A Brest, des maisons en carton recyclé et "zéro béton"

Le plancher est en carton, les murs sont en carton, le plafond est en carton... A Brest, le bailleur social BMH fait construire six maisons en carton recyclé, une première en...

 © Antoine AGASSE
© Antoine AGASSE

Le plancher est en carton, les murs sont en carton, le plafond est en carton... A Brest, le bailleur social BMH fait construire six maisons en carton recyclé, une première en France dans le domaine du logement social.

"On est assez satisfait d'être le premier bailleur social en France à faire ce type de  maisons en carton, même si le terme peut prêter à sourire", se félicite Georges Bellour, directeur général de Brest métropole habitat (BMH). "En tout cas, je ne sais pas s'il fait sourire, mais il fait beaucoup parler, ça c'est certain."

Alignées au milieu d'un quartier pavillonnaire du port breton, les six maisons, encore en travaux, passeraient presque inaperçues si leur matériau de construction n'était pas aussi inhabituel. 

"Quand nous avons étudié ce projet, il y avait des dalles béton et des murs entre chaque logement. Nous avons montré que nous pouvions aller plus loin que ça et construire en zéro béton", explique Alain Marboeuf, président de la société Bat'Ipac, à l'origine du procédé de construction en carton. 

Hormis un squelette en bois et des pieux métalliques pour fixer la maison au sol, presque tout est en carton: des planchers au plafond en passant par les murs.

Les panneaux autoportants, qui forment l'essentiel de la structure, sont composés de plusieurs plaques de feuilles de carton recyclé, collées les unes aux autres, et recouvertes d'une membrane étanche. Il faut ainsi compter 5 tonnes de carton par maison.

Un "produit sain", bon isolant thermique et acoustique, qui génère 72% d'émissions de gaz à effet de serre en moins par rapport à une construction classique (en parpaings et laine minérale), selon M. Marboeuf.

Un atout de poids alors que le secteur du bâtiment génère 23% des émissions de gaz à effet de serre françaises, selon le ministère de la Transition écologique. Le ciment et le béton représentent à eux seuls 8% des émissions de CO2 mondiales.

Des colis dans les murs

Avec l'explosion du commerce en ligne, la ressource en carton recyclé ne risque d'ailleurs pas de s'épuiser. "Ce sont tous ces colis-là qui finissent dans nos poubelles jaunes et que l'on va récupérer pour pouvoir refaire des blocs de carton", décrit le chef d'entreprise. "Et là, vous les retrouvez dans vos murs, dans vos planchers, dans vos toits."

Fabriqués par des structures d'insertion, les panneaux en carton sont recyclables "neuf fois" et présentent même l'avantage de stocker du carbone "sous forme de cellulose", ajoute-t-il. 

La tempête Ciaran, qui a provoqué de nombreux dégâts à Brest avec des vents à 156 km/h, n'a pas emporté ces maisons, qu'on pourrait croire plus vulnérables que d'autres. "C'est une certaine forme de démonstration de la solidité de ce type de bâti. Les murs ne se sont pas effondrés. Donc c'est un peu une démonstration par l'absurde de la qualité du produit", pointe M. Bellour.

Fixées sur des pieux à 30 cm du sol, sans dalle de béton, les maisons laissent même l'eau de pluie s'infiltrer dans le sol, afin d'éviter la saturation du réseau d'eau pluviale.

Un peu plus cher qu'une construction classique il y a encore quelques années, le prix de la maison en carton est désormais "équivalent" en raison de l'inflation du coût des matières premières, selon M. Marboeuf, qui avance une fourchette de "1.500 à 2.600 euros/m2" selon la typologie de bâtiment.

Les maisons brestoises doivent être achevées en avril 2024.

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