Accès aux documents des salariés
Fichiers informatiques et courriels
L’employeur peut ouvrir les courriels adressés par le salarié à l’aide du matériel informatique mis à sa disposition, qui sont présumés avoir un caractère professionnel, sans la présence de celui-ci, sauf s’ils sont identifiés comme personnels. (Cass soc. 26 juin 2012. pourvoi n° 11-14022)
Une chargée de recrutement avait été licenciée pour faute grave le 10 août 2007, pour avoir tenu des propos injurieux dénigrant ses collègues et la hiérarchie de l’entreprise. Elle avait saisi la juridiction prud’homale d’une demande en paiement de diverses indemnités au titre de la rupture de son contrat. Dans sa décision, la chambre sociale de la Cour de cassation rappelle que les courriels adressés par le salarié à l’aide de l’outil informatique, mis à sa disposition par l’employeur pour les besoins de son travail, sont présumés avoir un caractère professionnel; l’employeur est en droit de les ouvrir hors la présence de l’intéressé, sauf si le salarié les identifie comme personnels. Il appartenait donc aux juges du fond de rechercher si les mails litigieux avaient été identifiés comme personnels par leur auteur. Le règlement intérieur de l’entreprise peut contenir des dispositions restreignant le pouvoir de consultation de l’employeur, en le soumettant à d’autres conditions. (Cass soc. 26 juin 2012. pourvoi n° 11-15310)
Un responsable de service informatique avait été licencié, en mai 2009, pour faute grave après avoir consulté des données confidentielles. L’employeur invoquait le fait que les courriels adressés ou reçus par le salarié à l’aide de l’outil informatique mis à sa disposition par l’entreprise pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel, en sorte qu’il est en droit de les ouvrir hors sa présence, sauf s’ils sont identifiés comme personnels. Toutefois, en l’espèce, le règlement intérieur de l’entreprise prévoyait que les messageries électroniques des salariés ne pouvaient être consultées par la direction qu’en présence du salarié. Pour la Cour de cassation, cette dernière disposition s’imposait donc aux parties.
La dénomination donnée au disque dur par un salarié ne peut conférer un caractère personnel à l’intégralité des données qu’il contient. Les fichiers litigieux, qui n’étaient pas identifiés comme «privés», selon les préconisations de la charte informatique de l’entreprise, pouvaient être régulièrement ouverts par l’employeur. (Cass soc. 4 juillet 2012. pourvoi n° 11-12502)
Un salarié, employé à la SNCF depuis novembre 1976, avait été radié des cadres le 17 juillet 2008 pour avoir stocké sur son ordinateur professionnel un très grand nombre de fichiers à caractère pornographique ainsi que de fausses attestations. Dans sa décision, la chambre sociale de la Cour de cassation confirme sa position sur les fichiers créés par le salarié via l’outil informatique de l’entreprise. Et elle estime que la dénomination donnée au disque dur lui-même ne peut conférer un caractère personnel à l’intégralité des données qu’il contient. Les juges du fond avaient retenu que la dénomination « D:/données personnelles » du disque dur de l’ordinateur du salarié ne pouvait lui permettre d’utiliser celui-ci à des fins purement privées et en interdire ainsi l’accès à l’employeur. Pour légitimement en déduire que les fichiers litigieux, qui n’étaient pas identifiés comme étant «privés», selon les préconisations de la charte informatique, pouvaient être régulièrement ouverts par l’employeur. En l’espèce, le salarié avait stocké 1 562 fichiers à caractère pornographique représentant un volume de 787 mégaoctets sur une période de quatre années. Il avait également utilisé son ordinateur professionnel pour confectionner de fausses attestations. Cet usage abusif et contraire aux règles en vigueur au sein de la SNCF de son instrument de travail constituait un manquement à ses obligations contractuelles.
Autres documents
L’employeur peut prendre connaissance, de manière licite, d’un document détenu par un salarié dans son bureau et ne portant aucune mention relative à son caractère personnel. (Cass soc. 4 juillet 2012. pourvoi n° 11-12330)
Une salariée, employée depuis 1980 à la SNCF, en dernier lieu comme cadre commercial, avait été radiée des cadres le 24 septembre 2007 pour avoir émis des bons d’échange pour obtenir des titres de transport remis indûment à des tiers, après la découverte le 25 mai 2007, dans le tiroir de son bureau d’une enveloppe contenant des billets de train promotionnels. Elle avait saisi les prud’hommes pour obtenir diverses indemnités au titre de la rupture. La Haute cour rappelle que les documents détenus par un salarié dans un bureau de l’entreprise sont présumés professionnels, de sorte que l’employeur peut en prendre connaissance même hors la présence de l’intéressé, sauf s’ils sont identifiés comme étant personnels. Les juges du fond ayant relevé que l’enveloppe contenant les documents litigieux, estampillée SNCF, ne portait aucune mention relative à son caractère personnel et se trouvait dans un tiroir non fermé à clé, en ont justement déduit que l’employeur avait pu en prendre connaissance de manière licite.