Bilan et perspectives du marché immobilier

Le marché immobilier résidentiel en 2013 suivra-t-il le mouvement entamé de l’année passée, avec une baisse généralisée des transactions ? Tour d’horizon régional.

Certains quartiers de Lille, comme Euralille ou encore Saint-Sauveur vont se développer ou être réhabilités.
Certains quartiers de Lille, comme Euralille ou encore Saint-Sauveur vont se développer ou être réhabilités.
Loger Habitat

Carré Rameau à Lille.

Malgré une résistance des prix du marché dans les zones tendues et une baisse généralisée au sein de toutes les autres, le volume des transactions s’est enlisé, accompagné d’une hausse des délais des ventes. Les promoteurs, quant à eux, connaissent un repli des réservations nettes et une offre commerciale au ralenti. Si l’année 2012 affiche des résultats en baisse, le bilan est moins atrophié que prévu. Et 2013, bousculée par de nouvelles réglementations, verra peut-être davantage d’acquéreurs se bousculer au portillon des banques et ainsi franchir le pas. Mais la route semble longue avant d’atteindre un nouveau virage. Le secteur, en période tendue, est cette année contraint à de nouvelles mutations afin de relancer l’accession à la propriété. La loi Duflot, le PTZ +, les nouvelles lois fiscales auront-elles raison d’une tendance touchée par un fort attentisme des ménages, d’une perte de confiance des investisseurs et d’un secteur réfréné?

Une baisse généralisée des ventes. Si le secteur immobilier semble marquer une pause tant dans l’Hexagone qu’en région, le dynamisme porté principalement par la métropole européenne attire toujours de nouveaux habitants. La demande ne devrait ainsi pas s’amoindrir complètement, le territoire du Nord-Pas-de-Calais étant le troisième marché immobilier français. «Nous constatons une forte inquiétude et un attentisme de la part de nos clients. Mais, au final, si la France a fait face à une chute de 24% des transactions en 2012, le groupe Nord de France immobilier a mieux résisté, avec une baisse de 6%. De ce fait, nous restons optimistes pour 2013», précise Annick Hameau, directrice générale du réseau d’agences immobilières MSI et directrice communication de NDFI. Et de poursuivre : «Le prix moyen au mètre carré avoisine 1 662 euros sur le territoire régional, alors qu’en France il est de 2 614 euros. D’autre part, le montant moyen d’une transaction sur le territoire national s’élève à 202 136 euros contre 147 928 euros en région.»

Côté ventes, la communauté urbaine de Lille affiche 14 000 transactions en 2012 dans l’ancien, soit une baisse de 20% par rapport à 2011, selon l’étude annuelle du Crédit foncier. Par ailleurs, à Lille, 1 953 déclarations d’intention d’aliéner ont été enregistrées contre 2 430 un an avant. «Les ventes sont en baisse malgré une stabilisation globale des prix sur le territoire, voire une récession légère en grande banlieue. Excepté au cœur du centre-ville de Lille, qui a connu une légère augmentation de 1,7%, et deux quartiers prisés tels que le Vieux-Lille et République, avec respectivement une inflammation des prix de  9,3% et 10,7%. Cependant, ces chiffres sont à prendre avec des pincettes car différents critères rentrent en compte, dont une typologie des biens qui n’est pas reproductible», explique Georges Haussy, directeur régional des expertises du Crédit foncier en Nord-Pas-de-Calais. La rareté de certains logements n’a alors pas de prix.

Quant au marché des maisons individuelles, seule la métropole lilloise a tiré son épingle du jeu avec une hausse accrue de 5%, englobant les communautés environnantes et les quartiers du centre (République, Saint-Michel, Vauban) où les habitations bourgeoises anciennes sont très recherchées. Cependant, cette progression n’a pas suffi à compenser la chute des ventes aux investisseurs. Ailleurs dans la région, les ventes ont diminué à hauteur de 3% (- 16% au niveau national). En 2013, la situation ne devrait pas s’améliorer. «Il existe un risque de recul assez fort, engendré par de multiples facteurs. A savoir des banques plus réfractaires aux prêts, le coût des constructions impacté par la nouvelle réglementation thermique et des aides fiscales rabotées», s’inquiète Olivier Leroux de Lens, délégué régional de l’Union des maisons françaises de la région Nord-Pas-de-Calais.

