Avenir de la profession d’avocat : les premiers résultats de la consultation
Les résultats de la consultation organisée par le Conseil national des barreaux (CNB) ont été dévoilés fin juin, en clôture des États généraux de l’avenir de la profession d’avocat. Retour sur le cheminement de cette initiative inédite et sur son bilan.
Ce 27 juin 2019 «est une date dans l’aventure collective de notre profession», a déclaré la présidente du CNB, Christiane Féral-Schuhl, à l’issue de la proclamation des résultats de la consultation nationale organisée par l’institution représentative des avocats. Une initiative dont «l’objectif était de donner la parole à tous» car «pour moi, ce qu’il y a de plus important, c’est de construire ensemble la vision que nous avons de cette profession», a-t-elle relevé. «Plus d’un avocat sur dix a voté», et «ceux qui n’ont pas répondu ont définitivement perdu le droit de se plaindre de leurs institutions». Et si l’objectif de cet exercice de démocratie directe «n’est pas de supprimer les élus», a-t-elle souligné, «il est important de vérifier que nous poursuivons le même rêve, celui de restaurer la fierté d’appartenir à cette profession».
Une consultation par étapes
Avocats et élèves avocats ont, dans un premier temps, été invités à définir les thématiques prioritaires pour construire la profession de demain, au cours d’une consultation en ligne organisée du 16 novembre 2018 au 31 janvier 2019 et sur la base d’une trentaine de propositions initiales. Cette première phase a recueilli plus de 1 400 contributions et plus de 140 nouvelles propositions. Les thèmes retenus ont été répartis entre quatre groupes de travail, chargés de formuler des propositions concrètes autour de quatre grands sujets : l’identité de l’avocat, la qualité de la prestation, la compétitivité des cabinets, et enfin, l’unité de la profession. Les 40 propositions élaborées par ces groupes de travail ont ensuite été soumises à une seconde consultation en ligne, du 5 au 27 juin, date des États généraux de l’avenir de la profession, à l’issue desquels les résultats ont été dévoilés. 7 692 avocats et élèves avocats ont participé à cette deuxième consultation.
Identité de l’avocat
Trois des dix propositions du groupe de travail sur l’identité de l’avocat ont emporté une forte adhésion des votants (autour de 80%) : institutionnaliser la place de l’avocat dans le fonctionnement des juridictions par une réforme du code de l’organisation judiciaire, rédiger les impératifs de fonctionnement de la profession opposables à l’ensemble des juridictions sur le territoire national, et assortir l’acte d’avocat, issu d’un mode alternatif de règlement des différends, de la force exécutoire et de la signature électronique.
Qualité des prestations
Cinq des propositions du groupe de travail sur la qualité de la prestation ont également convaincu plus de la moitié des votants : renforcer la professionnalisation en aménageant une alternance entre les enseignements et une expérience professionnalisante pour les élèves avocats, mettre en place un programme de parrainage «très jeune barreau» dès l’entrée à l’école et jusqu’au début de l’exercice professionnel, instaurer un contrôle a posteriori par les Ordres des conditions d’exécution du contrat de collaboration libérale, harmoniser la durée du congé paternité au sein de la profession, en la fixant à quatre semaines pouvant être réparties pendant une période de six mois suivant l’arrivée de l’enfant, et instaurer un droit à la déconnexion pour les avocats collaborateurs.
Compétitivité des cabinets
Les votants ont écarté cinq des propositions du groupe de travail sur la compétitivité des cabinets : permettre la rémunération de l’avocat exclusivement au résultat, dématérialiser le cabinet d’avocat en permettant une domiciliation permanente au sein des ordres, permettre l’ouverture du capital des cabinets d’avocats, de façon minoritaire, à d’autres acteurs que les professions juridiques, judiciaires et du chiffre, permettre un nouveau mode d’exercice de l’avocat en entreprise, avec les garanties d’indépendance et de secret et sans possibilité de plaider, autoriser la rémunération de l’apport d’affaires de l’avocat envers les tiers ou autoriser la rémunération de l’apport d’affaires des tiers envers l’avocat, dans le cadre de leur propre activité accessoire. Ils se sont en revanche déclarés favorables à l’idée de donner la force exécutoire aux ordonnances de taxation du bâtonnier, de fixer un taux de TVA à 5,5% à tous les honoraires d’avocat, d’élaborer une grille de cotisations ordinales proportionnelle aux revenus de l’avocat ou d’exonérer d’impôt les indemnisations versées au titre de l’AJ, aide juridictionnelle (ou à tout le moins de l’assujettissement à charges sociales dans la limite d’un plafond).
Unité de la profession
Seules quatre des dix propositions du groupe de travail sur l’unité de la profession ont emporté une adhésion majoritaire des votants : élire le président du Conseil national des barreaux au suffrage universel direct, créer un guichet d’accès numérique unique pour tous les organismes techniques de la profession, ouvrir à chaque un espace de travail numérique personnel avec activation de son profil sur la plateforme avocat.fr, et faire assurer par le CNB le recensement et la publication (après anonymisation) des décisions rendues par les conseils régionaux de discipline.
Des pistes pour dessiner l’avenir de la profession
Une nouvelle étape de cette consultation nationale de la profession d’avocat va s’ouvrir dès la rentrée de septembre. Ces premiers résultats vont être présentés et soumis à la réflexion des élus du CNB. Objectif : «présenter des propositions de réforme à la Convention nationale des avocats en 2020», a expliqué la présidente Christiane Féral-Schuhl. «La politique consiste à faire des choix et vos élus ont pour mission de faire bouger les lignes», a-t-elle déclaré.