Chambre de commerce et d'industrie des Vosges
Anne-Christine Frère, la facilitatrice
Élue en novembre dernier à la tête de la CCI des Vosges, Anne-Christine Frère prend les commandes d’un navire consulaire naviguant dans des eaux conjoncturelles agitées où l’accompagnement de ses entreprises ressortissantes n’a jamais eu, ou presque, autant d’importance face aux défis actuels.

Ils sont là savamment accrochés dans le petit salon d’accueil tenant une compagnie silencieuse et mémorielle renforcée par le choix du noir et blanc dans les photos de ces anciens présidents de la Chambre de commerce et d’industrie des Vosges. Un petit pan de l’histoire consulaire vosgienne défile sous les yeux des visiteurs du jour dans le flux lumineux passant au travers des vitraux Gruber. Gérard Claudel viendra bientôt compléter la galerie de portraits. Président de la chambre consulaire vosgienne depuis 2011, il a décidé de passer la main, en novembre dernier, deux ans avant la fin de son troisième mandat. D
ans le bureau adjacent, au siège spinalien de la CCI des Vosges en ce début d’après-midi de fin janvier, sa successeuse, Anne-Christine Frère est «consciente de la responsabilité de sa tâche», comme elle l’a assuré à l’occasion de son élection en fin d’année dernière. Elle devrait continuer à compter sur le soutien et les conseils de son prédécesseur qui demeure membre du bureau et vice-président pour assurer une succession en douceur jusqu’en 2026, date des prochaines élections.
«Gérard Claudel a su rassembler autour de lui les organisations professionnelles et leurs représentants, de façon à ce que tout le monde travaille dans le même sens, au service de nos entreprises.» Le témoin est aujourd’hui transmis et la nouvelle présidente peut compter sur un bureau solide avec Christophe Lemesle, vice-président Commerce, opticien à Rambervillers, Laurence Schwalm, vice-présidente Service, des Éditions Ex aequo à Plombières-les-Bains, Nathalie Vaxelaire, vice-présidente Industrie de la société Trane de Golbey, Jean-Louis Vaxelaire, trésorier de la Graniterie Petitjean de La Bresse, Jean-François Houillon, trésorier adjoint de l’entreprise Houillon Électricité de Uzemain, Gérard Barriere, secrétaire de Trapid-Bigoni à Saulxures-sur-Moselotte et David Senot, secrétaire du Centre du sanitaire et carrelage de Nomexy.
Femme du Chiffre
Première femme à être élue à la présidence de la chambre consulaire vosgienne, elle ne l’affiche pas comme un étendard et encore moins comme une revanche. La nouvelle présidente apparaît bien au-dessus de cela, plus encline à «accompagner les entreprises petites et moyennes de notre territoire.» Le fait est tout de même à souligner. En Lorraine, de mémoire consulaire, aucune femme n’a occupé cette fonction. Dans l’Hexagone à peine une dizaine de chambres de commerce, sur les quelque cent vingt ancrées sur le territoire, sont présidées par une représentante de la gent féminine. Un petit dix pour cent !
«J’ai toujours évolué professionnellement dans un monde d’hommes», assure cette femme du Chiffre, experte-comptable et commissaire aux comptes associée au sein du cabinet Orcom affichant une quarantaine d’années d’expérience et ancienne présidente de la Compagnie régionale des commissaires aux comptes. L’écosystème entrepreneurial, elle le connaît, le vit, le perçoit, l’appréhende au jour le jour dans son activité professionnelle, sans doute encore un peu plus aujourd’hui avec son nouveau rôle de présidente de chambre.
«Les terrains d’interventions de la chambre sont un miroir de mon activité d’experte-comptable, je suis un peu alors de l’autre côté de la barrière.» L’univers consulaire, elle le connaît bien. C’est en 2016, qu’elle fait ses premiers pas à la chambre consulaire vosgienne en tant que membre élu. Cinq ans plus tard, elle est élue membre du bureau et vice-présidente. Près de dix ans de réseau consulaire où elle a notamment vécu la succession des réformes et des coups de rabot impactant. À l’instar des autres chambres de commerce et d’industrie, la CCI des Vosges a vu les subventions publiques se réduire à peau de chagrin entraînant une remise en cause certaine du modèle économique même de l’institution. Conséquence directe : «nous avons diminué nos effectifs de moitié.»
