Bilan de la COP26 : timides avancées en matière de sortie des énergies fossiles
La 26e Conférence des Parties sur le réchauffement climatique s’est achevée le 13 novembre à Glasgow (Ecosse) sur une résolution finale en demi-teinte. Les acteurs économiques des Hauts-de-France étaient sur place, jouant leur rôle d’influence auprès des négociateurs.
Le 13 novembre au soir, la résolution finale tombait, baptisée «Pacte de Glasgow pour le climat». Si l’on peut se réjouir d’un consensus signé, celui-ci reste au rabais concernant le soutien financier aux pays vulnérables. Il y a eu quelques annonces pour le financement de l’adaptation. Mais les 100 Mds$ promis par an ne seront toujours pas atteints en 2023. Et de nombreux pays, dont la France, ont mis un frein pour créer un mécanisme additionnel de financement des pertes et dommages, pour pallier les conséquences irréversibles du changement climatique (seules les régions d’Ecosse et de Wallonie débloquent chacune 1 M€ à ce sujet). Une négociation va tout de même s’enclencher sur les deux prochaines années pour trouver une solution.
Pour la première fois, la sortie des énergies fossiles est clairement mentionnée dans la déclaration finale, mais sans calendrier. Les négociations ont abouti sur l’article 6 de l’Accord de Paris, concernant le fonctionnement des marchés carbone au niveau global, avec quelques garanties sur le respect des droits humains. Le texte appelle également les Etats membres à relever leurs engagements de réduction d’émissions des gaz à effet de serre (GES) plus régulièrement que dans l’Accord de Paris. Pas contre, l’article 13 sur les outils de transparence et de suivi des engagements des pays n’a toujours pas abouti. Enfin, c’est la première COP qui fait le lien entre la nécessité de protéger la nature et de respecter l’objectif de l’Accord de Paris.
Succès en demi-teinte
Pour Aurore Mathieu du Réseau action climat, «cette COP reflète les priorités des pays riches» tandis que pour le climatologue, Jean Jouzel, ça reste un échec : «On est partis pour avoir deux fois trop d’émissions de GES pour pouvoir rester sur une trajectoire de 1,5 degré.» Cependant, il y a eu des avancées selon lui, «notamment une vraie reconnaissance du rapport du GIEC qui défend la nécessité de limiter le réchauffement à 1,5 degré et qui est aujourd’hui l’objectif de tous. Et c’est la première fois que l’on parle autant de la sortie des énergies fossiles, de l’arrêt de la déforestation et de la nécessité d’une neutralité carbone en 2050». Neutralité carbone qui, pour certains pays, est associée à une modernisation économique.
De nouvelles coalitions de pays hors Accord de Paris
Au-delà de cette résolution finale, cette COP s’est montrée ambitieuse sur d’autres aspects. Le nombre imprévu de nouvelles coalitions de pays - dont la France - s’engageant sur des thématiques bien spécifiques : la fin de la déforestation d’ici 2030 pour une centaine de pays, la sortie du charbon pour 23 pays d’ici 2030 (dont le Canada et la Pologne), la réduction du méthane à hauteur de 30%, la fin du financement public à l’international des projets d’exploitation d’énergie fossile pour 34 pays - d’ici 2022 pour le charbon, 2035 pour le pétrole et 2035 pour le gaz. Mais restons prudents : ces campagnes de mobilisation sont non contraignantes car en-dehors de l’Accord de Paris et des négociation onusiennes.
Tous considèrent en tout cas le rôle essentiel des COP : aujourd’hui, il n’y a pas d’alternative possible pour rassembler 39 000 personnes de 196 pays et l’UE de façon efficace. Prochain rendez-vous : la COP27 en Egypte en 2022.
L’Institut d’élevage d’Arras défend les pratiques bas carbone
Depuis 2012, l’Institut est engagé dans une démarche bas carbone qui accompagne les éleveurs, soit dans la diminution des GES (via l’utilisation d’additifs naturels dans l’alimentation du bétail pour réduire l’émission de méthane, la réduction du protoxyde d’azote par le biais de la gestion des effluents, la réduction d’électricité et de fioul, moins de soja venant du Brésil), soit dans le stockage du carbone (agriculture intermédiaire, gestion des prairies). Cela concerne 15 000 producteurs au niveau national et 1 300 personnes formées aux outils. Cette démarche est également pratiquée dans d’autres pays du monde, notamment au Brésil.
Jean-Baptiste Dollé, responsable du service environnement, est venu à la COP présenter l’initiative. «Nous sommes le premier pays européen en termes d’agriculteurs engagés et nos résultats sont très attendus. L’intérêt de venir à la COP, c’est de toucher aussi un autre public, autre que celui des professionnels et des scientifiques. Nous rencontrons ainsi les ONG, qui critiquent régulièrement l’agriculture et les éleveurs pour leur contribution aux émissions des GES. Il s’agit de leur montrer que ce secteur peut aussi être une source de solutions pour réduire l’emballement climatique.»
Dunkerque interpelle sur les questions de l'eau
La Communauté urbaine est à l’origine du projet «Raréfaction, qualité et gestion de l’eau : 14 solutions concrètes portées à Glasgow», en coopération avec l'ONG Green Cross France et Territoires, le Syndicat de l’eau du Dunkerquois et l’Unesco. Dans la continuité de l'Accord de Paris, ce document donne des pistes pour faire en sorte que l’eau soit disponible pour tous, avec un niveau de qualité satisfaisant et une utilisation raisonnée, notamment par le monde agricole et industriel : économie circulaire de l’eau, gouvernance participative citoyenne, changement des pratiques agricoles, évolution des usages... Ces propositions ont vocation à inspirer les négociateurs de l’Accord de Paris et à être dupliquées par d’autres villes du monde.
Nicolas Imbert, directeur de l’ONG Green Cross, s’est fait le porte-voix de ces propositions à la COP26. Il a pu échanger à ce sujet avec la jeune activité Suédoise Greta Thunberg, mais aussi avec d'autres collectivités locales et acteurs internationaux de l'eau. Il explique comment ces propositions ont été accueillies à la COP 26. «Elles ont fait écho aux propos de l’ancien président des Etats-Unis Barak Obama, qui s’est déplacé à la COP. Ce dernier a insisté sur une meilleure gestion de l’eau pour faire face aux catastrophes climatiques. Et nos propositions ont franchi une nouvelle étape, avec une officialisation du texte vis-à-vis de la Conférence des parties.»
Nausicaà se mobilise sur la question des océans
L’aquarium régional a toujours été présent aux différentes COP. Cette année, un partenariat a été noué avec le Youth4Ocean Forum, un collectif de 195 jeunes Européens de 16 à 30 ans qui se mobilisent pour maintenir l’océan en bonne santé. Ces jeunes n’ont pas fait que manifester dans les rues de Glasgow. Certains ont pu aller à la rencontre des négociateurs au coeur de la COP26, pour les sensibiliser notamment sur la protection des océans, et défendre le point de vue des jeunes concernant la question des 30% d’aires marines protégées pour 2030 ou des financements pour les océans. Ils ont également contribué à un rapport sur l’océan et l’action climatique. Ils sont venus aussi en tant qu’observateurs pour comprendre ce qui se passe.
La Lilloise Salomé Mormentyn, membre du Youth4Ocean Forum, partage ses impressions sur place. «J’ai trouvé que cela ne se mélangeait pas beaucoup : il y a d’un côté les jeunes, de l’autre côté les négociateurs. Je comprends les frustrations des jeunes qui défilent dans la rue. Mais parallèlement, je pense que c’est une belle occasion d’être au coeur des négociations pour se faire entendre.»