A une soixantaine de kilomètres de Lille, Valenciennes, la capitale du Hainaut français, n’a pas échappé à la crise. La moyenne des transactions est en repli par rapport à 2011, avec une baisse de volume à deux chiffres (environ 20%). Le prix des appartements neufs s’élève  à 3 000 euros le mètre carré contre 1 700 euros pour les appartements à rafraîchir. Concernant le marché des maisons anciennes, la demande reste suffisamment élevée en périphérie. Pour les demeures neuves, l’acheteur doit débourser entre 150 000 euros pour une maison en lotissement et 200 000 euros pour un bien individuel isolé. En revanche, s’il s’aventure dans les quartiers moins prisés, il est possible de faire une acquisition pour moins de 100 000 euros.

Sur la Côte d’Opale, la ville de Dunkerque est confrontée à une conjoncture difficile, tous biens confondus. Selon l’étude annuelle du Crédit foncier, le marché des appartements neufs souffre d’une diminution des ventes, notamment sur la part des investisseurs individuels qui soutenaient jusqu’alors le marché. Les transactions des logements anciens sont, quant à elles, en dents de scie, bien que le prix moyen se situe à 1 700 euros le mètre carré au sein d’un quartier agréable. Quant à Calais, le marché est presque atone dans le neuf et demeure actuellement très calme dans l’ancien. Les prix des appartements oscillent entre 1 000 et 2 000 euros le mètre carré. Pour la part des maisons individuelles, le volume des ventes a considérablement chuté alors que les offres ne cessent de croître et que les prix ont baissé de l’ordre de 5%. Une maison ancienne au cœur de Calais demande maximum 150 000 euros.

D’ailleurs, la clientèle de primo-accédants disposant aujourd’hui d’un budget moyen de 150 000 euros est exclue des biens de seconde main et en bon état. Avec la crise, les futurs acquéreurs ont une forte appétence pour les biens à rénover, et cela pour la totalité du parc existant en région et même en France.

 

D.R.

Aux alentours de Lille, si quelques grues sont visibles, le marché de la promotion est globalement en perte de vitesse.

Une promotion immobilière en repli.  Le Nord-Pas-de-Calais affiche un recul de 14% de réservations nettes pour  l’ensemble du Cecim qui regroupe 23 promoteurs de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) et les membres de l’ARH réalisant des opérations d’accession sociale. «Le département du Nord représente 92% du marché de la promotion, dont 90% pour Lille», précise Jean-Michel Sède, directeur de Loger habitat, président du Cecim Nord et ex-président de la FPI.

Autant dire que si Lille s’enrhume, c’est toute la région qui souffre. Le SCOT de Lille a enregistré une baisse de 24% en 2012 et de 9% le dernier trimestre 2012. Les chiffres ne mentent pas. «Pour la FPI, 1 400  ventes de logements ont été enregistrées sur le SCOT de Lille comprenant les opérations sur plan ou en cours de construction, contre 1 900 en 2011. Par ailleurs, ce périmètre enregistre 1 915 offres disponibles», ajoute-t-il. Actuellement, les mises en chantier comme les autorisations de construire sont en forte diminution. Seulement 40% des 2 100 offres commerciales sont en cours de construction… Un retard dans les stocks qui ne va pas se tarir en 2013. «Pour l’année en cours, la profession risque d’observer une commercialisation beaucoup moins rapide», estime le promoteur. Mais si les ventes aux utilisateurs résistent encore assez bien, ce n’est pas le même dynamisme du côté des investisseurs individuels qui achètent pour louer.

 

 

D.R.

Certains quartiers de Lille, comme Euralille ou encore Saint-Sauveur, vont se développer ou être réhabilités.

