Transition énergétique

Amiens Energy Summit #2 : comment gérer les données pour atteindre l'autonomie énergétique...

Colloque national dédié à l’optimisation des données pour une ville 100% autonome, Amiens Energy Summit #2 s’est déroulé en ligne le 25 novembre dernier. Autour de la table : de nombreux acteurs du territoire engagés dans la transition énergétique, venus dévoiler les actions et stratégies mises en place pour atteindre cette nécessaire autonomie énergétique.

L'optimisation des données : nécessaire pour atteindre l'autonomie énergétique.(c)AdobeStock
L'optimisation des données : nécessaire pour atteindre l'autonomie énergétique.(c)AdobeStock

Qui mieux qu’Amiens Cluster pour organiser Amiens Energy summit #2 ? L’accélérateur et incubateur accompagne des entrepreneurs innovants, capables de répondre aux enjeux économiques du territoire, dont celui de devenir autonome en énergie en 2050. Cinquante-quatre projets ont été en trois ans incubés au sein d’Amiens Cluster, 35 entreprises accélérées, 15 immatriculées, ce qui représente une centaine d’emplois. « Les levées de fonds représentent elles 8 millions d’euros », précise Éric Dadian, le président de l’incubateur.

Épicentre de cette transition énergétique, Amiens Cluster œuvre en synergie avec de nombreux acteurs investis et convaincus que cette transition passe par une utilisation optimale des données, avec comme autre objectif celui d’emmener les citoyens dans ce mouvement de fond.

« Nous avons un besoin indispensable de stockage et de traitement des données pour faire avancer les choses »

Le numérique est devenu un élément incontournable pour opérer la transition énergétique, qui passe obligatoirement par la collecte et l’optimisation des données locales en énergie. Et pour y parvenir, « il faut une volonté politique forte », de l’avis d’Éric Dadian, volonté qu’a eue il y a deux ans Amiens, souvent pionnière en la matière où fleurissent les initiatives visant à opérer la transition énergétique. La ville s’est lancé un défi ambitieux : devenir énergétiquement autonome.

« Nous nous sommes fixé une feuille de route, en initiant notamment le réseau de chaleur de la ville, qui dessert l’équivalent de 19 000 foyers amiénois [ndlr, sur 70 000], en investissant dans des bus électriques et en nous engageant dans l’énergie solaire », explique Alain Gest, président d’Amiens Métropole, qui a également favorisé l’implantation sur son territoire du Mipih, acteur public majeur du numérique en santé, doté d’un data center de 1 200 m² (300 m² alloués à la salle des serveurs) hébergeant les données de santé.

Le premier colloque qui s’est tenu il y a deux ans avait déjà permis de nouer des partenariats et de lancer quelques projets : une mini centrale hydro-électrique a vu le jour dans la petite commune de Remiencourt, la création d’un démonstrateur dans le domaine du gaz vert ou le projet Pareo, pour la rénovation énergétique des logements ou la future ferme solaire qui s’étendra sur douze hectares, à proximité d’Amiens. « Nous avons un besoin indispensable de stockage et de traitement des données pour faire avancer les choses », assure Alain Gest.

« Aujourd’hui, nous en sommes à 6% d’autonomie, il faut que nous balisions le parcours qu’il nous reste à effectuer et que nous nous fixions des objectifs intermédiaires concrets, les citoyens sont très sensibles à ces questions », rappelle Brigitte Fouré, la maire d’Amiens.

Des outils au service des collectivités

« Notre défi, c’est la massification. Et mesurer cette évolution, il faut des indicateurs, disposer de données est primordial pour que l’investissement public soit le plus efficient possible », reprend Frédéric Motte, président la mission Rev3 innovation et sobriété.

« Une chose est sûre et c’est la volonté affichée des collectivités locales : il faut vraiment accélérer le rythme de la production d’énergies renouvelables, si l’on veut atteindre la neutralité carbone en 2050 », expose Maité Jaureguy-Naudin, Data & Innovation Director chez Réseau de transport d’électricité (RTE), qui met à disposition des collectivités les données collectées, pour qu’elles puissent s’en emparer et trouver des solutions afin de booster leur efficacité énergétique.

La ville d'Amiens a réduit sa facture d'électricité de 60 000 euros en utilisant le Datalab d'Enedis. (c)AdobeStock

Enedis a lui mis au point depuis quelques années déjà son compteur communicant Linky, un outil au service de la transition énergétique. « Au-delà du suivi de la consommation, un vrai bénéfice pour le client, on peut imaginer utiliser les 33 millions de compteurs disponibles en France pour appréhender les choses plus globalement, agréger des données à l’échelle de quartiers, collectivités, départements… et en tirer des enseignements sur la maîtrise de l’énergie de bâtiments ou l’autoconsommation collective. Les collectivités clientes d’Enedis peuvent déjà le faire via notre service Datalab, avec un suivi en temps réel qui permet de détecter les surconsommations et de faire des économies. C’est un outil important pour les politiques publiques », explique Yves Delabie, directeur territorial Picardie Enedis. Amiens a d’ailleurs grâce au Datalab réduit de 60 000 euros sa facture d’électricité.

Autre exemple mis en avant durant le colloque : celui du projet Vertpom (pour Véritable énergie du territoire positif et modulaire). Développé au sein du laboratoire de technologies innovantes de l’UPJV, il a pour ambition de tendre à l’autosuffisance énergétique grâce à un outil expérimental, la Banque de l’énergie, un simulateur d’algorithmes d’Intelligence artificielle, testé dans un premier temps dans les villes de Péronne et Saint-Quentin.

Sa finalité : faciliter l’utilisation des énergies renouvelables spécifiques à chaque territoire, pour contribuer à la réduction des gaz à effet de serre et les rendre moins dépendants des énergies traditionnelles, en devenant des Territoires à énergie positive (Tepos).

Travailler en synergie et consolider les données

Pour le président de l’Université de Picardie Jules-Verne et de l’Alliance nationale de coordination de la recherche pour l’énergie (Ancre) Mohammed Benlahsen : « La donnée est un formidable outil d’aide à la décision, mais elle doit être robuste et consolidée, le collaboratif et le réseau sont essentiels. »

Sentiment partagé par Bertrand Monthubert, président d’Occitanie data, association toulousaine qui regroupe des acteurs d’horizons divers : « Nous devons travailler en synergie, et faire valoir notre culture européenne pour embarquer la population dans cette transition. Notre objectif, c’est de créer un cadre de confiance éthique et souverain pour l’économie de la donnée, développé de manière collaborative, pour que la population n’ait plus de craintes, c’est essentiel. Les outils aujourd’hui mis à disposition des citoyens sont utiles, mais encore insuffisants. »