À Wormhout

Prodlin : les anas de lin (enfin) valorisés

La jeune entreprise développe des granulés 100% biosourcés pour les litières d’animaux de compagnie et pour le paillage de massifs arborés ou fleuris. Ce nouveau débouché pour un déchet végétal produit en très grande quantité lors du teillage du lin - et jusqu’à présent difficilement valorisé - est une aubaine pour la filière, très présente en Flandre.

Patrice Poulard, dans ses locaux de Wormhout, en août dernier.
Patrice Poulard, dans ses locaux de Wormhout, en août dernier.

Patrice Poulard a quitté son Anjou natal pour s’installer en Flandre, dans la ville de Wormhout, il y a un peu plus de deux ans. Ce fils d’agriculteur, conseiller en gestion de patrimoine, avait besoin de s’implanter au cœur de l’une des plus grandes régions françaises de production de lin pour développer l’entreprise qu’il venait d’imaginer : transformer un sous-produit issu du teillage de lin, les anas, en granulés pour poêles à pellets. Un marché en pleine expansion depuis une dizaine d’années. «Cette idée m’est venue à force de conseiller à mes clients d’investir dans des produits financiers dans le secteur du développement durable. À un moment de ma vie, j’ai voulu aller plus loin en investissant moi-même concrètement dans ce secteur. Je connaissais le lin et le problème de la valorisation des anas, les petits morceaux de paille qui entourent la fibre textile produits en quantité énorme lors du teillage», résume-t-il. 

Seulement, la SAS Prodlin se heurte, dès sa création, à un problème de taille : les brûleurs des poêles à pellets ne sont pas compatibles avec des granulés fabriqués à base d’anas. «Par la force des choses, ce sont les deux autres applications auxquelles j’avais pensé : les granulés pour litières animales et pour paillage de massifs qui sont devenues majoritaires», commente le chef d’entreprise. Les granulés pour paillage séduisent, notamment, très vite les pépiniéristes et producteurs de fleurs hollandais, qui représentent aujourd’hui 90% de la clientèle. «L’avantage de ce paillage est d’avoir un PH neutre et donc de ne pas acidifier le sol. Très absorbant, il crée, à l’usage, une sorte de croûte de protection perméable à l’eau et à l’air, ce qui a pour effet de réduire drastiquement les fréquences d’arrosage», détaille Patrice Poulard, qui vient de signer un partenariat avec une chaîne de jardineries très implantée dans le sud-ouest de la France, pour commencer à développer une clientèle de particuliers.

Recherche atelier de 1 500 m2

Les granulés pour litières à base d’anas, dont le principal atout est d’être compostables (alors même que 90% des concurrentes ne sont pas recyclables), représentent 10 % de l’activité de l’entreprise. Vendues sous la marque «Mistigreen» sur internet, elles viennent de trouver un nouveau débouché dans une chaîne d’animaleries dans l’agglomération dunkerquoise. «Mon objectif prochain est de poursuivre le référencement du produit dans d’autres animaleries et grandes surfaces. Il reçoit toujours un excellent accueil lorsque je le présente lors de salons ou de foires auxquels je participe», précise Patrice Poulard. «Le côté produit 100% biosourcé, issu de l’économie circulaire et recyclable plait beaucoup aux consommateurs».

Après avoir vendu sa première ligne de production, rapidement devenue trop petite, Patrice Poulard en a acheté une autre à un teilleur belge implanté près de Courtrai. Elle a une capacité de production de 1 800 tonnes par an, soit le double des besoins actuels de l’entreprise. L’objectif du dirigeant est désormais de rapatrier cette ligne dans le secteur de Wormhout, pour que ses produits puissent, de nouveau, être estampillés «100% local». «Mais pour cela, j’ai besoin d’un hangar couvert de 1 500 m2 minimum, loin des habitations car le process est générateur de bruit. Or, ce n’est pas facile à trouver, d’autant que je n'ai pas une capacité d’investissement importante. Mon entreprise est jeune et même si elle connaît un très fort développement, elle n’a, aux yeux des banques, pas encore fait ses preuves. C’est ce qui me bloque actuellement», regrette Patrice Poulard, qui a investi ses propres deniers et s’est associé avec des membres de sa famille pour démarrer l’aventure. Opiniâtre et déterminé, le chef d'entreprise n'en poursuit pas moins ses recherches, persuadé en la capacité de Prodlin de se créer un avenir.