Des prévisions 2013 en sursis.  Si les stocks sont faibles et que la promotion est entrée dans une phase de repli face à un marché en contraction, que dire des prévisions 2013 ? «Difficile d’estimer ce que sera le marché de la promotion immobilière en 2013 et encore plus en 2014. Une chose est sûre, c’est que l’immobilier nécessite la confiance de la part des acheteurs potentiels afin qu’ils se projettent dans une nouvelle acquisition. Et à ce sujet l’ambiance actuelle n’est pas très favorable», exprime Jean-Michel Sède. «En revanche les critères objectifs comme loi fiscale Duflot, les taux d’intérêt très bas, la qualité des produits proposés avec des performances énergétiques importantes sont des éléments positifs qui doivent aider au développement de l’activité», poursuit-il. Cependant, tant que toutes les nouvelles réglementations ne seront pas effectives par décret d’application, le plan d’actions des promoteurs est largement réduit. Pourtant, de nombreuses opérations sont dans les tuyaux comme EuraTechnologies, Lille-Sud, Lille-Fives, Euralille, Saint-Sauveur. Du côté des investisseurs, le marché des appartements neufs connaît une forte dégradation des réservations en collectif sur le SCOT de Lille, dû à une forte baisse des ventes. Une part qui représentait 33% des ventes globales en 2012. «L’attentisme est aussi de rigueur chez les investisseurs. Notre attention est portée sur les nouveaux dispositifs», conclut Jean-Michel Sède.

 

Les aides fiscales, pour le meilleur ou le pire.  La loi Duflot succède donc à la loi Scellier depuis janvier. Ce nouveau dispositif, parmi d’autres, va-t-il donner un nouveau souffle et permettre un regain d’activité ? Dans les prochains jours, les décisions gouvernementales devraient s’éclaircir. De son côté, Annick Hameau voit dans cette loi un certain bénéfice. «La loi Duflot est plus positive que ce que l’on craignait, et plus attractive que la loi Scellier, surtout au niveau des biens de moins de 50 m2 situés dans la zone B2», explique-t-elle.

Mais concernant l’accession sociale, les acteurs de l’immobilier n’entonne pas le même refrain. Selon Jean-Michel Sède, elle est en voie de développement : «L’accession sociale progresse parce qu’elle répond à une demande forte et que plusieurs collectivités développent des dispositifs pour l’accompagner. Le PTZ+ a également contribué à la commercialisation de ces produits.» De son côté, Olivier Leroux de Lens estime qu’elle est en perte de vitesse : «Nous attendons que toutes les lignes du plan logement soient fixées afin de redonner un coup de pouce à l’accession. Nous réclamons plus d’aides aux logements et une reconfiguration du PTZ + dans les zones C, ainsi qu’un assouplissement général de la RT 2012. C’est pour l’instant en discussion.» De son côté, Georges Haussy invite à repenser l’offre globale de la promotion : «Il faudrait adapter les produits par rapport aux capacités financières des futurs acquéreurs.» Autrement dit revoir la fiscalité ou les coûts de construction.

 

Acheter, c’est investir sur le long terme. Globalement, l’année 2013 devrait-elle prétendre ainsi à une augmentation de l’accession? Pour les futurs acquéreurs, il sera somme toute difficile de réaliser des plus-values à court terme. Mais miser sur la pierre peut rapporter gros, à condition d’investir dans un secteur d’avenir, par exemple les quartiers Lille-Sud et Saint-Sauveur à Lille, en pleine rénovation, et une majeure partie du quartier Beaux-Marais à Calais. Selon une étude de l’Observatoire du moral immobilier Logic–immo.com publiée en février dernier, deux acquéreurs sur trois attendent encore une baisse des prix de l’offre (à hauteur de 10%) avant de passer à l’acte. Cependant, le marché de l’immobilier n’est pas encore atone dans l’ensemble de l’Hexagone et en région. Puis, si la conjoncture économique plonge les Français dans une morosité ambiante et que les ménages reculent devant les méandres de l’investissement, la pierre reste cependant une valeur de refuge : 68% des Français confirment que l’investissement immobilier reste le meilleur moyen de placer une épargne, de développer un patrimoine ou d’assurer un revenu. «Alors que l’actualité évoque la problématique du financement des retraites, l’immobilier reste un bon moyen de s’assurer, sur le long terme, des revenus complémentaires», conclut Jean-Michel Sède.

 

Lire aussi le dossier spécial immobilier dans notre magazine Grand Lille Déco n°2.