, à 6 milliards d’euros (étude de Euler Hermes) depuis le début du processus Brexit.
L’incertitude liée au Brexit pourrait faire plus de dégâts que le Brexit en lui-même. C’était à prévoir ?
Ce n’est pas inhabituel : les Britanniques ont une monnaie différente de la nôtre. Le problème est principalement lié à des aspects de change. Quand la livre perd 12 à 15%, l’impact est important, surtout si l’on a des contrats définis en devise. Ce sont des impacts mesurables et factuels.