Aujourd’hui, la CCI vosgienne affiche une équipe de cinquante personnes «notre chambre possède un socle financier solide et nous pouvons remplir nos missions auprès de nos ressortissants.» Des missions régaliennes avec en première ligne «celle de trait d’union des dispositifs étatiques mis en place au niveau des différentes transitions écologique ou encore numérique. Notre rôle est de les faire connaître au niveau local.» Tout comme les objectifs fixés par l’État notamment en termes d’accompagnement des entreprises.
«Nous nous devons d’être un facilitateur pour permettre à notre écosystème entrepreneurial de faire face et d’anticiper les nombreuses mutations aujourd’hui en cours.» Faire face, à une conjoncture plus que délicate. «2025 est une année que nous allons devoir passer en étant plus que vigilants.» Référence faite à une instabilité politique latente, un contexte géopolitique international inquiétant et un manque général de visibilité.
La priorité du digital
«Nos entreprises vosgiennes, comme partout ailleurs, ont pris de plein fouet les impacts des différentes crises à répétition que nous avons vécues.» Crises sanitaire, énergétique, des matières premières, inflation, la liste est longue comme le bras. Anne-Christine Frère l’assure, «d’une façon générale, le tissu des entreprises vosgiennes est moins sensible aux différents soubresauts. Elles sont moins impactées que dans d’autres portions du territoire.»
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© Quai Alpha. Le Quai Alpha, situé au Centre d’affaires de la CCI des Vosges à Epinal, s’affiche comme le moteur de la transition digitale des entreprises souhaitée par la chambre consulaire.
Reste que les interrogations, voire des inquiétudes, planent sur de nombreuses filières avec en première ligne dans les Vosges, l’automobile. Dans ce contexte, la nouvelle pilote de la CCI vosgienne entend accélérer sur ces adaptations nécessaires à une économie changeante. Digitalisation, intelligence artificielle, transition environnementale, aide aux financements avec notamment des fonds spécifiques CCI comme celui ciblé sur les TPE-PME, incubation de nouveaux projets s’affichent comme les fils rouge de la mandature engagée, en continuité directe avec la précédente.
Le volet digital s’affiche comme une des priorités de la nouvelle présidente : «une équipe marketing digital dédiée va accompagner pendant dix-huit mois une douzaine d’entreprises affichant une certaine maturité dans ce domaine histoire de développer l’existant.» Même intérêt renforcé sur l’IA «où il nous faut aujourd’hui réellement lever les peurs et faire de l’IA un allié et non une menace.»
Dans cette logique d’accompagnement, le Quai Alpha situé au Centre d’affaires de la CCI des Vosges à Épinal s’affirme comme le vaisseau amiral en la matière. Cette plateforme a été impulsée par la chambre suite à un rapport de l’agence Scalen qui pointait du doigt en 2017 les faiblesses numériques du territoire vosgien.
«En moins de dix ans, la donne a énormément évolué dans le bon sens. Le Quai Alpha permet l’émergence et la réussite des projets de création ou de développement d’entreprises affichant une dimension innovante et numérique. C’est également un outil territorial d’attractivité du territoire et avec lui, nous possédons toutes les compétences nécessaires pour mener à bien cette transition numérique et principalement au cœur des plus petites entreprises qui n’ont pas forcément les moyens d’avoir un service dédié en interne.»
Faciliter toujours et encore pour démocratiser et généraliser les services aux entreprises qui en ont le plus besoin. Un ADN affirmé dans les autres champs d’action de la CCI. La formation, avec le CFA de Sainte-Marguerite formant aux métiers de l’immobilier, du commerce, du tourisme ou encore à la gestion d’une PME, «mon prédécesseur aimait mentionner que la CCI des Vosges était le deuxième formateur du département après l’Éducation nationale», ou encore le développement économique du territoire avec l’agence Vosges&Co, dernière agence de développement économique de la région lancée en décembre 2023 et née de l’impulsion de la Région Grand Est, du Département des Vosges, de la Chambre d’agriculture, des dix intercommunalités vosgiennes et de la CCI. La chambre vosgienne apparaît bien armée pour faire face aux défis d’aujourd’hui et de demain avec une nouvelle capitaine visiblement déterminée !
Tourisme en mode 4 saisons
À l’Est, c’est la montagne, à l’Ouest, c’est la plaine et à l’Est il doit y avoir du nouveau ! À l’instar des autres acteurs de l’écosystème, la CCI des Vosges participe à l’évolution nécessaire des professionnels du tourisme vosgien. Partie prenante au sein de la Maison de la montagne à La Bresse, pilotée par le Département, la chambre consulaire entend insuffler ce changement de modèle économique pour aboutir notamment à un véritable tourisme quatre saisons.